Le 4 août à l'envers.
Bonjour à toutes et à tous.
C'était il y a une semaine, notre défaite. La meilleure analyse, succinte et insolente, je la trouve comme souvent sous la plume de Philippe Val dans le dernier Charlie: "S'il est vrai que la beauté de la démocratie tient en ceci qu'idéalement on n'y vote pas pour soi mais pour les autres, alors chapeau. Les pauvres ont voté pour les riches. Une vingtaine de millions d'électeurs ont voté pour que trois cent mille personnes fassent fortune." Bien vu, non?
Savez-vous quel est le pire dans le programme économique et social de Sarkozy? Les heures supplémentaires revalorisées? le bouclier fiscal? La réduction des fonctionnaires? La diminution des impôts? La franchise médicale? Le contrat de travail unique? La TVA sociale? La limitation du droit de grève? Ces mesures sont porteuses de régression sociale, mais j'ai gardé le pire pour la fin: la suppression des droits de succession, c'est à dire la négation de cette "valeur travail" que défend par ailleurs Sarkozy.
Hériter, c'est recevoir ce qu'on ne mérite pas, du moins au regard de cette fameuse "valeur travail", qui veut qu'on ne gagne qu'à la mesure de notre travail, selon l'adage sarkozien "travailler plus pour gagner plus". Vous me direz peut-être que le fruit de notre travail doit rester à notre disposition et que nous devons rester libres de le léguer à qui nous voulons. C'est une façon de voir, mais qui est contraire à l'application rigoureuse de la "valeur travail", qui n'accepte pas qu'on s'enrichisse à ne rien faire. A ceux que "l'assistanat" révulse, je demande d'être cohérent et de ne pas prôner un "assistanat doré", celui des héritiers.
En tant que socialiste, fondant cette fois mon jugement non plus sur la "valeur travail" mais sur la valeur égalité, la suppression des droits de succession me révulse. Elle consacre la pire, la plus injuste, la plus difficile à corriger des inégalités, l'inégalité de la naissance. Elle va renforcer et générer les inégalités de la fortune: les pauvres ont bien peu à transmettre et rien à y gagner, les riches ont beaucoup à léguer et donc tout à y gagner. J'en reviens à Philippe Val puisque son éditorial va dans ce sens:
"Si la fiscalité américaine est, pour certains points, plus basse qu'en France, les droits de succession, en revanche et malgré le désir de Bush de les abolir, y sont l'impôt le plus élevé. Tout simplement parce que c'est une démocratie consciente que son dynamisme dépend de la redistribution des cartes lors des décès. Une société qui abolit les droits de succession, notamment pour les grandes fortunes, produit mécaniquement une aristocratie et fige la société. C'est l'avènement d'un monde de vieux et de rentiers, où l'on confie l'avenir à ceux qui n'ont plus d'avenir".
La nuit du 4 août 1789, dans l'enthousiasme d'une révolution, les privilèges héréditaires ont été abolis, en partie par ceux qui en bénéficiaient. La journée du 6 mai 2007, un privilège héréditaire a été rétabli dans sa quasi intégralité, en partie par ceux qui n'en bénéficient absolument pas.
Bon dimanche.
C'était il y a une semaine, notre défaite. La meilleure analyse, succinte et insolente, je la trouve comme souvent sous la plume de Philippe Val dans le dernier Charlie: "S'il est vrai que la beauté de la démocratie tient en ceci qu'idéalement on n'y vote pas pour soi mais pour les autres, alors chapeau. Les pauvres ont voté pour les riches. Une vingtaine de millions d'électeurs ont voté pour que trois cent mille personnes fassent fortune." Bien vu, non?
Savez-vous quel est le pire dans le programme économique et social de Sarkozy? Les heures supplémentaires revalorisées? le bouclier fiscal? La réduction des fonctionnaires? La diminution des impôts? La franchise médicale? Le contrat de travail unique? La TVA sociale? La limitation du droit de grève? Ces mesures sont porteuses de régression sociale, mais j'ai gardé le pire pour la fin: la suppression des droits de succession, c'est à dire la négation de cette "valeur travail" que défend par ailleurs Sarkozy.
Hériter, c'est recevoir ce qu'on ne mérite pas, du moins au regard de cette fameuse "valeur travail", qui veut qu'on ne gagne qu'à la mesure de notre travail, selon l'adage sarkozien "travailler plus pour gagner plus". Vous me direz peut-être que le fruit de notre travail doit rester à notre disposition et que nous devons rester libres de le léguer à qui nous voulons. C'est une façon de voir, mais qui est contraire à l'application rigoureuse de la "valeur travail", qui n'accepte pas qu'on s'enrichisse à ne rien faire. A ceux que "l'assistanat" révulse, je demande d'être cohérent et de ne pas prôner un "assistanat doré", celui des héritiers.
En tant que socialiste, fondant cette fois mon jugement non plus sur la "valeur travail" mais sur la valeur égalité, la suppression des droits de succession me révulse. Elle consacre la pire, la plus injuste, la plus difficile à corriger des inégalités, l'inégalité de la naissance. Elle va renforcer et générer les inégalités de la fortune: les pauvres ont bien peu à transmettre et rien à y gagner, les riches ont beaucoup à léguer et donc tout à y gagner. J'en reviens à Philippe Val puisque son éditorial va dans ce sens:
"Si la fiscalité américaine est, pour certains points, plus basse qu'en France, les droits de succession, en revanche et malgré le désir de Bush de les abolir, y sont l'impôt le plus élevé. Tout simplement parce que c'est une démocratie consciente que son dynamisme dépend de la redistribution des cartes lors des décès. Une société qui abolit les droits de succession, notamment pour les grandes fortunes, produit mécaniquement une aristocratie et fige la société. C'est l'avènement d'un monde de vieux et de rentiers, où l'on confie l'avenir à ceux qui n'ont plus d'avenir".
La nuit du 4 août 1789, dans l'enthousiasme d'une révolution, les privilèges héréditaires ont été abolis, en partie par ceux qui en bénéficiaient. La journée du 6 mai 2007, un privilège héréditaire a été rétabli dans sa quasi intégralité, en partie par ceux qui n'en bénéficient absolument pas.
Bon dimanche.
4 Comments:
J’ai été regarder le programme de Nicolas Sarkozy d’un peu plus près, rien ne vaut l’original à télécharger à:
http://www.sarkozy.fr/lafrance/
“Je supprimerai les droits de donation et
de succession pour que les familles, à l’exception
des plus riches, puissent transmettre librement le fruit
du travail de toute leur vie à leurs enfants.”
C’est donc bien une volonté d’inciter les gens à travailler, sachant qu’ils ont déjà été taxé tout au long de leur vie, et de leur laisser libre disposition de leur maigre bien. Pour les grosses successions, elles continuent à être taxé.
Je ne pense pas que Charlie Hebdo soit impartial dans l’histoire. La vérité et le réel, le nouveau credo du PS, à appliquer d’urgence...
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Anonyme, at 1:27 PM
Tout cela est en effet à vérifier de près. Ce que je sais, c'est que la majorité des héritiers sont déjà exonérés. Les "plus riches", c'est qui exactement? Sarkozy avait pris l'exemple de Johnny Halliday pour montrer que l'impôt fait fuir certains contribuables. Le chanteur ne fait donc pas partie des "plus riches". Je suppose que ceux-ci sont une infime minorité, comme je le crains.
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Emmanuel Mousset, at 6:06 PM
Pour 95% des ménages, le patrimoine est constitué de revenus du travail patiemment économisés et investis dans la résidence principale et dans des placements annexes rarement spéculatifs et même souvent utiles à la collectivité comme les livrets A et les CODEVI. A partir du moment où un impôt équitable a été payé sur ces revenus, nous ne voyons pas pourquoi ceux qui préfèrent économiser pour leurs enfants plutôt que de consommer seraient sanctionnés par le paiement ultérieur de droits de donation ou de succession.
Nous supprimerons les droits de donations et de successions pour tous les patrimoines petits et moyens. Cette mesure sera d'application générale : entre époux bien sûr, vers les enfants, mais aussi vers les petits-enfants et toute autre membre de la famille dans le respect bien sûr du droit des successions. Elle sera valable également pour les personnes seules qui ont bien le droit de transmettre librement leurs biens à la personne de leur choix. Pour des raisons d'équité, les grosses fortunes et les gros patrimoines, par exemple à caractère financier ou industriel, continueront d'être assujettis.
https://candidats2007.u-m-p.org/horde/drupal/node/90/#5
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Anonyme, at 9:22 PM
J'entends bien l'argument mais la question reste posée: à quel niveau commence "la grosse fortune"? Tout est là, je crois.
De plus, faudrait-il se contenter d'imposer le revenu? Depuis l'été dernier, je suis propriétaire d'une maison. Mon salaire n'a pas augmenté, mes impôts n'ont pas baissé, et pourtant je paie, et de façon conséquente, une taxe supplémentaire, la foncière. Normal ou pas? Je pense que c'est normal puisque je viens d'acquérir un bien. Je gagne autant qu'avant mais d'une certaine façon mon achat m'a enrichi.
Bon, je sais, il ne faut pas confondre la taxe foncière et les droits de succession. Mais ne pourrait-on pas appliquer le même raisonnement?
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Emmanuel Mousset, at 9:26 AM
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