L'Aisne avec DSK

27 septembre 2009

Une génération.

Bonjour à toutes et à tous.

Vendredi soir, avant la boxe, j'ai assisté, dans l'Hôtel de Ville de Saint-Quentin, à la remise des insignes de Chevalier dans l'Ordre National du Mérite à Claude Gransard. Beaucoup de monde, et du beau monde : de nombreux élus, le député, la députée européenne, des conseillers généraux, une conseillère régionale, et j'en oublie sûrement, que je n'ai pas pu voir.

Le colonel Dutel a rappelé le sens de la cérémonie, qui ne se réduit pas à une formalité protocolaire. Dans le genre, il est inimitable et c'est avec un plaisir à chaque fois renouvelé que j'écoute ses explications. Quel homme ! Un vrai personnage ! Quand on est face à lui, on se sent presque obligé de se mettre au garde-à-vous. 90 piges cette semaine, droit dans son corps et encore toute sa tête, une voix de stentor qui fait trembler la Salle des Mariages, une gueule, une présence et un discours à l'élocution parfaite, sans notes, d'une remarquable précision, structuré comme je les aime.

Vous en connaissez beaucoup capable de faire ça ? Quand j'en vois, et c'est fréquent, qui ont un demi-siècle de moins, leur papier entre les mains, tremblant de partout, buttant sur les mots, ânonnant leur texte, endormant l'assistance, ça fait vraiment pitié. Avec Dutel, ça décoiffe ! Il faut l'entendre distinguer un insigne et une médaille, et morigéner au passage les pauvres journalistes qui ont osé parler de "décoration" à propos des insignes de Chevalier dans l'Ordre National du Mérite. C'est un grand moment dans l'art oratoire !

Le sénateur-maire et le sous-préfet ont résumé la vie de Claude Gransard, et c'est de cela dont je veux ce matin vous entretenir. Car Claude appartient à une génération dont le parcours mérite d'être honoré et médité. Ce sont ces instituteurs, le plus souvent issus de familles modestes, formés à l'Ecole Normale (qui était alors plus qu'une école, une véritable culture, un état d'esprit), ne se contentant pas de leur travail en classe mais s'engageant dans la vie associative, les "oeuvres périscolaires" comme on les appelait, devenant bien souvent secrétaire de mairie, apprenant en quelque sorte sur le terrain le métier d'élu, devenant à leur tour maire d'une commune rurale. C'est le beau parcours de Claude Gransard, maire de Mesnil-Saint-Laurent, retracé par Pierre André et commenté par Jacques Destouches.

Cette génération adhérait fréquemment au Parti socialiste, poussant plus loin sa promotion jusqu'à devenir conseiller général ou bien, au plan professionnel, PEGC, c'est à dire professeur en collège, ce qui conduisait aussi à passer les concours de direction, à accéder au poste de principal. Cette filière a permis pour certains de devenir parlementaire ou président de conseil général, leur bâton de maréchal. Ainsi s'est constituée une génération de notables de gauche (au sens positif du terme), influents auprès de la population et permettant au PS de préparer ses victoires nationales.

Le drame du PS aujourd'hui, c'est que cette génération approche de son terme politique (même si elle a encore une longue vie devant elle !) et que ce mode de recrutement de nos élus, cette filière sociologique et professionnelle qui nous était si précieuse a disparu. La droite a su préserver son système de sélection des élites locales, pour des raisons qui sont liées à son histoire et à son idéologie (qu'il serait trop long d'expliquer ici). La gauche, elle, doit reconstruire ses réseaux.

A Saint-Quentin, c'est flagrant. Nous avons atteint l'os. A part le recrutement individuel pour convenance de courant ou besoin de reconnaissance personnelle, il n'existe plus de procédure collective, d'école de formation sur le tas de nos élus et futurs responsables. N'importe qui, du jour au lendemain, peut s'imposer dans la section et devenir candidat. C'est la loi hasardeuse des circonstances qui l'emporte et qui donne la prime aux téméraires et aux aventuriers. Les conséquences en sont désastreuses et cela ne se devrait pas.

Il nous faudrait, comme la génération précédente, des expériences de terrain, des parcours d'initiation, des résultats tangibles, des responsabilités éprouvées, une progression par étapes afin de repérer, de préparer et de propulser nos futurs élus et cadres. Aujourd'hui, c'est le règne de la combine, du copinage et des opportunités. Il y a là un vaste et difficile chantier de rénovation à mener. Le non cumul des mandats va dans ce sens mais ne suffira pas. Reconstituer des circuits de promotion à l'intérieur de notre Parti sera un travail long et patient mais d'une urgence absolue.

Aujourd'hui, à Saint-Quentin, dans le cadre d'une élection municipale, la droite est capable de fournir une liste de personnes influentes et socialement reconnues, qui crédibilisent sa démarche. La gauche n'y parvient pas véritablement, faute de bénéficier des réseaux qui pourraient alimenter une telle liste (à quoi s'ajoutent bien sûr hélas les divisions dans notre propre camp, qui n'arrangent rien). S'il y avait une action prioritaire à mener localement, ce serait celle-là : en souvenir de la génération qui passe, imaginer les nouvelles sources de recrutement de la génération politique à venir, qui aient pour principe et mesure le travail collectif et non pas l'allégeance individuelle.


Bonne journée.

34 Comments:

  • anonyme 3

    Respect au Colonel DUTEL un défenseur de l'armée nation que JOSPIN & CHIRAC ont sabordé , c'était un facteur incontournable d'une intégration si un service national bien pensé y avait été substitué , mais les hussards de la république ( dont parle EM ) sont presque tous disparus ou se reposent après souvent de très honorables carrières aux multiples activités dont l'exemple type était l'instituteur - secrétaire de Mairie , une vie de sacerdoce complètement au service de la nation et de la population , un lien unique et très fort que ne remplacera jamais un blog ...
    dommage que dans ce morceau de choix , on y voit trop le côté sergent recruteur ... trop c'est trop ...

    By Anonymous Anonyme, at 1:21 PM  

  • Hélas...

    By Blogger jpbb, at 2:28 PM  

  • ex habitante de mesnil , j'aimais bien la logique de claude gransard. par contre ce qu'il faut savoir mesnil st laurent. commune de 460 habitants : siège social de plusieurs entreprises, population exclusivement de notables..... val

    By Anonymous Anonyme, at 2:59 PM  

  • Et alors ?

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 6:18 PM  

  • no problem pour gérer une commune

    By Anonymous Anonyme, at 8:05 PM  

  • A 3

    qques commentaires d'une autre époque, car avec plus de 36000 communes la FRANCE n'est pas représentative d'une bonne gestion publique , ce n'est pas l'empilage des collectivités qui est le seul mauvais critére mais il est urgent de bien redéfinir les compétences ( au sens administratif du terme ) et pourtant ce n'est pas ce qui ressort en premier lieu mais bien le cumul des mandats qui est une conséquence mais pas le critére de base du travail public !!!!!!!!

    By Anonymous Anonyme, at 10:26 PM  

  • Dans ton éloge funèbre de cette génération il manque peut-être quelques éléments pour expliquer la désertification des talents qu'elle va laisser derrière elle (là je parle du contexte axonais). D'une part cette génération a été promue aux hautes responsabilités moins par ses mérites propres que par l'élan et la nouveauté de 81. Ensuite l'abus des principes de Peter et de Dilbert dans le management des promotions dans un système de cooptation de fait a produit ses effets prévisibles : mise à l'écart de tout ce qui respirait quelque talent, de tout ce qui s'ancrait dans le mouvement social ou les compétences professionnelles. Le cumul des mandats, les mandats à vie, ont bien entendu été un terreau qui a amplifié le phénomène jusqu'à le pousser au paroxysme où il est devenu la condition même de la survie du système... jusqu'à l'épuisement générationnel qui est en cours.
    Limiter drastiquement le cumul des mandats comme le nombre de mandats successifs dans une même fonction fait partie des solutions pour recréer, comme tu dis le souhaiter, du travail collectif. Mais c'est un combat qui n'est pas seulement juridique (il ne suffit pas de changer des statuts ni la loi) mais éminemment politique car il s'agit bel et bien de changer les mentalités (il arrive que les citoyens aient des complaisances avec ce système): la politique ne serait plus seulement l'espace de sélection de professionnels de la chose publique, mais aussi et surtout le petit boulot (et si possible le grand boulot) de l'ensemble des citoyens. Et ce pas seulement les jours d'élections. Donc une utopie à réaliser, l'essentiel étant de commencer à se mettre en marche.

    By Anonymous Thyl Ullenspiegel, at 1:05 AM  

  • A 3

    DE à Thyl
    on voit souvent en effet un renouvellement par reproduction interne, un attaché parlementaire devenant ensuite remplaçant de son député ... donc une représentation monolithique , plus beaucoup de médecins qui eux étaient des hommes de terrains etc... le personnel politique a un profil très peu représentatif de la nation ( cf Daniel LEMEUR etc... )

    By Anonymous Anonyme, at 9:45 AM  

  • Face à un colonel nimbé de dignité, le spectacle était édifiant.
    Vous avez dit du "beau monde", vous auriez dû dire du "gros monde" caractéristique dur surpoids qui règne à St-Q.
    Formation ... certains formateurs ne représentent qu'eux-même avec l'auréole de la fraude cambadélisenne.
    montel

    By Anonymous Anonyme, at 9:47 AM  

  • Thyl,

    Nous sommes d'accord. Pour le PS, je défends l'idée d'un recrutement externe au mérite, et pas interne à l'ancienneté.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 1:49 PM  

  • Personne ne mérite d'être recruté par le PS.

    By Anonymous Anonyme, at 11:15 AM  

  • C'est raide comme avis. Aussi raide sans doute que votre cerveau.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 1:01 PM  

  • De toute façon,
    personne ne veut être recruté par le PS.

    By Anonymous Anonyme, at 2:57 PM  

  • Sauf ceux qui ont envie de se faire élire quelque part. Ca fait un paquet !

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 5:10 PM  

  • On a vu à St quentin la derniere fois,
    personne ne voulait y aller,
    et celui qui a eu le courage de la faire,
    les autres ont tout fait pour le torpiller.

    By Anonymous Anonyme, at 7:42 PM  

  • Demandez-vous pourquoi personne ne voulait y aller. Quand vous aurez la réponse, ce sera pour vous le commencement de la sagesse. Car on trouve toujours un crétin pour se faire torpiller. Surtout en politique.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:24 PM  

  • Comme pour le canton nord la dernière fois.

    By Anonymous Anonyme, at 10:22 PM  

  • Comment s'appelait déjà,
    le crétin qu'on a trouvé pour se faire torpiller.

    By Anonymous Anonyme, at 10:23 PM  

  • Bien vu!

    By Anonymous Anonyme, at 1:02 AM  

  • Il a été le 1er à reconnaitre qu'il avait été un candidat surprise.

    C'est un synonyme de crétin qui se fait torpiller en langage politiquement correct.

    By Anonymous Anonyme, at 8:55 AM  

  • A 10.22 :

    Au canton nord, j'ai failli gagner. D'autres mieux placés que moi ont ailleurs perdu.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:36 AM  

  • A 8.55 :

    Je n'étais pas un candidat surprise pour moi mais pour les autres. Mais ils devront s'habituer à mes surprises. Je crois d'ailleurs qu'ils commencent à s'habituer, même si c'est difficile pour eux.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:38 AM  

  • Quelle arrogance,
    je crois qu'on n'avait pas vu ça,
    depuis un certain Bernard dans les années 80 qui lui aussi était le meilleur,
    on a vu sa carrière politique.

    By Anonymous Anonyme, at 9:45 AM  

  • C'est bien de nous expliquer la démocratie au ps,
    vous etes dans le représentant de la 1ere secrétaire,
    c'est vous le chef,
    le vote des militants de la section a mis en place un fantoche qui sera désavoué systématiquement par le national,
    belle idée de la démocratie.

    By Anonymous Anonyme, at 9:46 AM  

  • Vous irez expliqué votre courage aux électeurs de JPL,
    n'oubliez pas le parapluie,
    les tomates vont voler bas.

    Il faudra qu'un jour vous compreniez que vous n'etes pas seul
    et qu'il n'y a pas que vos envies et vos désirs.

    Croire que les électeurs ne vous tiendront pas rigueur de votre attitude,
    c'est oublier qu'ils existent et qu'ils ont leur volonté propre.

    By Anonymous Anonyme, at 9:57 AM  

  • A 9.45 :

    L'arrogance est du côté de ceux qui imposent leur avis contre l'opinion majoritaire de leurs camarades.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:30 AM  

  • A 9.46 :

    Je ne comprends pas ce que vous dites.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:31 AM  

  • 9.57 :

    De quels électeurs parlez-vous ? Le problème à Saint-Quentin, c'est que notre électorat ne vote plus pour nous. C'est ça que je veux changer.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:32 AM  

  • Le problème c'est que l'on ne peut pas changer tout seul, ce qui est votre cas. et je crois même que cela va de mal en pis.

    By Anonymous Anonyme, at 4:54 PM  

  • C clair que le PS local n'a pas fini de toucher le fond,
    ça va aller de mal en pis.

    Quand Emmanuel aura tout détruit,
    là, il pourra enfin tout reconstruire à sa main et selon sa volonté.

    By Anonymous Anonyme, at 6:19 PM  

  • A 4.54 :

    Je n'ai jamais prétendu qu'on pouvait changer tout seul une situation politique. C'est même la raison pour laquelle j'ai finalement renoncé à me présenter aux municipales. Je n'avais pas suffisamment de soutien collectif.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:40 AM  

  • A 6.19 :

    Vous posez une vraie et dramatique question : faut-il tout détruire pour tout reconstruire ? Ce n'est pas dans ma nature. Pour construire, il faut ... construire, pas détruire.

    En même temps, il est parfois nécessaire de passer par là, la rupture, pour faire avancer une situation.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:44 AM  

  • Et si ceux qui ne vous ont pas soutenu avaient eu raison de le faire,
    s'il ne vous avait pas soutenu car ils estiment que vous n'en êtes pas capable parce qu'ils vous connaissent depuis longtemps.

    Mais forcément, ils n'ont pas le droit,
    ce sont des cons et des irresponsables,
    ils osent ne pas etre d'accord avec le meilleur.

    Etre le meilleur,
    ça ne se fanfaronne pas,
    ça se prouve, ça se démontre,
    apres on peut dire j'ai été le meilleur,
    mais avant, c'est juste du brassage d'air.

    Peut-on vraiment reprocher à la section de ne pas avoir voulu d'un moulin à vent et d'un moulin à paroles.

    Comme on dit ici,
    grand parleu,
    petit faiseu.

    By Anonymous Anonyme, at 9:01 AM  

  • Le fan n°1 de celle qui nous a mis dans le mur comme candidat de rupture,
    faut oser quand meme.

    Le meilleur,
    c'est celui qui gagne,
    quand on a été conseillère générale
    député européen
    et qu'on est vice présidente du conseiller régional.
    C'est normal d'etre plus écouté qu'un militant qui se définit lui-meme comme lambda.

    By Anonymous Anonyme, at 9:04 AM  

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