Réparer le monde.

Bonjour à toutes et à tous.


Slavoj Zizek est la dernière coqueluche de la gauche radicale, avec Alain Badiou. De son passage chez Taddeï il y a quelques semaines, je n'ai retenu que des explications embrouillées, un positionnement mal défini et une pensée peu séduisante. Je le comprends un tout petit peu mieux à la lecture du Nouvel Observateur de la semaine dernière, dans son débat avec Bernard-Henri Lévy, qui n'a pas son pareil pour tordre le coup aux canards de la gauche radicale (BHL s'apprête à sortir un prochain bouquin le 10 de ce mois).

Zizek part d'un constat : "Le lien entre capitalisme et démocratie est partout en train de se rompre", ce qui l'autorise à mener une charge contre "le capitalisme parlementaire démocratique". On voit tout de suite le danger : la gauche radicale, c'est l'une de ses spécialités, mélange tout et jette le bébé démocratique avec l'eau sale du bain capitaliste. Voilà en quoi consiste précisément sa radicalité. A quoi BHL rétorque qu' "il n'y a jamais eu de lien nécessaire entre le capitalisme et la démocratie".

La différence entre les deux penseurs, c'est que l'un est en lutte contre le mal (dont l'un des aspects est le communisme totalitaire) tandis que l'autre est en quête du bien (ce qui le conduit à reformuler l'idée communiste). BHL reprend cette formule de Walter Benjamin, que je ne connaissais pas mais qui me convient parfaitement : réparer le monde, seulement le réparer, ce qui est déjà gigantesque, alors que le transformer a toujours conduit à la tragédie ou à ... l'hypercapitalisme (voir aujourd'hui la Chine et la Russie, nouveaux paradis pour la spéculation financière).

La profession de foi du réformisme, la voilà, telle que BHL l'édicte : "L'idée que le monde est imparfait, qu'il le restera, qu'il faut se battre bien sûr, pour qu'il le soit un peu moins, mais que le pire advient quand on s'imagine qu'on va le changer à la racine". Zizek, lui, se présente comme "un gauchiste tout ce qu'il y a de plus pessimiste". C'est d'ailleurs la vraie nature du gauchisme : désespérer Billancourt par des haines et des rêves inconsidérés. Ainsi pense-t-il que "le capitalisme autoritaire est hélas l'avenir qui nous attend". Pas marrant le Zizek.

Pourtant, et c'est aussi une contradiction fréquente de la gauche radicale (qui fait que l'on trouve de ses représentants jusque dans les rangs du Parti socialiste), Slavoj Zizek tient parfois des propos dans lesquels je pourrais complètement me reconnaître : "je m'engage pleinement en faveur des processus réformistes concrets (...) Le combat d'Obama pour un système de protection sociale, voilà par exemple un événement de portée mondiale (...) Je ne suis pas un adversaire de la démocratie parlementaire".

Très bien. Mais quand Zizek termine son entretien au Nouvel Obs par un "N'abandonner le futur ni au marché ni à l'Etat, c'est ça le communisme pour moi", je reste sur ma faim, je redeviens sceptique et inquiet.


Bon après-midi.