L'Aisne avec DSK

03 février 2008

Vivre ensemble.

Bonsoir à toutes et à tous.

Je vous parlais en début d'après-midi de l'irritation que provoquaient en moi les expressions nouvelles ou à la mode. Il était alors question des "hôtesses de caisse", pour désigner tout simplement les caissières de supermarché. Prenez cette autre expression, très en vogue dans les milieux que je fréquente: le "vivre ensemble". Ca veut dire quoi au juste? On dit aussi parfois: "faire société". Derrière ces mots, je sens une inquiétude, la montée de l'individualisme, et une peur, l'érosion de la civilité. Je vais vous citer deux exemples que j'ai trouvés dans la presse locale de ce week-end, qui montrent qu'on parle d'autant plus et mieux du "vivre ensemble" qu'il est en crise. Sinon, on n'éprouverait pas le besoin d'en parler et d'inventer cette formule.

Dans L'Aisne Nouvelle, Bertrand Duchet a procédé à une petite enquête sur les conflits de voisinage. Bien s'entendre avec ses voisins, c'est le b-a ba du "vivre ensemble", non? Eh bien, c'est édifiant: 300 interventions des services communaux chaque année pour traiter ces conflits. Sans compter ceux qui ne montent pas jusqu'au bureau du maire, et qui se règlent ou se dérèglent sans qu'on le sache. Le phénomène s'aggrave, les tensions se renforcent, les altercations se multiplient. Ca pourrait être un beau sujet de réflexions et de propositions pour les candidats aux élections municipales. La population réclame du "concret", la presse critique l'absence de projet à droite et à gauche. Là, il y a de quoi faire. Et le maire est perçu par le citoyen comme celui qui a mission et moyens pour régler ce genre de problème, qui semble futile mais qui pourrit la vie. Mais quelle solution?

Jean-Pierre Laigle, directeur général adjoint des services à la mairie de Saint-Quentin, donne son analyse:

"Dans 90% des cas, il s'agit de problèmes relationnels. C'est souvent lié au fait que les gens ne se parlent plus et n'ont aucune envie de se connaître, même entre voisins immédiats. Résultat, dès qu'il y a un problème, c'est la faute du maire! Mais en réalité, on a surtout l'impression que les gens ont de plus en plus de mal à vivre ensemble."

J'ajouterai qu'autrefois, la solidarité était naturelle parce que les voisins avaient souvent besoin les uns des autres, et l'on n'avait pas le choix: les gens étaient condamnés à s'entendre. Ce n'est plus le cas dans la société moderne.

Bertrand Duchet décrit fort bien la situation:

"Dans l'univers impitoyable des voisins, les sources de conflit sont d'une infinie variété. Au choix: la musique trop forte, la tondeuse trop bruyante, le chien trop bavard, la branche de l'arbre trop longue, le jeune trop jeune et le vieux trop vieux ..."

Le mal vivre ensemble, c'est la tyrannie du trop!

Il y en a un qui connaît bien son affaire, c'est Jean-Claude Pinchon, inspecteur de salubrité au service communal d'hygiène et de santé, qui pose le problème en termes d'ordre et d'autorité:

"Le mot justice fait encore un peu peur. C'est d'ailleurs la seule chose qui impressionne encore les gens. Parce que pour le reste ... Lorsque j'ai débuté, en 1980, la seule présence d'un employé de la mairie suffisait à calmer tout le monde. Disons que chacun se montrait plus respectueux. Mais aujourd'hui, nombreux sont ceux qui se montrent extrêmement vindicatifs. A tel point qu'il m'arrive de me faire accompagner de la police municipale pour tenter de régler un litige."

Autre temps, autres moeurs ... Mon deuxième exemple sur le "vivre ensemble" provient d'un article de Nicolas Goinard dans le Courrier Picard de samedi sur la ... délation. Autre pratique, nauséabonde, du "vivre ensemble"! Là aussi, c'est édifiant et préoccupant: les administrations de la ville, commissariat de police, CAF, Urssaf, reçoivent en moyenne, chacune, une dizaine de lettres de dénonciation par semaine. C'est globalement énorme. Même si David Boileau, le commissaire de police de Saint-Quentin, tempère l'interprétation du phénomène:

"Nous sommes 140 fonctionnaires pour 60000 habitants. Nous avons besoin des citoyens pour avoir connaissance de certains agissements."

Alors, le "vivre ensemble", ça vous branche toujours autant?


Bonne soirée, ensemble.

5 Comments:

  • que peut on dire à un voisin qui laisse délibérement son chien faire ses besoins sur votre pas de porte ?
    que doit on faire ?
    surtout quand on l'a surpris plusieurs fois en train de laisser faire
    lui étant sur le pas de sa porte
    le chien étant sur le pas de la votre

    je ne dis pas qu'il faut baisser les bras mais que peut on faire face à ce genre d'individus ?

    La démocratie est assez démunie face à ce genre d'individus.

    By Blogger grandourscharmant, at 11:37 PM  

  • Je suis confronté au même problème, ma maison occupant un coin de rue où les chiens aiment faire leurs besoins, avec la complaisance de leur maître. C'est une rue saint-quentinoise bourgeoise, mais même les gens qui passent pour "bien élevés" laissent faire leurs toutous. Et comme vous le dites: que faire?

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 12:17 AM  

  • Aller déposer la production de leur animal sur leur paillasson ?

    Leur demander de venir récupérer ce qui leur appartient ?

    Aller parler au voisin lui dire gentillement que l'on aime pas nettoyer les merdes de son chien ?

    Faidrait un permis de conducteur de chien sur l'espace public.

    By Blogger jpbb, at 12:30 PM  

  • Ah mon brave vous savez c'est ça la politique niveau "crottes de chien"!!

    By Anonymous Anonyme, at 9:26 PM  

  • Vous voyez bien ce que je vous disais il y a quelques jours! Voilà où nous mène le "concret" ... Mais c'est ainsi. Dans un autre registre, mais pas tellement éloigné, il est devenu très difficile de faire des projets "collectifs" dans une société "individualiste".

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:44 PM  

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