La vérité est dans l'Aisne.
Bonjour à toutes et à tous.
J'ai longtemps cru que pour réussir en politique il fallait être quelqu'un hors du commun. Adolescent, je voyais Mitterrand ainsi, et je l'admirais. Mes camarades de droite avaient la même réaction avec De Gaulle. J'ai longtemps pensé qu'on devenait un leader, qu'on se faisait élire parce qu'on disposait d'une intelligence peu commune, d'un charisme mobilisateur, d'une forte capacité à convaincre et à entraîner, d'une rhétorique à toute épreuve. Bref je me suis longtemps imaginé l'homme politique en séducteur.
C'est parce que j'étais alors un puceau de la politique. Socialiste à Paris, je n'étais pas encore déniaisé. C'est en arrivant dans l'Aisne que j'ai perdu ma virginité politique, que j'ai compris de quoi il en retournait, pourquoi Untel l'emportait, comment il accédait au pouvoir. La grande révélation , c'est qu'un homme politique est tout sauf un séducteur, contrairement à ce que je croyais. Ses qualités personnels comptent peu dans son ascension, elles peuvent même, si elles sont trop élevées, le rabaisser. La vérité, que me cachaient les figures exceptionnelles de De Gaulle et Mitterrand, c'est qu'un homme politique n'est pas le résultat d'une volonté personnelle mais d'une situation, dont il n'est jamais le maître mais le produit.
Pourquoi vous dire ça ce matin, dont je vous ai déjà parlé dans de nombreux billets ? Parce que l'actualité m'y ramène. Barroso a été réélu magistralement à la tête de la Commission européenne. Qui est-il ? Un terne, un habile, le plus petit dénominateur commun à la droite, celui qui ne fait pas de vagues parce qu'il ne fait rien, n'a pas de bilan et s'entend avec à peu près tout le monde. Voilà le genre de type qui réussit en politique, et pas à n'importe quel niveau : à la tête de l'Europe, là où l'on rêverait d'un Alexandre, d'un César, d'un Charlemagne, d'un Napoléon, d'un Churchill, on a ... Barroso.
Comprenez-moi bien : à part Churchill, je n'ai aucune sympathie particulière pour ces grands hommes. Mais c'étaient des grands hommes. Barroso ne sera jamais un grand homme. Il n'est certes pas plus bête qu'un autre. Mais c'est ce que je lui reproche : n'être pas plus intelligent qu'un autre, être finalement interchangeable avec n'importe quel autre leader de la droite européenne, aussi peu séducteur. En Europe, en France ou dans l'Aisne, la question est la même : à quoi bon faire de la politique si ce n'est pas pour faire de grandes choses ?
Quand on est de droite, je peux comprendre, on est souvent un simple conservateur ou un gestionnaire tout juste avisé. Mais quand on est socialiste, on a moins d'excuses, on est porteur d'ambitions très élevées : changer la société, introduire plus de justice, émanciper l'homme. Ce sont des objectifs qui devraient naturellement nous élever, nous grandir. Pourquoi alors restons-nous trop souvent si petit ? J'ai beau avoir perdu ma virginité depuis un certain temps, je garde une nostalgie de pureté et de grandeur.
Bonne et grande journée.
J'ai longtemps cru que pour réussir en politique il fallait être quelqu'un hors du commun. Adolescent, je voyais Mitterrand ainsi, et je l'admirais. Mes camarades de droite avaient la même réaction avec De Gaulle. J'ai longtemps pensé qu'on devenait un leader, qu'on se faisait élire parce qu'on disposait d'une intelligence peu commune, d'un charisme mobilisateur, d'une forte capacité à convaincre et à entraîner, d'une rhétorique à toute épreuve. Bref je me suis longtemps imaginé l'homme politique en séducteur.
C'est parce que j'étais alors un puceau de la politique. Socialiste à Paris, je n'étais pas encore déniaisé. C'est en arrivant dans l'Aisne que j'ai perdu ma virginité politique, que j'ai compris de quoi il en retournait, pourquoi Untel l'emportait, comment il accédait au pouvoir. La grande révélation , c'est qu'un homme politique est tout sauf un séducteur, contrairement à ce que je croyais. Ses qualités personnels comptent peu dans son ascension, elles peuvent même, si elles sont trop élevées, le rabaisser. La vérité, que me cachaient les figures exceptionnelles de De Gaulle et Mitterrand, c'est qu'un homme politique n'est pas le résultat d'une volonté personnelle mais d'une situation, dont il n'est jamais le maître mais le produit.
Pourquoi vous dire ça ce matin, dont je vous ai déjà parlé dans de nombreux billets ? Parce que l'actualité m'y ramène. Barroso a été réélu magistralement à la tête de la Commission européenne. Qui est-il ? Un terne, un habile, le plus petit dénominateur commun à la droite, celui qui ne fait pas de vagues parce qu'il ne fait rien, n'a pas de bilan et s'entend avec à peu près tout le monde. Voilà le genre de type qui réussit en politique, et pas à n'importe quel niveau : à la tête de l'Europe, là où l'on rêverait d'un Alexandre, d'un César, d'un Charlemagne, d'un Napoléon, d'un Churchill, on a ... Barroso.
Comprenez-moi bien : à part Churchill, je n'ai aucune sympathie particulière pour ces grands hommes. Mais c'étaient des grands hommes. Barroso ne sera jamais un grand homme. Il n'est certes pas plus bête qu'un autre. Mais c'est ce que je lui reproche : n'être pas plus intelligent qu'un autre, être finalement interchangeable avec n'importe quel autre leader de la droite européenne, aussi peu séducteur. En Europe, en France ou dans l'Aisne, la question est la même : à quoi bon faire de la politique si ce n'est pas pour faire de grandes choses ?
Quand on est de droite, je peux comprendre, on est souvent un simple conservateur ou un gestionnaire tout juste avisé. Mais quand on est socialiste, on a moins d'excuses, on est porteur d'ambitions très élevées : changer la société, introduire plus de justice, émanciper l'homme. Ce sont des objectifs qui devraient naturellement nous élever, nous grandir. Pourquoi alors restons-nous trop souvent si petit ? J'ai beau avoir perdu ma virginité depuis un certain temps, je garde une nostalgie de pureté et de grandeur.
Bonne et grande journée.
8 Comments:
vous ne manquez pas d'air, la droite serait juste bonne à être conservatrice. Le RSA, la contribution énergie-climat, la réforme des retraites, l'armée de métier et bien d'autres.
Quel est la bilan du PS ? Le RMI (il n'a jamais rempli son rôle d'insertion), l'intérim (merci Mitterrand), la CMU (qui s'en satisferait ?), la CSG (encore merci).
A ce oui, je vous l'accorde, le PS a changé la société sous Jospin : ca n'a jamais autant privatisé qu'avec lui : France Télécom, libéralisation du marché postal.
La gauche au pouvoir c'est : aucune réforme des retraites (de quoi faire sauter 10 gouvernements), pas de redécoupage électoral (trop risqué de déplaire à ses petits camarades) alors que le conseil constitutionnel l'exige depuis 10 ans et que vous critiquez ce qui est fait. Quelle action de Jospin, en pleine croissance euphorique, pour réduire les déficits publics ?
En réalité, sans vous en rendre compte, c'est tout le PS qui a basculé dans le conservatisme. Il n'y a qu'à voir comment régissent les barons locaux à la seule proposition de non-cumul des mandats (cf. l'union du jour, inteview sidérante de Daudigny !). Votre fixation, c'est de chôyer la clientèle électorale du PS. La realpolitik vous rattrapera lorsque vous reviendrez aux affaires (nationales).
By Anonyme, at 10:57 AM
ANONYME 3
Quand pensez vous remplacer BARROSO , c'est en fait la seule solution que je vois ce matin pour sauver l'EUROPE tant votre analyse qui vous place au côté de Miterrand , de Gaulle et Churchill, est d’une pertinence encore jamais égalée au pied de notre superbe basilique, c’est sans doute Saint – Quentin qui vous inspire !!!!! dans cette nouvelle phase mystique et visionnaire !!!
By Anonyme, at 11:28 AM
Au premier anonyme :
Vous êtes manifestement de droite, vous attaquez donc la gauche. Vous avez raison, je suis comme vous, mais en sens inverse. Restons bons amis tout de même.
By Emmanuel Mousset, at 12:23 PM
A l'anonyme 3 :
On est inspiré par ce qu'on peut. Quant au remplacement de Barroso, il faut pour ça que les peuples d'Europe votent à gauche. Ca viendra.
By Emmanuel Mousset, at 12:25 PM
je cite "Mais c'est ce que je lui reproche : n'être pas plus intelligent qu'un autre, être finalement interchangeable avec n'importe quel autre leader de la droite européenne, aussi peu SEDUCTEUR". faudrait savoir..vous dites dans ce billet qu'en politique ce ne sont pas les séducteurs qui réussissent..et vous reprochez à Barroso de ne pas l'être; faut se relire de temps en temps ( sinon que vont penser vos éleves?)
By Anonyme, at 4:48 PM
C'est parce que Barroso n'est pas séducteur qu'il réussit, c'est ma thèse. Et je regrette ce genre de réussite, qui n'est pas celle d'un grand homme. Celui-ci peut réussir (voir de Gaulle ou Mitterrand), mais c'est très exceptionnel. Où est la contradiction ?
By Emmanuel Mousset, at 5:59 PM
un homme politique qui réussit : produit d'une situation, terne, habile, il s'entend avec à peu près tout le monde. Tu décris la presque totalité des politiciens de tous les partis.
dans l'Aisne, penses-tu aux mêmes que moi ?
By Anonyme, at 6:30 PM
Je ne juge pas les personnes, je décris un système. Et puis, on peut être brillant, charismatique et très dangereux, ne l'oublions pas. En favorisant les petits hommes gris, la démocratie fait peut-être oeuvre de vertu. Sauf que ça ne me fait pas rêver.
By Emmanuel Mousset, at 10:32 PM
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