L'Aisne avec DSK

14 septembre 2009

Politiquement correct.

Bonsoir à toutes et à tous.

Nicolas Sarkozy est allé aujourd'hui faire un discours à la Sorbonne. C'est en France un symbole fort, notre université la plus connue au monde ... et celle dans laquelle j'ai fait mes études. Notre président, avez-vous remarqué qu'en maigrissant il s'est épaissi ? Je trouve qu'il a gagné en étoffe d'homme d'Etat. Son malaise vagal de l'été ne doit pas y être pour rien. Il est moins agité qu'au début du quinquennat. Les traits épurés de son visage ont gommé un peu ces grimaces qui en faisaient un excité. Ses traits sont devenus moins ironiques, provocateurs, plus sérieux, austères. Je suis toujours un opposant déterminé à sa politique, qui elle n'a pas du tout changé. Mais certaines prises de position, je pense à la taxe carbone, manifeste de sa part une certaine hauteur de vue, une forme de courage.

Il y a là un tournant, qui avait été annoncé il y a quelques semaines, quand Sarkozy avait accordé une longue interview au Nouvel Observateur, l'organe de la gauche social-démocrate (que je lis pourtant assez rarement). Le président y corrigeait nettement son image. Mais encore une fois le fond ne varie pas. Il me semble que c'est la crise financière mondiale qui a fait bougé les lignes. En pratiquant l'interventionnisme d'Etat, même si sa politique initiale demeure libérale, Sarkozy a modifié son analyse, sa pratique et son discours. Son bon résultat aux élections européennes traduit cette évolution, dans un contexte qui aurait dû normalement être profitable à la gauche.

Mais revenons au discours de ce jour à la Sorbonne. C'était une réponse positive au rapport du Nobel Stiglitz sur l'élargissement des indicateurs du PIB à des éléments non marchands. Stiglitz est l'économiste à la mode depuis quelques temps : c'est le pourfendeur du capitalisme issu du capitalisme, une position singulière qui séduit les médias et les intellectuels. Pas une réflexion sur l'économie sans qu'on y glisse désormais une référence à Stiglitz. Sarkozy ne pouvait donc pas y échapper, surtout depuis qu'il s'efforce de peaufiner sa nouvelle image.

La réflexion de Stiglitz, comme toute réflexion, est intéressante mais elle rencontre aussi des limites, dont je veux dire un mot puisque personne n'en parle. Son idée principale, c'est de "mesurer le bien-être" (j'ai même entendu à la radio un journaliste parler de "mesurer le bonheur"), au lieu d'en rester à des critères purement matériels, marchands. L'intention est bonne, elle a un petit côté contestataire, écolo, mais elle ne va pas très loin, et surtout elle me parait contradictoire et contestable.

Sarkozy, s'en inspirant, annonce qu'il faut "abandonner la religion du chiffre". Je suis bien d'accord avec lui. Les chiffres sont devenus dans notre société des signes magiques qui finissent par ne plus rien vouloir dire à force de vouloir leur faire trop dire. Mais comment alors exprimer le "bien-être" avec des statistiques ? Car le "bien-être", mot actuel pour désigner le bonheur, échappe absolument à tout chiffrage. Comment voulez-vous mesurer la méditation, la sérénité, le plaisir, la beauté qui sont de puissants "indicateurs" de bien-être ? Quand Stiglitz propose d' "intégrer la dimension subjective dans les statistiques", j'avoue que je suis très sceptique. Stiglitz, personne ne le conteste parce que c'est un contestataire politiquement correct. Mais je ne crois pas que c'est avec lui qu'on va changer le système.


Bonne soirée.

16 Comments:

  • On peut très bien mesurer le bien-être, il suffit de demander aux gens sur une échelle partant d'un niveau 1 de vie sans intérêt, à une vie fantastique qui serait noté 100, pour disposer d'une estimation sur laquelle on peut faire des statistiques en faisant des études selon des groupes de personnes, et s'apercevoir que les prolétaires disposent de moins de bien-être que les PDG statistiquement parlant.

    On fait la même chose dans les hôpitaux pour mesurer la douleur, et ajuster les médicaments en fonction de la réponse.

    http://www.oncoprof.net/Generale2000/g15_Palliatifs/g15_sp06.html


    http://www.kine-services.com/kine-services/bilans/kine_fbilan_eva.htm

    La part subjective est évidente, puisqu'il faut prendre la parole du sujet comme valide, mais on le fait déjà en psychanalyse, en médecine, et en politique.

    Si les gens ont l'impression que l'on ne va pas améliore leur bien-être (et qu'on s'en fout ), ils ne vont pas voter pour toi. Ton dire est alors en contradiction avec nos idéaux de toujours, « Le bien-être pour tous, et l'augmentation de l'autonomie de chacun ». Si on ne désire pas améliorer la vie collective et qu'on ne favorise pas l'épanouissement personnel, on n'est pas un socialiste.

    Le bien-être comprend en plus de facteurs personnels procurés par, la méditation, la sérénité, le plaisir, la beauté, la culture, l'amitié, la famille, les sentiments affectifs, le plaisir de vivre; l'argent qui permet d'améliorer la part de son bien-être matériel.

    Il convient donc d'enrichir le pays, et de redistribuer une part de la richesse. Cela débouche sur le salaire citoyen.

    La bonne question à poser est alors celle-ci:

    "Voulez-vous que le PS propose un salaire citoyen pour tous, et pensez-vous que cela améliorera votre bien-être personnel et le bien-être collectif."

    Fais une petite enquête autour de toi, et si la réponse statistique est favorable, tu pourras défendre cette proposition dans la convention qu'anime Pierre Moscovici pour définir un nouveau projet de société du PS.

    By Blogger jpbb, at 9:21 PM  

  • Jpbb,

    Tout dépend ce qu'on appelle "bien-être". S'il s'agit de mesurer un état d'esprit, je demeure sceptique. Même la mesure de la douleur dans les hôpitaux est sujette à caution. Il y a une forme d'intimité qui échappe à toute comptabilité. Le bonheur en fait partie. Vouloir le jauger a quelque chose d'inquiétant, de totalitaire.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:35 PM  

  • l'économie en ce moment est l'objet d'une lute sur sa nature est-elle une science, comme la mathématique, la physique, l'astronomie, la chimie, la biologie, même la philologie. L'économie, non, bien sûr, pas plus que la sociologie, l'ethnologie ou l'anthropologie. Les premières sont des sciences dures, leurs résultats sont surs. Les autredisciplines ont des résultats partiels, sans cesse remis en cause et toujours fluctuants.
    Mais l'économie, plutôt les économiste engagent un combat difficile pour dire sue leur science est une science dure. Ils fabriquent quelques règles en disant que ce sont des lois;
    Par exemple, la loi d'airain constate que la rémunération du travail du travail servile ou salarié ne peut jamais recevoir un salaire inférieur au seuil en decà duquel les travailleurs ne peuvent plus reconstituer la force de travail par leur nourriture, celle de leurs enfants qui un jour iront travailler, et celle des épouses qui nourrissent et entretiennent les enfants trop jeunes pour travailler.
    Cet exemple est célèbre car il limitait le seuil de la loi d'airain à une rémunération incompressible. Comment faire pour tourner et diminuer ce foutu seuil et ainsi augmenter les profits (on a retrouvé ce genre de problématique chez les nazis : lisez les bienveillantes)En angleterre on a supprimé les corn laws, cette défaite politique des landlors a diminué le prix des grains à la base de l'alimentation ouvrière; le libre échangisme a ensuite permis d'importer de grains sans taxe; Plus tard avec l'élévation du niveau de vie, la loi d'airain perdu toute application pratique. Cette loi n'était pas éternelle et n'était donc pas une vraie loi.Plus tard, le niveau de vie augmentant encore, on a cru dégager les trois lois d'Engel (rien à voir avec le pote de Marx;ce sont des lois empiriques qui énoncent comment se modifie la structure de la consommation lorsque le revenu d'un
    ménage augmente :
    1° loi :la part des dépenses alimentaires est d'autant plus faible que le revenu est élevé;
    2° loi :la part de dépenses de vêtements, de logement, de chauffage est sensiblement identique quelque soit le revenu
    3° loi la part des dépenses d'éducation, de santé et de voyages augmente plus vite que le revenu
    Depuis quelques années, ces énoncé sont chahutés; au lieu de relier ces dépenses, il vaut mieux les coller au pouvoir d'achat, l'énoncé serait plus exact.
    toujours est-il que cette autre loi n'est pas éternelle et n'aura qu'une courte existence dans le temps; dans l'espace, elle est inapplicable là où viennent de se développer les révoltes de la faim.
    LA SCIENCE (sic) économique,c'est juste l'art des plus forts d'entuber les plus faibles, et la capacité de riposte des plus faibles. Cela se vérifie tous les jours sur nos trottoirs.

    By Anonymous Anonyme, at 12:10 AM  

  • Comme le libéralisme se casse les dents devant les réalités: les chiffres sont têtus,on va casser le thermomètre , changer d'échelle et essayer de faire croire aux gens qu'ils sont heureux sans le savoir . Méthode Coué pas morte...

    By Anonymous D.H.Lormont, at 8:50 AM  

  • A l'anonyme de 12:10 :

    Pire qu'une science, l'économie est devenue une religion à laquelle on demande tout, y compris notre bonheur. Si elle pouvait rester modestement une science, ce serait déjà bien. Mais je suis d'accord avec vous : c'est plus un savoir qu'une science.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:17 AM  

  • A Lormont :

    Ce monsieur Coué est décidemment quelqu'un de très sollicité !

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:19 AM  

  • La notion de bien-être est par définition floue, et chacun peut ainsi l'interpréter un peu à sa façon, mais le sujet est sensible à ce qu'il s'améliore sans cesse, et ç'est là que l'on peut lui dire: nous y sommes sensibles. C'est la différence fondamentale entre la droite et la gauche. Pour la gauche, c'est le bien-être pour tous. C'est notre côté collectif. Pour la droite, c'est le bien-être pour quelques-uns, et que les autres se démerdent. En ce sens, la droite est inégalitaire.

    Ce n'est donc pas un état d'esprit que l'on mesure, mais un ressenti, forcément subjectif, ce n'est donc pas une science, mais un art. Qui a dit que le politique ne devait pas tenir compte de l'Art ?

    Il faut sortir du matérialisme pur. Ce n'est pas en consommant plus que l'on se sent bien, mais en consommant mieux.

    C'est donc un virage qualitatif qui est pris, et Matine Aubry l'a bien compris. Relis ses derniers discours pour retrouver la phrase exacte. ;-)

    On ne jauge donc pas le bonheur, c'est impossible, on jauge sur ce qu'en disent les gens, et c'est cette sommation que l'on tente d'améliorer. On ne force pas les gens à être heureux, c'est impossible, on leur offre les possibilités pour que collectivement on augmente cette perception du ressenti.

    By Blogger jpbb, at 9:40 AM  

  • Si je reste politiquement matérialiste (et philosophiquement marxiste), c'est que je ne veux pas que la politique se mêle de tout. Qu'elle se préoccupe de mon bien-être matériel, c'est très bien (avoir du boulot, un peu de sous et un environnement décent). Pour le reste, bas les pattes ! Je ne veux pas que la politique s'intéresse à la morale, à l'art, à la spiritualité, etc. En ce sens, je crois que le matérialisme est l'antidote au totalitarisme.

    Précision : le matérialisme n'est pas la réduction de toute chose à des préoccupations matérielles mais la limitation de la politique à la seule sphère matérielle (dont Marx essaie de comprendre l'évolution historique).

    Mais j'ai bien conscience que tout ça est un grand débat ...

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:18 AM  

  • désolée je fais une fixette sur jpbb mais le début de son raisonnement acceptable MAIS "l'argent qui permet d'améliorer la part de son bien-être matériel".NON. val

    By Anonymous Anonyme, at 2:16 PM  

  • Pas de quoi en faire une fixette : il serait contestable de dire que l'argent permet d'améliorer notre bien-être, mais il a précisé "matériel", donc ce n'est pas choquant. Ce n'est qu'un constat.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 5:34 PM  

  • JPBB ou "l'autonomie de chacun et le bien être pour tous".
    Comment? On ne le saura jamais!
    C'est comme le monorail bi-tube ou Schumann-kanfen:de la fumée....

    By Anonymous Anonyme, at 1:55 AM  

  • Pas de fumée sans feu ?

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 8:19 AM  

  • Le matérialisme conduit au marxisme, et le marxisme conduit au néant.

    Le problème du matérialisme, c'est qu'il est incapable de définir le cadre réel dans lequel la matière existe. Pire, il n'ose même pas l'envisager. Pour lui, tout est matière, point barre.

    Il ne peut alors pas intégrer à la marge, la conscience humaine, qui est de nature spécifique et non matérialiste, c'est une sur couche qui apparaît avec un certain niveau de complexité, mais la complexité n'est pas d'essence matérialiste. Le matérialisme ne peut non plus conclure à la nature et à l'existence du hasard, il se borne à faire un constat, la matérialité des choses existe.

    Un enfant de cinq ans rentre chez lui, il y a une crêpe dans une assiette sur la table, il la consomme et est content. Voilà l'essence du matérialisme.

    Il n'envisage pas qu'il ait fallu que sa mère la cuise, apprenne la recette, achète les ingrédients, que ces derniers aient été produits par des filières différentes.

    L'oeuf est sorti du cul de la poule. Le blé a été produit par un paysan, le lait tiré du pis de la vache, et qu'il a fallu que les étoiles fabriquent tous les éléments atomiques allant du carbone au fer, en passant par l'hydrogène et l'oxygène, etc. pour que la Terre puisse exister. On en vient alors au big-bang, et se pose alors la question existentielle finale, quel a été le cadre nécessaire et minimaliste pour que le big-bang émerge ?

    La seconde question alors à poser pour contraindre tout matérialiste à disjoncter est alors de savoir, où le néant est-il géographiquement présentement ?

    En remontant la chaîne de causalité, on est alors en mesure de poser les éléments du puzzle initiaux pour faire la recette de la crêpe cosmique et du Cuisinier qui l'a mitonné et de la taille de la cuisine nécessaire.

    http://jeanpierre.becker.free.fr/espace/index.html

    Ensuite en redéroulant le film dans le bon ordre, on trouve le lien entre le néant et le matérialisme, tout en sachant qu'il y a une forte probabilité pour que la vision proposée ait une excellente probabilité de dérouler une vérité scientifique, tout en gardant suffisamment d'entre-deux pour ne pas constituer une théorie qui se referme sur elle-même, mais pouvant être développée et enrichie au fil du temps qui passe...

    By Blogger jpbb, at 11:47 AM  

  • JPBB
    La derniére fois que nous avons eu l'occasion de parler du marxisme et de la structure gélifiée de l'espace(sic),nous avons fait 140 commentaires et tu as dû abandonner faute d'arguments et ne comprenant même plus ce que tu écrivais toi-même.
    T'es en forme? On recommence?
    Je te préviens je n'attaque qu'à coup sûr et je n'ai jamais laché une affaire.

    By Anonymous Anonyme, at 2:07 PM  

  • Tu as le droit d'écrire 139 commentaires. Les prétentieux, ce n'est pas ma tasse de thé.

    By Blogger jpbb, at 3:28 PM  

  • Ah non 50/50 sinon c'est pas drole!

    By Anonymous Anonyme, at 7:32 AM  

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