La violence de la production.
Bonjour à toutes et à tous.
Dans le dernier Charlie Hebdo, je retiens l'éditorial (p.3), cette semaine rédigé par Oncle Bernard, c'est à dire l'économiste et excellent pédagogue Bernard Maris (que j'aimerais faire venir au Festival du Livre de Merlieux, parce qu'avec Val, ça me semble mal barré). Il est question de la crise et de sa violence:
"En vérité, le gâteau du capital est plein de haine, de lutte contre autrui, d'exclusion, de chacun pour soi. C'est pour ça d'ailleurs qu'il contient plus de déchets et de pesticides que de bonnes choses. Avec de la non-vie on fabrique de la non-vie, on détruit, on transforme le monde en déchetterie. Toute cette violence humaine est cristallisée dans l'accumulation. C'est pas de la marchandise qu'on accumule, mais de la scorie, ce qui reste quand on est passé par le presse-citron du boulot".
Et voilà la chute de l'article:
"... penser la fin de ce système violent, inhumain, où l'on demande de la rapacité à chacun pour prix de sa productivité (...) Peut-on, enfin, sortir de la violence de la production?"
Avec Maris, c'est toujours la même chose: je suis extrêmement séduit par ses analyses, j'y souscris très largement et en même temps, j'en ressens les limites (mais quelle analyse ne rencontre-t-elle pas à un moment ou à un autre ses limites? C'est même sûrement bon signe). La violence extrême du capitalisme, ok. Mais je me pose trois questions:
1- Si la production est violente, la politique, historiquement, ne l'est-elle pas infiniment plus? Guerres, conquêtes, oppressions, croisades, inquisitions, génocides, tout ça n'a pas de rapport direct avec l'économie, tout ça est terriblement plus meurtrier que l'économie. La violence n'est-elle pas beaucoup plus du côté du pouvoir que de la production?
2- Le capitalisme ne détruit-il pas autant qu'il construit? Sa nature n'est-elle pas fondamentalement ambivalente? Ce qui conduit d'ailleurs Marx à établir à la fois sa nécessité et sa disparition, à le louer et à le contester. La production, c'est en même temps l'exploitation du salariat et la société de consommation.
3- La production, en système capitaliste (mais son anarchie constitue-t-elle un "système"?), est violente parce que chaotique, concurrentielle, obsédée par le profit, obligée à l'exploitation, pour tout dire est irrationnelle. Soit, mais la rationalisation de la production a été mise en oeuvre, sous le nom de communisme, avec prévision, planification, organisation de la satisfaction des besoins et non plus recherche effrénée du profit. A quoi avons-nous alors assisté? A un irrationnel économique encore plus grand que celui du capitalisme, qui a fini par entraîner la disparition de la production rationalisée.
Bref, si la critique du capitalisme reste pertinente, elle ne peut plus se soumettre à un anticapitalisme primaire, elle doit aller de pair avec la critique de la production administrée.
Bonne matinée productive.
Dans le dernier Charlie Hebdo, je retiens l'éditorial (p.3), cette semaine rédigé par Oncle Bernard, c'est à dire l'économiste et excellent pédagogue Bernard Maris (que j'aimerais faire venir au Festival du Livre de Merlieux, parce qu'avec Val, ça me semble mal barré). Il est question de la crise et de sa violence:
"En vérité, le gâteau du capital est plein de haine, de lutte contre autrui, d'exclusion, de chacun pour soi. C'est pour ça d'ailleurs qu'il contient plus de déchets et de pesticides que de bonnes choses. Avec de la non-vie on fabrique de la non-vie, on détruit, on transforme le monde en déchetterie. Toute cette violence humaine est cristallisée dans l'accumulation. C'est pas de la marchandise qu'on accumule, mais de la scorie, ce qui reste quand on est passé par le presse-citron du boulot".
Et voilà la chute de l'article:
"... penser la fin de ce système violent, inhumain, où l'on demande de la rapacité à chacun pour prix de sa productivité (...) Peut-on, enfin, sortir de la violence de la production?"
Avec Maris, c'est toujours la même chose: je suis extrêmement séduit par ses analyses, j'y souscris très largement et en même temps, j'en ressens les limites (mais quelle analyse ne rencontre-t-elle pas à un moment ou à un autre ses limites? C'est même sûrement bon signe). La violence extrême du capitalisme, ok. Mais je me pose trois questions:
1- Si la production est violente, la politique, historiquement, ne l'est-elle pas infiniment plus? Guerres, conquêtes, oppressions, croisades, inquisitions, génocides, tout ça n'a pas de rapport direct avec l'économie, tout ça est terriblement plus meurtrier que l'économie. La violence n'est-elle pas beaucoup plus du côté du pouvoir que de la production?
2- Le capitalisme ne détruit-il pas autant qu'il construit? Sa nature n'est-elle pas fondamentalement ambivalente? Ce qui conduit d'ailleurs Marx à établir à la fois sa nécessité et sa disparition, à le louer et à le contester. La production, c'est en même temps l'exploitation du salariat et la société de consommation.
3- La production, en système capitaliste (mais son anarchie constitue-t-elle un "système"?), est violente parce que chaotique, concurrentielle, obsédée par le profit, obligée à l'exploitation, pour tout dire est irrationnelle. Soit, mais la rationalisation de la production a été mise en oeuvre, sous le nom de communisme, avec prévision, planification, organisation de la satisfaction des besoins et non plus recherche effrénée du profit. A quoi avons-nous alors assisté? A un irrationnel économique encore plus grand que celui du capitalisme, qui a fini par entraîner la disparition de la production rationalisée.
Bref, si la critique du capitalisme reste pertinente, elle ne peut plus se soumettre à un anticapitalisme primaire, elle doit aller de pair avec la critique de la production administrée.
Bonne matinée productive.
2 Comments:
Bravo, 100 pour 100 d'accord avec votre conclusion, et vive l'économie durable de marché!!
By lightbulb, at 11:26 AM
100 pour 100, merci bien, mais je n'en demande pas tant!
By Emmanuel Mousset, at 12:35 PM
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