L'amour vache.

Bonjour à toutes et à tous.


Nicolas Sarkozy s'est finalement rendu au Salon de l'Agriculture, ce matin. C'était la seule option possible pour lui, sauf à le visiter nuitamment : un samedi, à la fin, en venant avant l'heure d'ouverture. On a parlé de "faute politique", on se trompe : c'est plutôt une prudence politique. La faute aurait été de se voir conspué par des agriculteurs en colère. Mais c'est la confirmation de la crise de confiance qui affecte le président, et qui frappe même un bastion traditionnel de la droite, le monde paysan.

De son côté, le Premier ministre n'a pas eu tort de déplorer les "comportements folkloriques" des hommes politiques qui passent pas le fameux Salon et leur inspection quelque peu grotesque des bêtes de ferme. En parlant de "mépris" envers les agriculteurs, il a visé juste. Croit-on que ce genre de parade manifeste un quelconque intérêt pour le sort de la paysannerie ? C'est quand on se croit obligé de prouver ostensiblement une conviction qu'elle en devient suspecte.

De ce point de vue, Villepin a décroché le pompon : une journée entière au milieu des vaches ! Normal, il n'a plus grand-chose à faire, sinon à préparer le terrain pour s'affronter à Sarkozy dans la prochaine présidentielle (laissons-le rêver). Mais Fillon aurait été plus convaincant s'il s'était appliqué à lui-même ses excellentes remarques. Car rester trois heures à longer les travées du Salon de l'Agriculture, c'est y sacrifier beaucoup de temps, surtout quand on a à Matignon un bureau avec plein de dossiers qui vous attendent !

Le tapage médiatique autour du Salon de l'Agriculture me fait penser à celui qui accompagne chaque année le début des épreuves du baccalauréat. Il y a du ritualisme dans ces deux événements qui en réalité n'en sont pas. La logique est identique dans les deux cas : moins il y a de paysans en France, plus on parle de leur Salon ; moins le bac a de valeur (puisque la majorité y accède aujourd'hui, contre une petite minorité autrefois), plus on rêve de l'obtenir.

Savez-vous que François Mitterrand n'a jamais mis les pieds au Salon de l'Agriculture ? Il était pourtant habile homme, et soucieux de ses devoirs de président de la République. Mais il n'a jamais sacrifié aux "comportements folkloriques" que dénonce Fillon. C'est surtout Chirac qui a lancé la mode. Il savait tout ce qu'il devait électoralement au monde agricole. Dans mon Berry natal, la ruralité n'est guère socialiste, mais essentiellement de droite, d'origine gaulliste, avec quelques solides poches de communisme paysan. Que Jacques Chirac, qui est désormais un retraité de la République, puisse encore visiter le Salon et y recevoir un accueil de chef d'Etat en dit long ! Sachons retrouver nos marques, revenons à nos fondamentaux : il y a pour la gauche des lieux, des présences, des visites autrement plus symboliques.


Bonne journée.