Entre amis.

En descendant la rue Jean-Jaurès ce matin, juste après mes cours, j'ai rencontré un ami, un vrai, quelqu'un qui m'apprécie, qui est souvent d'accord avec moi mais qui n'hésite pas à me dire ouvertement ce qu'il pense. Je l'en remercie, je n'aime pas les courtisans. Ses propos ce matin ont été plutôt durs, mais l'essentiel est qu'ils aient été sincères. Je vous les retranscris approximativement:

"Laisse tomber la politique, à Saint-Quentin, c'est fichu, tu t'épuises pour rien. Tu es seul, on ne te suit pas, moque t'en, laisse filer. Les poperénistes sont des malins et toi un gamin. Ils sont pour six ans au conseil municipal, tranquilles. Toi, tu n'as plus que ton blog, et des articles régulièrement dans la presse. Dérisoire! Regarde-toi: tu étais le "candidat naturel" de ces dernières municipales, le mieux placé pour mener cette bataille, et je t'ai soutenu. Maintenant, tu n'es plus rien. Eux, ils se sont mis la Fédé dans la poche et ils ont gagné. Réfléchis un peu, bon sang: ceux qui pouvaient, qui auraient dû te soutenir, ne l'ont pas fait. Ils ne le feront pas plus demain qu'hier. Quand je pense que Pierre André a essayé de te mettre de son côté! Tu es con ou quoi? Tu crois que tes activités associatives vont te sauver? Tu vis dans l'illusion. Pourtant, tu aurais tellement mieux à faire! Et ridicule avec ça: est-ce que tu te prends pour le 45ème conseiller municipal, du haut du balcon de l'hôtel de ville? Tu veux que je te dise: tu me fais pitié."

J'ai rapporté ces propos dans le désordre, mais la tonalité générale était bien celle-là. Seul un ami peut vous dire ça, et seul un ami peut l'entendre. J'ai souri, j'ai répondu calmement ceci, tout aussi approximativement:

"Ce que tu dis n'est pas faux mais un peu injuste, tu noircis le tableau, qui est il est vrai assez sombre. Les choses sont ce qu'elles sont, on ne va pas revenir en arrière, refaire l'histoire. Ce que je sais, c'est que les événements se sont déroulés comme ils devaient se dérouler, qu'il n'y a rien à regretter. Suis-je ridicule, pitoyable? On l'est toujours un peu quand on prétend défendre une vérité. Mais c'est ainsi, il faut poursuivre sa voie, se dire qu'on ne le fait pas pour soi. Les autres? Ils sont comme ils sont, personne, pas même moi, ne les changera. C'est la vie, c'est l'avenir qui auront le dernier mot. La réalité ne m'arrête pas, sinon j'aurais abandonné depuis plusieurs années. Ma morale? Toujours faire "comme si". Comme si j'avais raison, comme si j'étais suivi, comme si j'allais gagner. Après, on voit ce que ça donne. Et si on en a marre, on stoppe. Mais y'a encore de la marge!"

Mon ami m'a dit que je parlais bien, que j'avais de jolis raisonnements mais qu'il n'était absolument pas convaincu. Puis nous avons parlé d'autre chose autour d'un verre au Liberty, un troquet non loin de chez moi.


Bon après-midi.