L'Aisne avec DSK

13 septembre 2009

La question de l'unité.

A la fête de l'Humanité, il a beaucoup été question d'unité de la gauche. Normal, c'est un thème récurrent dans notre histoire. La droite est moins confrontée à ce problème, pour des raisons sociologiques. Les catégories qu'elle défend rivalisent économiquement sur le marché mais savent se rassembler politiquement derrière les formations qui représentent leurs intérêts, en l'occurrence l'UMP. A gauche, c'est le contraire : un ouvrier, un employé, un petit fonctionnaire, un cadre moyen, un artisan ou un commercant ne sont pas en compétition mais ont du mal à former un front politique commun. C'est pourquoi la question de l'unité est cruciale à gauche et qu'on y revient sans cesse. Dans les quartiers bourgeois de ma ville de Saint-Quentin, on vote massivement à droite ; dans les quartiers populaires, on ne vote pas massivement à gauche, il y a dispersion. Là est le problème général.

Buffet propose de le résoudre par "un immense débat d'idées" qui irait du PS au NPA. Non, ça ne va pas, ce n'est pas sérieux. Paradoxalement, ça me fait penser à la proposition de Bayrou dimanche dernier : un "dialogue" tous azimuts avec qui veut bien dialoguer. La politique n'est pas une conversation de salon ou un débat de type café philo. Dialoguer oui, mais en se demandant : pour quoi faire ? A quelles conditions ? Avant d'engager un débat politique, qui n'est pas un échange aimable pour le plaisir de parler, il faut en tracer le périmètre et en définir les finalités.

Ecoutez ce qu'a dit Besancenot à la fête de l'Huma (sur son stand, car il n'était pas officiellement invité aux tables rondes, ce qui est significatif en soi) : il veut débattre seulement avec la gauche radicale. Ecoutez ce qu'a dit Mélenchon : pas question d'élargir le Front de Gauche au PS, pas question de faire réélire les "notables socialistes" (sic). Ecoutez la position de LO : pas d'alliances avec le PS aux régionales, ni au premier ni au second tour. Et je ne parle même pas du POI. C'est clair non ? Ces camarades ne veulent pas de nous (sauf à Saint-Quentin, pour les places), pourquoi voudrions-nous d'eux (sauf à Saint-Quentin, où c'est n'importe quoi) ?

Aux socialistes qui réfléchissent à cette question de l'unité, je leur conseille de s'inspirer de nos deux maîtres à penser, Jaurès et Blum. En 1905, Jaurès nous enseigne qu'en matière d'unité, le plus important, le début de tout, c'est d'unir les socialistes entre eux. C'est pourquoi il va créer la SFIO. En 1920, au congrès de Tours, Blum nous apprend que l'unité n'a de sens que dans la cohérence politique et la fidélité à nos convictions. C'est pourquoi il refuse de suivre la majorité du Parti qui va fonder le PCF et se rallier au communisme soviétique, dont Blum pressentait, dès le début, les potentialités totalitaires.

Unité oui, mais d'abord entre socialistes et dans la cohérence politique. C'est pourquoi, à Saint-Quentin, cas d'école, j'ai refusé et je refuse toujours l'alliance avec l'extrême gauche : parce qu'elle s'est conclue sur le dos des socialistes, alors que ceux-ci étaient divisés sur le sujet ; parce qu'elle s'est faite en dépit du bon sens, de nos intérêts électoraux et surtout de notre ligne politique ( que l'extrême gauche ne cesse de dénoncer).

Vous me direz : oui mais c'est local, donc pourquoi pas ? Je vous répondrais que non, que les deux critères de Jaurès et Bum valent autant pour une ville que pour un pays. Car nous en voyons les conséquences aujourd'hui : une opposition municipale qui ne peut se réunir qu'autour du plus petit dénominateur commun, la protestation, mais qui ne pourra jamais se rassembler autour d'un véritable projet. Et qu'on ne me dise pas que celui-ci existe : je n'ai jamais vu, nulle part (ou alors il faut me le dire !) des socialistes et des lambertistes diriger ensemble une collectivité territoriale en application d'un programme qu'ils auraient élaboré ensemble.

Bien sûr on peut mettre en avant quelques revendications communes, par exemple la gratuité du parking de l'hôpital. Mais combien ? Et qui peut croire que cela constitue un véritable projet, crédible et porteur d'avenir ? Il n'a que ceux qui se bernent eux-mêmes et qui sont tout contents, gros malins, d'avoir fait beaucoup plus que notre députée en 2001, comme si c'était leur seule fierté et le produit de leur génie.

Inlassablement je répèterai que tout cela ne conduit strictement à rien, sauf à conforter le pouvoir de la droite. Je ne lâcherai rien, quoi qu'il m'en coûte. De toute façon je m'en moque, je ne fais pas de politique pour faire carrière. Je me laisse simplement porter par une vérité que beaucoup pressentent, que quelques-uns connaissent et que tous, un jour, accepteront. Ce ne sera pas la première fois en politique qu'il aura fallu du temps pour qu'une vérité s'impose.


Bon après-midi.

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