L'Aisne avec DSK

15 mars 2011

Dialogue de sourds.


Bonjour à toutes et à tous,


Il y a des jours où j'aime la politique et des jours où je n'aime pas la politique. Les premiers sont beaucoup plus nombreux que les seconds. Hier soir, je n'aimais pas la politique. J'étais au Conseil municipal, à ma place. J'en suis sorti - comment dire : désabusé, lassé, interrogatif. Pourtant, il ne s'est rien passé d'exceptionnel. Peut-être justement parce qu'il ne s'est rien passé d'exceptionnel ... A moins que je sois fautif : fatigue, manque de concentration, désintérêt ... Toujours est-il que j'en suis revenu avec seulement une page de notes, où d'habitude j'en prend cinq.

Que s'est-il donc passé ? Encore une fois, rien de très spécial, mais j'ai l'impression que c'est cette routine qui m'affaiblit. Il y a tout de même des éléments objectifs, sur lesquels on peut mener une réflexion (j'ai failli pourtant ne pas faire de billet, il me semblait qu'il n'y avait pas matière). Mais là aussi, il faut se méfier de soi-même, de la subjectivité. Je vous livre cependant mes sentiments, dont on peut sans doute tirer des enseignements :

D'abord, par rapport à la présidence de Pierre André, il y a avec Xavier Bertrand des changements : la séance dure plus longtemps (le double, deux heures là où le précédent maire tenait une heure) ; les adjoints prennent plus volontiers la parole, quand elle n'est pas directement sollicitée par le maire ; celui-ci n'hésite pas à interpeller à sa façon l'opposition ; il consacre, en début et en fin de conseil, un moment assez long à des informations diverses.

Surtout, il y a le ton, l'atmosphère, très difficile à décrire, que les uns et les autres perçoivent peut-être différemment. Venez donc vous faire votre propre idée en assistant du balcon ! Hier soir, une expression ne m'a pas quitté en écoutant péniblement jusqu'au bout les débats : dialogue de sourds, oui c'est exactement ça, un dialogue de sourds. L'ordre du jour était pourtant politiquement riche, surtout dans ses digressions : développement du commerce en centre-ville, extension de la vidéo-surveillance, devenir des écoles, conception de la laïcité ... Mais les échanges tournaient vite court, aucun véritable débat ne s'instaurant entre majorité et opposition, des questions sans réponses et des réponses à des questions non posées, chacun parlant pour lui sans vraiment s'adresser à l'autre, à travers parfois des quiproquos, lapsus, incompréhensions, volontaires ou pas, pouvant frôler le surréalisme. A qui la faute ? A la droite ? A la gauche ? A tout le monde et à personne, à un système, à une situation ...

Ce que j'ai retenu de tout ça, c'est la grande confusion. La dimension personnelle m'a semblé souvent plus forte que la dimension politique. Quand le maire s'exprime, j'ai le sentiment qu'il ne parle indirectement qu'à trois personnes, les journalistes à la table de presse qui prennent scrupuleusement note de tout ce qui se dit. Mais le véritable enjeu n'est-il pas là ? Les reprises le lendemain et le surlendemain dans les journaux locaux. Si les citoyens ne viennent pas aux séances du Conseil municipal, ils lisent les compte-rendus dans la presse.

Je rêve d'une autre politique : des débats vifs oui, polémiques tant mieux, à condition qu'ils soient clairs, que chacun argumente dans la bonne foi, que les convictions ne cèdent pas la place à ce qui ressemble à des règlements de compte. Mais j'ai sans doute tort (le rêveur a toujours tort) : les hommes sont comme ils sont, on ne les refait pas, il faut les prendre comme ils sont. La démocratie c'est sans doute ça, un dialogue de sourds qui a le mérite d'exister, tant de régimes à travers l'histoire et le monde n'ayant aucun dialogue, de sourds ou pas.

En partant, j'ai quand même failli cracher mon amertume. Mais un écriteau au balcon me l'interdisait (voir vignette). Je me suis donc abstenu.


Bonne journée.

4 Comments:

  • "Si les citoyens ne viennent pas aux séances du Conseil municipal, ils lisent les compte-rendus dans la presse."

    Si vous y croyez vraiment, vous n'avez pas fini d'être déçu...

    By Anonymous Anonyme, at 9:49 PM  

  • Je ne crois pas, je constate. Je ne suis pas déçu, je suis provisoirement désabusé.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:59 PM  

  • Vous "constatez" vraiment que "les citoyens lisent les comptes-rendus dans la presse" ???

    Exercice croisé maths/Histoire :

    Après avoir rappelé les chiffres des ventes quotidiennes moyennes de la PQR, puis après avoir indiqué la part de l'abstention aux élections en France depuis 2004, vous en déduirez le nombre approximatif de gens qui s'intéressent à la vie politique au point de lire dans la presse locale les comptes rendus des séances du conseil municipal de Saint-Quentin...

    Enfin, on peut toujours rêver, surtout dans un "dialogue de sourds" : ça occupe et ça fait passer le temps.

    By Anonymous Anonyme, at 10:45 PM  

  • La presse régionale fait les plus forts tirages, beaucoup plus que la presse nationale. Elle est très influente. Quant au taux d'abstention aux élections, ça n'a rien à voir avec la lecture ou pas de la presse locale.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:56 PM  

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