L'Aisne avec DSK

28 mars 2009

La révolution et la crise.

Bonsoir à toutes et à tous.

La France est en stand-by: d'un côté des syndicats l'arme au pied, massivement soutenus par la population, de l'autre un président qui détient le pouvoir, ne cède rien sur sa politique, est plus impopulaire que jamais. Que va-t-il se passer? Personne ne le sait, mais quelque chose doit se passer. On ne peut pas imaginer qu'après deux journées de mobilisation sociale gigantesque, tout reste en l'état. Aucune démocratie moderne ne peut se satisfaire de ça. En attendant, je vous invite à prendre un peu de recul en vous proposant l'analyse suivante:

Nous avons vécu, ces trente dernières années, une révolution culturelle, que nous devrions plutôt appeler une contre-révolution, puisque ses effets n'ont pas été progressistes. Les années 50-60-70 ont été une période de progrès économique et culturel. A partir des années 80, nous assistons à un renversement de valeurs, qui s'est fait en trois temps:

1- Année 80: avec la montée électorale de l'extrême droite, les immigrés, qui jusqu'alors n'étaient les boucs émissaires que de groupuscules nationalistes, sont montrés du doigt par une partie non négligeable de la population. Ils passent pour voler l'emploi. Première régression.

2- Année 90: c'est le thème de l'insécurité qui s'impose petit à petit. L'ennemi, ce n'est plus seulement l'immigré, mais le délinquant. Autrefois, les "voleurs", c'était les riches. Désormais, ce sont les petits voyous. Deuxième régression.

3- Année 2000: la défaite de Jospin, c'est la victoire d'une opinion qui trouve que les socialistes en font trop pour les pauvres. Chômeurs, rmistes, allocataires en tout genre deviennent les nouveaux coupables. Troisième régression.

Ainsi, en trente ans, l'électorat de gauche a fait basculer progressivement l'idéologie qui était la sienne: au lieu de désigner les riches, les puissants comme responsables de la crise, il a vilipendé d'abord les immigrés, ensuite les délinquants, enfin les pauvres. L'élection de Sarkozy est l'aboutissement logique de cette longue séquence historique. Cet homme de la droite la plus classique, sans génie personnel ni charme particulier, largement incompétent dans bien des domaines, a réveillé dans le peuple de gauche la peur de l'autre, l'obsession du voyou et la méfiance envers le pauvre (qui sont dans l'électorat conservateur des réflexes traditionnels).

En revanche, il a réhabilité le riche, le puissant, l'a exonéré de toute responsabilité, l'a même posé en victime (le "bouclier fiscal" pour le protéger!). Chez ce vieux peuple catholique, où droite et gauche confondues se méfiaient de l'argent, Sarkozy aura réussi à faire aimer le fric au prétexte du travail ("Travailler plus pour gagner plus"). Aucun homme de droite avant lui aurait osé cela, De Gaulle aurait détesté. Voilà la révolution culturelle qui a littéralement retourné notre pays ces trente dernières années, et profondément déstabilisé l'électorat de gauche.

Mais après la révolution vient aujourd'hui la crise: les valeurs qui ont permis le triomphe de Sarkozy sont remises en question avec la faillite du capitalisme financier. Qu'est-ce qui scandalise désormais un Français moyen et un électeur de gauche? Non pas l'immigré qui va chercher ses allocs à la CAF, non pas le voyou qui pique une mobylette, non pas le chômeur qui traîne chez lui parce qu'il n'y a pas de boulot. Non, désormais, ce qui choque, ce sont ces hautes rémunérations, ces salaires pharamineux, ces indemnités injustifiées, ces revenus inimaginables et tous ces mots étranges, bizarres, inhabituels, dont on pressent qu'ils ne sont que la face visible de tout un système contestable: stock option, bonus, "parachute doré".

Enfin, un cycle se termine, un nouveau commence. Tous les trente ans, nous connaissons cela. C'est à peu près le temps d'une génération. Cette France en stand-by attend de la gauche qu'elle apporte des réponses, qu'un président décalé et désavoué par les faits ne peut plus lui fournir. Le chemin est encore long, incertain, la victoire n'est pas acquise, mais la direction est prise.


Bonne soirée.

14 Comments:

  • C'est exactement ce que je disais
    quand vous parlez des trains ou d'Orelsan vous etes intéressant et pertinent.

    Des qu'il est question de parler de politique, vous n'y comprenez rien.

    La question est réglée,
    apres avoir fait monter la sauce parce qu'ils avaient des élections professionnelles à gagner,
    les syndicats vont revenir aux principes de réalité et faire comme si de rien n'était.

    Il y aura la mobilisation du 1er mai, le mois de mai et ces nombreux ponts et we,
    juin, le beau temps,
    les européennes à préparer,
    les partis de gauche feront pression pour qu'on calme le jeu afin que cela ne vienne pas pourrir la campagne
    les vacances de juillet qui approche.

    Tout est réglé,
    il ne se passera plus rien.
    D'ailleurs que pourrait-il se passer.
    Il est temps pour la société de consommation de préparer ses vacances.
    Sous villepin, les syndicats avaient déjà fait le coup.

    Le seul probleme qui va se poser viendra de tout ceux qui se sentiront encore une fois trahi par les syndicats qui vont se mettre en sommeil,
    et encore, ils en ont tellement l'habitude que cela ne les surprendra surement pas.

    By Blogger grandourscharmant, at 8:09 PM  

  • la défaite de Jospin en 2002 c'est aussi la défaite d'un parti qui pensait qu'il allait automatiquement être au 2ème tour parce qu'il en avait toujours été ainsi.

    Plutôt d'accord avec l'analyse de GOC sur l'attitude ( probable, mais on peut se tromper!!) des syndicats.

    Sur les nouvelles formes de manifestation, avez vous écouté France Inter ce matin, c'était vraiment très interessant.

    By Anonymous lightbulb, at 8:57 PM  

  • A l'ours UMP:

    Le rêve de la droite, c'est une France qui ne fasse pas de politique mais qui joue à la pétanque ou regarde les trains passer. Désolé, je ne me plierai pas à ça.

    Vous espérez que la société de consommation éponge le mécontentement. Là aussi, vieille idée de la droite. Sauf que la société de consommation est désormais en crise et que l'éponge aura donc du mal à passer.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:00 PM  

  • A lightbulb:

    Que l'ours UMP parle de la "trahison des syndicats", c'est le répertoire habituel de la droite. Mais vous n'êtes pas obligé de chanter avec elle.

    J'ai écouté ce matin France Inter, mais d'une oreille distraite, en faisant autre chose. Je n'ai pas été très convaincu. Pour moi, rien ne vaut une bonne grève accompagnée par une belle manif. Je suis vieux jeu, mais c'est le seul jeu que je connaisse d'efficace. Le reste n'est que fantaisie.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:04 PM  

  • D'autant moins trahi que je n'ai jamais été syndiqué.
    Je reconnais cependant leur caractère indispensable dans une démocratie digne de ce nom.

    By Anonymous lightbulb, at 9:23 PM  

  • La droite n'a rien conter l'action syndicale bien au contraire,
    comment la droite pourrait etre contre des gens qui défendent leur intérets, pret à négocier pour cela.

    Hélas, en France, les choses se passent toujours de la meme façon,
    l'action syndicale finit par etre récupérer par les mouvements politiques et finalement
    les demandes légitimes syndicales finissent par etre enterrer sous des revendications politiques qui n'ont rien à voir.

    Et au final, la base en lutte légitime qui a fait des sacrifices
    n'est payé que de promesses qui ne sont jamais tenu de la part de ses représentants syndicaux récupérés politiquement.

    C'est pour cela que le travail de Mr Thibaut et Mr Chereque pour s'affranchir de leur tutelle politique est remarquable.

    Mais comment peut-on etre pour envoyer des gens dans la rue,
    leur demander de faire des sacrifices, tout en sachant que ces sacrifices ne seront pas payés de retour.

    Quand on est de droite,
    ça on ne peut pas faire,
    on connait le prix de l'effort,
    contrairement à vous et à ce que vous avez l'air de croire.

    Car des mouvements syndicaux montagne qui ont accouché d'une souris, on en a déjà vu plus d'un.

    By Blogger grandourscharmant, at 9:29 PM  

  • A lightbulb:

    Je n'ai pas de conseil à vous donner, mais vous devriez vous syndiquer. Il y a le choix!

    Merci en tout cas de l'hommage rendu à la nécessité des syndicats en démocratie, qui tranche sur les commentaires pervers de l'ours UMP.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:49 PM  

  • A l'ours UMP:

    A droite vous connaissez "le prix de l'effort"? Allez dire ça aux ouvriers qu'on a licencié! Non, à droite, vous connaissez le prix de l'argent.

    D'un côté vous flattez les syndicats, de l'autre vous les discréditez. Ecoeurant!

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:52 PM  

  • A entendre votre démagogie,
    on pourrait croire que c'est la droite qui est responsable des licenciements et non pas la direction des entreprises.

    Rassurez moi,
    vous ne faites quand meme pas cette confusion là ?

    Sinon vous avez raison,
    je suis écoeurant.

    Autant que vous qui louez l'initiative des syndicats d'avoir organisé un rassemblement mardi
    et qui déplorez qu'ils se soient fait débordés et qu'ils aient défilé alors que ce n'était pas prévu.

    By Blogger grandourscharmant, at 10:01 PM  

  • Ce n'est pas moi, ni la gauche, qui prétend que "tout est possible", c'est votre super héros hyper actif Sarkozy. Alors, qu'il fasse quelque chose contre les licenciements, comme il l'a de maintes fois promis!

    Qui y a-t-il d'écoeurant à condamner les débordements de mardi? Il est certain que ces débordements arrangent la droite puisqu'ils discréditent la gauche. C'est ça qui vous fait applaudir à ces débordements, espèce de vicieux!

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 8:58 PM  

  • cela je vous l'accorde
    avec vous tout est impossible,
    rien n'est réalisable.

    By Blogger grandourscharmant, at 11:16 AM  

  • Je ne suis pas dans l'excès à la Sarkozy. Non, tout n'est pas possible, mais beaucoup de choses sont faisables.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 12:54 PM  

  • Mais alors pourquoi ne les avez vous pas faite quand vous étiez aux responsabilités,
    pourquoi ne les faites vous pas aujourd'hui.

    Et surtout voter position semble bien minoritaire au sein de la gauche,
    vous etes surement l'exception qui confirme la regle.

    Sarkozy n'a jamais dit que tout était possible,
    mais qu'ensemble tout devient possible, c'était son slogan de campagne
    ce qui est radicalement différent.

    Ce sont vos amis d'extreme gauche qui passe leur temps à dire qu'on peut tout faire et qu'il n'y a pas de contrainte à avoir.

    By Blogger grandourscharmant, at 1:23 PM  

  • Vous pinaillez, vous confondez, je vous laisse vous amuser.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 5:58 PM  

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