Incivilités républicaines.
Août 2006, à la terrasse du café saint-quentinois Le Carillon. Il fait beau, je prends un verre en compagnie d'Yves Daudigny, président du Conseil général de l'Aisne, Antoine Lefèvre, maire de Laon et conseiller régional, Fawas Karimet, vice-président du Conseil général. Nous revenons tous les quatre, PS et UMP mélangés, d'un rassemblement de soutien au Liban après l'intervention militaire israëlienne. Yves nous raconte qu'il en a profité pour faire quelques courses à Auchan. Nous parlons les uns et les autres de tout, de banalités, sauf de politique.
Pourquoi évoquer cette anecdote en soi inintéressante? Parce qu'elle est politiquement intéressante! Je n'imagine pas une seule seconde la même scène avec des politiques saint-quentinois. Pierre André, Xavier Bertrand, Anne Ferreira, Jean-Pierre Lançon à la même table, parlant du temps qu'il fait et des dernières emplettes? Impensable! Je repérais dans un récent billet une séparation culturelle dans l'Aisne (mais ailleurs aussi?) entre un socialisme des villes et un socialisme des champs. Une autre séparation distingue les vies politiques saint-quentinoise et laonnoise. D'un côté, une certaine dureté qui confine parfois à la brutalité, de l'autre une courtoisie respectueuse qui peut aller jusqu'à un relatif consensus.
La comparaison des deux campagnes municipales est, de ce point de vue, édifiante. A Saint-Quentin, les deux adversaires s'ignorent, ne se portent mutuellement aucune estime. Pierre André s'en prend à la personne de Jean-Pierre Lançon, qu'il ridiculise devant des centaines de personnes dans la salle du Splendid. L'alliance avec l'extrême gauche promet au conseil municipal une opposition dure, sans nuance, une stratégie de rupture et de déstabilisation plutôt qu'une opposition constructive se préparant pour l'avenir à assumer les responsabilités. Voilà le climat dans lequel nous sommes, inimaginable à Laon, voilà le climat qui sera le nôtre dans les prochaines années.
Un geste de Xavier Bertrand, noté par le Courrier Picard de mardi dernier, en dit long. Je cite la brève du journal:
"Au moment de voter au bureau de l'Hôtel de Ville, Xavier Bertrand a ignoré Michel Aurigny, assesseur. A ceci une explication: ce dernier est membre du parti des Travailleurs. Leur "débat" se poursuivra au conseil municipal où tous deux siégeront."
Le journaliste a eu raison d'utiliser les guillements. Le bon Xav, le gentil XB, pourquoi n'a-t-il pas salué mon ancien collègue? Aurigny aurait tout lieu d'être fier de ce manque de courtoisie. Bertrand l'a reconnu, l'a quasiment désigné pour ce qu'il est et ce qu'il sera lors des séances du conseil municipal: l'intraitable chef de l'opposition. Rappelez-vous le petit reportage de TF1 sur la campagne à Saint-Quentin, souvenez-vous de Jean-Pierre Lançon satisfait de "saluer très amicalement" le ministre quand les deux hommes se rencontraient. Bertrand est une bête politique à sang froid. Quand il tend la main, ce n'est pas pour rien. Et quand il ne la tend pas, non plus. J'en sais quelque chose.
Je ne suis pas naïf, ni idéaliste: la politique, c'est la guerre, pacifique, avec le sourire, mais c'est la guerre quand même, contre les adversaires de l'extérieur et contre les adversaires de l'intérieur. Les plus dangereux ne sont pas toujours ceux qu'on croit. Qui n'est pas prêt à faire la guerre ne doit pas faire de politique. Ceci dit, nous vivons en démocratie, nous sommes tous, à l'exception de l'extrême droite, des républicains, nous recherchons tous, à notre façon, l'intérêt général, le bien commun. C'est pourquoi ce combat que sera toujours la politique devrait être mené dans le respect et même l'estime de l'adversaire, jusqu'à l'accord avec lui quand c'est, rarement, possible. Je souhaite pour Saint-Quentin le même climat de courtoisie républicaine, d'échanges fructueux, de respect mutuel, d'estime réciproque qu'à Laon. Je sais que nous prenons le chemin inverse, mais ce sera ma différence de social-démocrate dans les années qui viennent: montrer qu'une autre forme d'opposition est possible à Saint-Quentin.
Bonne soirée.
Pourquoi évoquer cette anecdote en soi inintéressante? Parce qu'elle est politiquement intéressante! Je n'imagine pas une seule seconde la même scène avec des politiques saint-quentinois. Pierre André, Xavier Bertrand, Anne Ferreira, Jean-Pierre Lançon à la même table, parlant du temps qu'il fait et des dernières emplettes? Impensable! Je repérais dans un récent billet une séparation culturelle dans l'Aisne (mais ailleurs aussi?) entre un socialisme des villes et un socialisme des champs. Une autre séparation distingue les vies politiques saint-quentinoise et laonnoise. D'un côté, une certaine dureté qui confine parfois à la brutalité, de l'autre une courtoisie respectueuse qui peut aller jusqu'à un relatif consensus.
La comparaison des deux campagnes municipales est, de ce point de vue, édifiante. A Saint-Quentin, les deux adversaires s'ignorent, ne se portent mutuellement aucune estime. Pierre André s'en prend à la personne de Jean-Pierre Lançon, qu'il ridiculise devant des centaines de personnes dans la salle du Splendid. L'alliance avec l'extrême gauche promet au conseil municipal une opposition dure, sans nuance, une stratégie de rupture et de déstabilisation plutôt qu'une opposition constructive se préparant pour l'avenir à assumer les responsabilités. Voilà le climat dans lequel nous sommes, inimaginable à Laon, voilà le climat qui sera le nôtre dans les prochaines années.
Un geste de Xavier Bertrand, noté par le Courrier Picard de mardi dernier, en dit long. Je cite la brève du journal:
"Au moment de voter au bureau de l'Hôtel de Ville, Xavier Bertrand a ignoré Michel Aurigny, assesseur. A ceci une explication: ce dernier est membre du parti des Travailleurs. Leur "débat" se poursuivra au conseil municipal où tous deux siégeront."
Le journaliste a eu raison d'utiliser les guillements. Le bon Xav, le gentil XB, pourquoi n'a-t-il pas salué mon ancien collègue? Aurigny aurait tout lieu d'être fier de ce manque de courtoisie. Bertrand l'a reconnu, l'a quasiment désigné pour ce qu'il est et ce qu'il sera lors des séances du conseil municipal: l'intraitable chef de l'opposition. Rappelez-vous le petit reportage de TF1 sur la campagne à Saint-Quentin, souvenez-vous de Jean-Pierre Lançon satisfait de "saluer très amicalement" le ministre quand les deux hommes se rencontraient. Bertrand est une bête politique à sang froid. Quand il tend la main, ce n'est pas pour rien. Et quand il ne la tend pas, non plus. J'en sais quelque chose.
Je ne suis pas naïf, ni idéaliste: la politique, c'est la guerre, pacifique, avec le sourire, mais c'est la guerre quand même, contre les adversaires de l'extérieur et contre les adversaires de l'intérieur. Les plus dangereux ne sont pas toujours ceux qu'on croit. Qui n'est pas prêt à faire la guerre ne doit pas faire de politique. Ceci dit, nous vivons en démocratie, nous sommes tous, à l'exception de l'extrême droite, des républicains, nous recherchons tous, à notre façon, l'intérêt général, le bien commun. C'est pourquoi ce combat que sera toujours la politique devrait être mené dans le respect et même l'estime de l'adversaire, jusqu'à l'accord avec lui quand c'est, rarement, possible. Je souhaite pour Saint-Quentin le même climat de courtoisie républicaine, d'échanges fructueux, de respect mutuel, d'estime réciproque qu'à Laon. Je sais que nous prenons le chemin inverse, mais ce sera ma différence de social-démocrate dans les années qui viennent: montrer qu'une autre forme d'opposition est possible à Saint-Quentin.
Bonne soirée.
7 Comments:
"nous sommes tous, à l'exception de l'extrême droite, des républicains"
Lapsus, déni, oubli ?
La dictature du prolétariat, la lutte armée révolutionnaire, ne fait pas partie des principes républicains ni démocratiques. C'est le rapport de force allant jusqu'à la destruction physique de l'adversaire.
By jpbb, at 9:14 PM
le retour de l'anti-gauche radicale....
Ce que tu cites est exactement ce que Bush a fait pour essayer d'éliminer ces ennemis, mais bon, c'est un démocrate-républicain-puritain comme on les aime.
Finalement, des dictateurs, on en trouve partout, à gauche comme à droite, c'est l'ivresse du pouvoir ....méfions nous en France.
By Anonyme, at 9:28 PM
JPPB me reproche de faire figurer l'extrême gauche dans le camp républicain, Alain me reproche de vouloir le retour de l'anti-gauche radicale (à moins qu'Alain ne s'adresse à JPPB). Bref deux reproches qui s'annulent. Ma position, c'est celle-ci:
1- Je n'assimile pas extrême gauche et extrême droite.
2- Je ne suis pas d'extrême gauche.
Simple, non?
By Emmanuel Mousset, at 10:51 PM
doit on considérer que l'attitude d'alain rousset à bordeaux est une incivilité républicaine ?
doit on penser que c'est une chance ou une malédiction que jpl ne démissionne pas ?
comme j'ai la chance de ne pas etre un électeur de gauche à Bordeaux,
j'ai la chance de ne pas avoir le regret d'avoir voté pour un homme
qui aussi élu dans l'opposition démissionne parce que ça ne l'intéresse pas
et derriere on va aller reprocher aux majorités de ne pas laisser suffisament de place aux opposants...
By grandourscharmant, at 11:15 PM
Quand on est élu par le peuple, il faut siéger pour le peuple. Je serai très attentif à ce que ceux pour qui j'ai voté, à Saint-Quentin, siégent à chaque conseil municipal.
Mais l'expérience en la matière me garde de toute illusion: les militants siègeront, ceux qui sont là parce qu'on les a mis là ne siégeront pas tout le temps et pas longtemps.
A ce propos, rendez-vous à tous à 15h30, palais de Fervaques, pour l'installation du nouveau conseil municipal. Je ne resterai pas jusqu'au bout, je dois filer en fin d'après-midi à Soissons pour animer un café philo.
By Emmanuel Mousset, at 8:50 AM
je répondais evidemment à notre amis du centre JPBB.Confondre extreme gauche et extreme droite est d'un gout douteux.
By Anonyme, at 9:18 PM
En ce qui me concerne, je n'ai jamais fait l'amalgame. De même que je n'apprécie pas qu'on amalgame un social-démocrate et un homme de droite.
By Emmanuel Mousset, at 9:49 PM
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