Le système des courants.
Bonsoir à toutes et à tous.
L'un des axes de la rénovation du PS passera par la fin des courants. Officiellement, les courants n'existent plus au PS depuis une quinzaine d'années. Ils n'ont plus la force idéologique qu'ils avaient dans les années 70. Le CERES, la "deuxième gauche" avaient des lignes politiques très fortes, étaient de véritables laboratoires d'idées. Paradoxalement, je regrette cette époque, bien que je critique aujourd'hui le système des courants. C'est qu'il n'a plus grand chose à voir avec ce qu'il était autrefois. Dans la bagarre entre Chevènement et Rocard, il y avait une véritable bataille entre des projets. Je ne vois rien de comparable aujourd'hui. Qu'est-ce qu'un membre du NPS? Quelqu'un qui se sent plus à gauche que la moyenne des adhérents socialistes, sans plus. Qu'est-ce qu'un néofabiusien? Quelqu'un qui a critiqué pendant 20 ans Fabius pour le rallier en 2005, quand celui-ci s'est opposé au Traité constitutionnel européen, rien d'autre. Les courants étaient recevables tant qu'ils représentaient des courants d'idées, et non des machines, grandes ou petites, à distribuer des places.
Ce système des courants, à défaut d'imploser par lui-même, nous devrons le faire exploser. Il faudra pour cela réorganiser le parti, son mode de désignation de ses dirigeants et de ses candidats. Pour les dirigeants, il faudra limiter le cumul des mandats, séparer le rôle des élus et celui des militants, réduire l'influence des administratifs dans les prises de décision (quelqu'un qui, directement ou indirectement, est rémunéré par le parti n'a plus le libre arbitre de celui qui ne lui doit rien). Pour les candidats, leur désignation ne peut plus reposer sur le seul vote des adhérents organisés en courants et ne fonctionnant donc pas sur le mode normal du suffrage universel. Les sympathisants doivent être, d'une manière ou d'une autre, consultés. Ce sera sans doute le moyen le plus efficace de contourner le système des courants et de le vider de sa puissance néfaste. La hargne des néofabiusiens contre les "adhérents à 20 balles" (je reprends leur terme!) montre bien la peur panique qui les gagne lorsqu'il est question d'ouvrir le parti.
Tout le problème est là: comment abattre un système qui permet à certains de préserver leur pouvoir sans passer par le suffrage universel? Le moteur de ce système, c'est le rapport de forces, où les différences sont exagérément accentuées afin de transformer l'autre camarade, d'un courant différent, en adversaire interne. C'est ce que j'ai vécu en présentant mon analyse de la situation saint-quentinoise. Tout le monde pouvait s'accorder qu'il fallait mieux accepter sur la liste des camarades disposant des capacités politiques pour combattre la droite, que la lutte contre la municipalité devait d'abord passer par des propositions, qu'il valait mieux le rassemblement que la dispersion des candidatures, etc. Le rapport de forces interdit le dialogue raisonnable. Réunion de section ou de bureau, c'est l'inévitable pugilat. Je suis persuadé que les uns et les autres, dans un contexte apaisé, dans des échanges rationnels, n'auraient pas les mêmes comportements, ne tiendraient pas les mêmes propos. C'est le système qui pourrit la situation. Les jugements cessent d'être objectifs. Une proposition est jugée selon la personne qui la fait et le courant auquel elle appartient.
Mais que faire de ce système, tant que les procédures le nourrissent? Je vais faire une nouvelle remarque paradoxale: il faut tuer le rapport de forces par le rapport de forces, retourner le système contre lui-même. Ou bien attendre que les statuts changent, mais la "culture" de courant, même abolie structurellement, existera je le crains encore longtemps. A Saint-Quentin, nous avons eu raison de tenir bon face aux néofabiusiens qui voulaient nous entraîner dans le rapport de forces, qui feignent encore maintenant de ne pas comprendre que Stéphane ou moi n'ayons pas déposés notre candidature. La raison, ils la connaissent, ils ne peuvent pas la partager, puisqu'elle repose sur le refus de ce qui les fait vivre, les courants. En attendant, ils ont pour eux la force procédurière et le pouvoir qu'elle leur donne maintenant. Nous n'avons pas à regretter, mais nous devons riposter. Le dialogue ne sert plus à rien. Celui qui ne croit qu'aux rapports de forces est insensible aux vertus du dialogue, sauf à manipuler ce dialogue à son profit.
C'est pourquoi, à notre tour, faute de mieux, il faudra jouer la procédure et le rapport de forces, systématiquement. Si nous ne le faisons pas, nous serons progressivement détruit, car l'objectif recherché est bien celui-ci. Ce qui signifie qu'à chaque future élection, il faudra présenter nos propres candidats, en premier lieu lors des cantonales. Et tous les moyens devront être employés pour que le rapport de forces bascule en notre faveur. Sinon, nous resterons une majorité sans colonne vertébrale, qui s'effritera peu à peu au profit des minoritaires. N'oublions pas que le pouvoir en politique est la véritable force d'attraction. Sans élus, la majorité ne tiendra pas longtemps. Encore une fois, c'est le but poursuivi, contre lequel nous devons nous retourner, que nous devons déjouer à tout prix. C'est notre existence politique qui est en jeu.
Avoir les principes pour soi, c'est bien joli, prôner le dialogue, c'est très bien, mettre en cohérence ses idées (la candidature unanime et concertée) et ses pratiques (refuser d'être candidat), formidable. Mais quel est le résultat? Encore et toujours la division, pire que jamais, et un candidat moins rassembleur que jamais. En politique, ce qui compte, ce ne sont pas les intentions, ce sont les résultats. Je suis bien obligé d'admettre, mal dans ma tête, que le rapport de forces que je condamne quand il s'exerce entre socialistes, j'en serai (j'en suis!) la victime si je ne l'utilise pas à mon tour. En théorie, je veux le faire disparaitre, en pratique, je suis amené à en faire usage. Pas facile, contradictoire, mais comment faire autrement?
Bonne soirée.
L'un des axes de la rénovation du PS passera par la fin des courants. Officiellement, les courants n'existent plus au PS depuis une quinzaine d'années. Ils n'ont plus la force idéologique qu'ils avaient dans les années 70. Le CERES, la "deuxième gauche" avaient des lignes politiques très fortes, étaient de véritables laboratoires d'idées. Paradoxalement, je regrette cette époque, bien que je critique aujourd'hui le système des courants. C'est qu'il n'a plus grand chose à voir avec ce qu'il était autrefois. Dans la bagarre entre Chevènement et Rocard, il y avait une véritable bataille entre des projets. Je ne vois rien de comparable aujourd'hui. Qu'est-ce qu'un membre du NPS? Quelqu'un qui se sent plus à gauche que la moyenne des adhérents socialistes, sans plus. Qu'est-ce qu'un néofabiusien? Quelqu'un qui a critiqué pendant 20 ans Fabius pour le rallier en 2005, quand celui-ci s'est opposé au Traité constitutionnel européen, rien d'autre. Les courants étaient recevables tant qu'ils représentaient des courants d'idées, et non des machines, grandes ou petites, à distribuer des places.
Ce système des courants, à défaut d'imploser par lui-même, nous devrons le faire exploser. Il faudra pour cela réorganiser le parti, son mode de désignation de ses dirigeants et de ses candidats. Pour les dirigeants, il faudra limiter le cumul des mandats, séparer le rôle des élus et celui des militants, réduire l'influence des administratifs dans les prises de décision (quelqu'un qui, directement ou indirectement, est rémunéré par le parti n'a plus le libre arbitre de celui qui ne lui doit rien). Pour les candidats, leur désignation ne peut plus reposer sur le seul vote des adhérents organisés en courants et ne fonctionnant donc pas sur le mode normal du suffrage universel. Les sympathisants doivent être, d'une manière ou d'une autre, consultés. Ce sera sans doute le moyen le plus efficace de contourner le système des courants et de le vider de sa puissance néfaste. La hargne des néofabiusiens contre les "adhérents à 20 balles" (je reprends leur terme!) montre bien la peur panique qui les gagne lorsqu'il est question d'ouvrir le parti.
Tout le problème est là: comment abattre un système qui permet à certains de préserver leur pouvoir sans passer par le suffrage universel? Le moteur de ce système, c'est le rapport de forces, où les différences sont exagérément accentuées afin de transformer l'autre camarade, d'un courant différent, en adversaire interne. C'est ce que j'ai vécu en présentant mon analyse de la situation saint-quentinoise. Tout le monde pouvait s'accorder qu'il fallait mieux accepter sur la liste des camarades disposant des capacités politiques pour combattre la droite, que la lutte contre la municipalité devait d'abord passer par des propositions, qu'il valait mieux le rassemblement que la dispersion des candidatures, etc. Le rapport de forces interdit le dialogue raisonnable. Réunion de section ou de bureau, c'est l'inévitable pugilat. Je suis persuadé que les uns et les autres, dans un contexte apaisé, dans des échanges rationnels, n'auraient pas les mêmes comportements, ne tiendraient pas les mêmes propos. C'est le système qui pourrit la situation. Les jugements cessent d'être objectifs. Une proposition est jugée selon la personne qui la fait et le courant auquel elle appartient.
Mais que faire de ce système, tant que les procédures le nourrissent? Je vais faire une nouvelle remarque paradoxale: il faut tuer le rapport de forces par le rapport de forces, retourner le système contre lui-même. Ou bien attendre que les statuts changent, mais la "culture" de courant, même abolie structurellement, existera je le crains encore longtemps. A Saint-Quentin, nous avons eu raison de tenir bon face aux néofabiusiens qui voulaient nous entraîner dans le rapport de forces, qui feignent encore maintenant de ne pas comprendre que Stéphane ou moi n'ayons pas déposés notre candidature. La raison, ils la connaissent, ils ne peuvent pas la partager, puisqu'elle repose sur le refus de ce qui les fait vivre, les courants. En attendant, ils ont pour eux la force procédurière et le pouvoir qu'elle leur donne maintenant. Nous n'avons pas à regretter, mais nous devons riposter. Le dialogue ne sert plus à rien. Celui qui ne croit qu'aux rapports de forces est insensible aux vertus du dialogue, sauf à manipuler ce dialogue à son profit.
C'est pourquoi, à notre tour, faute de mieux, il faudra jouer la procédure et le rapport de forces, systématiquement. Si nous ne le faisons pas, nous serons progressivement détruit, car l'objectif recherché est bien celui-ci. Ce qui signifie qu'à chaque future élection, il faudra présenter nos propres candidats, en premier lieu lors des cantonales. Et tous les moyens devront être employés pour que le rapport de forces bascule en notre faveur. Sinon, nous resterons une majorité sans colonne vertébrale, qui s'effritera peu à peu au profit des minoritaires. N'oublions pas que le pouvoir en politique est la véritable force d'attraction. Sans élus, la majorité ne tiendra pas longtemps. Encore une fois, c'est le but poursuivi, contre lequel nous devons nous retourner, que nous devons déjouer à tout prix. C'est notre existence politique qui est en jeu.
Avoir les principes pour soi, c'est bien joli, prôner le dialogue, c'est très bien, mettre en cohérence ses idées (la candidature unanime et concertée) et ses pratiques (refuser d'être candidat), formidable. Mais quel est le résultat? Encore et toujours la division, pire que jamais, et un candidat moins rassembleur que jamais. En politique, ce qui compte, ce ne sont pas les intentions, ce sont les résultats. Je suis bien obligé d'admettre, mal dans ma tête, que le rapport de forces que je condamne quand il s'exerce entre socialistes, j'en serai (j'en suis!) la victime si je ne l'utilise pas à mon tour. En théorie, je veux le faire disparaitre, en pratique, je suis amené à en faire usage. Pas facile, contradictoire, mais comment faire autrement?
Bonne soirée.
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