Famille, individu.
Mes deux désaccords de fond avec Luc Ferry, à propos de son livre "Familles je vous aime", sont les suivants:
1- La famille a beau se renforcer, changer, se recomposer, elle reste la famille, c'est-à-dire les liens du sang, le triomphe de la nature sur la culture, du sentiment sur la raison. Elle est tribale, primitive, pas du tout civilisatrice. La famille engendre des névroses, protège d'inquiétants secrets, est toujours plus ou moins un lieu fermé, impose la ressemblance et n'apprend pas la différence. La famille est du côté du clan, de la meute, du troupeau, de l'animal. Elle habitue à la soumission, à l'obéissance, elle instaure une aveugle inégalité entre enfants et parents.
Je ne doute pas que cet état de fait soit normal, salutaire et même bienfaisant, je ne rejette même pas les joies familiales car elles existent, je dis simplement, contre Luc Ferry, que la famille ne peut pas fonder un nouvel humanisme pas plus qu'elle n'en a fondé un ancien. L'humanisme de toujours a un seul objectif, l'émancipation de l'humanité. Ce n'est pas dans un climat d'aliénation, la famille, qu'on favorise la libération des hommes, des femmes et des enfants.
Je ne ferai pas l'injure à Ferry de la traiter de réactionnaire, ce qu'il n'est pas. C'est un collègue prof de philo au parcours éminent et respectable, un libéral de centre-droit, ses réflexions sont estimables, mais je rappelle que toute tentative d'utilisation de la famille à des fins politiques et sociales tourne mal. C'est par exemple le "travail-famille-patrie" du maréchal Pétain. Autant la liberté-égalité-fraternité sont fondatrices de valeurs, autant la triade vichyssoise génère de pseudo-valeurs qui se retournent en anti-valeurs. N'oublions pas que le drame de la pédophilie se trame dans les familles 9 fois sur 10, une vérité à nos yeux tellement insupportable que nous inventons des réseaux diaboliques qui ont pour objectif de nous détourner de la réalité, de conjurer l'abominable scandale, de sauver la famille quand elle se perd dans le crime. Je ne dis pas que ces réseaux n'existent pas, je dis qu'ils n'ont pas l'importance qu'on leur attribue. L'école, l'armée, l'église sont des institutions, la famille n'en a jamais été et n'en sera jamais une.
2- Luc Ferry essaie de concilier l'inconciliable, l'individualisme et l'esprit de famille. Certes, nos contemporains sont individualistes et très "famille", mais ce n'est pas pour autant qu'ils vivent en harmonie ces deux comportements. La contradiction chez les êtres humains, ça existe aussi! Je crois en fait que nous sommes confrontés à deux niveaux de réalité. La famille est une réalité ancienne, archaïque, spontanée, structurelle, anthropologique, alors que l'individu est une construction récente, moderne, un idéal, un objectif. L'humanisme est du côté de l'individualisme, pas de la famille. On peut les rapprocher, difficilement les comparer, Luc Ferry tente vainement de les harmoniser, je les oppose.
Bonne soirée (tout seul ou... en famille).
1- La famille a beau se renforcer, changer, se recomposer, elle reste la famille, c'est-à-dire les liens du sang, le triomphe de la nature sur la culture, du sentiment sur la raison. Elle est tribale, primitive, pas du tout civilisatrice. La famille engendre des névroses, protège d'inquiétants secrets, est toujours plus ou moins un lieu fermé, impose la ressemblance et n'apprend pas la différence. La famille est du côté du clan, de la meute, du troupeau, de l'animal. Elle habitue à la soumission, à l'obéissance, elle instaure une aveugle inégalité entre enfants et parents.
Je ne doute pas que cet état de fait soit normal, salutaire et même bienfaisant, je ne rejette même pas les joies familiales car elles existent, je dis simplement, contre Luc Ferry, que la famille ne peut pas fonder un nouvel humanisme pas plus qu'elle n'en a fondé un ancien. L'humanisme de toujours a un seul objectif, l'émancipation de l'humanité. Ce n'est pas dans un climat d'aliénation, la famille, qu'on favorise la libération des hommes, des femmes et des enfants.
Je ne ferai pas l'injure à Ferry de la traiter de réactionnaire, ce qu'il n'est pas. C'est un collègue prof de philo au parcours éminent et respectable, un libéral de centre-droit, ses réflexions sont estimables, mais je rappelle que toute tentative d'utilisation de la famille à des fins politiques et sociales tourne mal. C'est par exemple le "travail-famille-patrie" du maréchal Pétain. Autant la liberté-égalité-fraternité sont fondatrices de valeurs, autant la triade vichyssoise génère de pseudo-valeurs qui se retournent en anti-valeurs. N'oublions pas que le drame de la pédophilie se trame dans les familles 9 fois sur 10, une vérité à nos yeux tellement insupportable que nous inventons des réseaux diaboliques qui ont pour objectif de nous détourner de la réalité, de conjurer l'abominable scandale, de sauver la famille quand elle se perd dans le crime. Je ne dis pas que ces réseaux n'existent pas, je dis qu'ils n'ont pas l'importance qu'on leur attribue. L'école, l'armée, l'église sont des institutions, la famille n'en a jamais été et n'en sera jamais une.
2- Luc Ferry essaie de concilier l'inconciliable, l'individualisme et l'esprit de famille. Certes, nos contemporains sont individualistes et très "famille", mais ce n'est pas pour autant qu'ils vivent en harmonie ces deux comportements. La contradiction chez les êtres humains, ça existe aussi! Je crois en fait que nous sommes confrontés à deux niveaux de réalité. La famille est une réalité ancienne, archaïque, spontanée, structurelle, anthropologique, alors que l'individu est une construction récente, moderne, un idéal, un objectif. L'humanisme est du côté de l'individualisme, pas de la famille. On peut les rapprocher, difficilement les comparer, Luc Ferry tente vainement de les harmoniser, je les oppose.
Bonne soirée (tout seul ou... en famille).
4 Comments:
La famille est au contraire en train de se perdre. Elle est éclatée, se sépare comme on zappe à la télé, les enfants partent, les anciens vivent seuls en maison de retraite, les fragiles (jeunes, malades, handicapés, déficients..) ne sont pas pris en charge. En Afrique où j'ai vécu quatre années, il n'y a pas de personnes sur la touche, la famille les prend en charge et assure leur quotidien. Nul besoin d'APA, de RMI, de structure d'accueil pour handicapés ou jeunes mères célibataires, c'est le respect de l'individu, du chef de famille, des anciens...... ça c'est la famille, . En Europe c'est plutôt l'indiviualisme qui prévaut.
MD
By md, at 10:59 PM
Je n'ai pas l'optimisme de MD sur la famille d'autrefois, ou celle d'Afrique aujourd'hui, je ne pense pas que l'individu pouvait ou peut s'y épanouir correctement. Les solidarités étaient aussi dictées par l'intérêt, la nécessité: hors la famille, point de salut et point de survie. L'Europe peut-elle sciemment se donner pour modèle ou inspiration les relations sociales en Afrique? Je ne crois pas, je ne le souhaite pas.
By Emmanuel Mousset, at 11:35 PM
La famille s'inclue dans le social. Elle n'est pas figée, elle évolue avec son cadre. La famille n'est pas plus ancienne que moderne, elle est nécessaire à la transmission de la vie tout simplement. Il est cher le livre de Ferry ?
By jpbb, at 10:15 AM
On peut au contraire douter que la famille reste nécessaire à la transmission de la vie.Du moins à terme.Cf les débats sur la bioéthique par ex.Il faut toujours se méfier des réponses trop simplistes jpb surtout quand elles sont livrées sur un ton peremptoire. Evidemment une fois sur deux le boomerang revient vers l'auteur avec le ridicule que l'on imagine.Un peu de modestie car je ne sache pas que vos livres soient à la hauteur de ceux de Ferry.
By Anonyme, at 3:00 PM
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