Mendésiste et mitterrandiste.
Petite devinette estivale: qui est à la fois mendésiste et mitterrandiste tout en demeurant un authentique homme de droite? Vous ne voyez pas... C'est quelqu'un de très fort, puisqu'il parvient sans problème à concilier ces contraires. Vous ne voyez toujours pas? Alors je vous donne un indice: l'an dernier, il avait déjà réussi à rassembler Jaurès, Blum et la droite. Eh oui, c'est bien lui, toujours lui, Nicolas Sarkozy, dans Le Monde de cet après-midi. Je le cite:
"Je me sens mendésiste dans l'idée que faire n'est pas nécessairement durer." Certes, mais Mendès-France n'a pas duré moins par sa volonté que par les institutions de la IVème République qui ne favorisaient guère la durée. Surtout, Mendès et Sarkozy sont comme le jour et la nuit. Chez Mendès, il y a un profond respect des corps intermédiaires, le souci d'un dialogue constant avec la société, le choix de priviligier quelques priorités, de s'y tenir et de les conduire à terme.
Rien de tel chez Sarkozy, qui est tout à l'opposé: il ne croit qu'en sa propre capacité à faire bouger la société (ce que certains appellent son "bonapartisme"), il bouscule les corps intermédiaires, y compris ceux qui lui sont sociologiquement favorables (magistrats, militaires), il se présente comme "l'homme de la rupture", il affirme que "tout est possible", il prétend mener de front une soixantaine de réformes (rien que ça!). Non, je ne vois aucune trace de mendésisme là-dedans, ni dans la méthode, ni bien entendu dans le contenu.
Alors, Nicolas Sarkozy serait mitterrandiste, sachant que Mendès et Mitterrand ont été, l'un et l'autre, les deux voies possibles de la gauche française dans les années 60. Il le dit parce qu'il ose tout, mais est-ce vrai? Ecoutons-le d'abord:
"Je me reconnais dans la volonté de réforme de François Mitterrand entre 1981 et 1983, même si je n'étais pas d'accord avec sa politique."
La comparaison est-elle plus pertinente qu'avec Mendès? Non, parce que le volontarisme de Mitterrand ne relevait pas, à la différence de Sarkozy, d'un culte de la volonté ou du moi, mais s'articulait à un projet de transformation de la société, contenu dans le Programme commun. On peut en penser ce qu'on veut, on ne trouve rien de similaire chez Sarkozy. Sa "rupture" est un slogan au regard de ce qui s'est passé en 1981. Sarkozy et la moitié de son gouvernement, Xavier Bertrand au premier chef, étaient des ministres de Chirac, des membres de la majorité et du Parti au pouvoir. En matière de "rupture", on a fait mieux!
Mitterrand serait le premier surpris à se voir assimiler à Sarkozy. Tout les oppose psychologiquement, surtout cette formule fameuse du président socialiste: "Il faut laisser du temps au temps". Le rapport à la durée est essentiel pour qui veut comprendre un homme politique. L'hyperactif Sarkozy est entièrement étranger au méditatif Mitterrand.
Mais le plus surprenant dans ces deux références de Nicolas Sarkozy, c'est qu'elles font appel à deux personnalités non à travers leur réussite mais à travers leur échec. Là où Mendès a échoué, c'est qu'il n'a pas su durer. Là où Mitterrand s'est trompé, c'est qu'il a cru en une rupture qui a débouché sur un échec, et un changement de ligne politique en 1983.
Alors, Nicolas Sarkozy serait-il bête? Que non! Il continue ce qu'il a inauguré l'an dernier, l'instrumentalisation des personnalités de gauche, en vue de séduire cette partie de l'électorat. Se reconnaître en Mendès, c'est faire un clin d'oeil à la "deuxième gauche", se référer à Mitterrand, c'est tenter de séduire le socialisme traditionnel. Est-ce que ça va marcher? Là, c'est une autre histoire...
Bonne fin d'après-midi.
"Je me sens mendésiste dans l'idée que faire n'est pas nécessairement durer." Certes, mais Mendès-France n'a pas duré moins par sa volonté que par les institutions de la IVème République qui ne favorisaient guère la durée. Surtout, Mendès et Sarkozy sont comme le jour et la nuit. Chez Mendès, il y a un profond respect des corps intermédiaires, le souci d'un dialogue constant avec la société, le choix de priviligier quelques priorités, de s'y tenir et de les conduire à terme.
Rien de tel chez Sarkozy, qui est tout à l'opposé: il ne croit qu'en sa propre capacité à faire bouger la société (ce que certains appellent son "bonapartisme"), il bouscule les corps intermédiaires, y compris ceux qui lui sont sociologiquement favorables (magistrats, militaires), il se présente comme "l'homme de la rupture", il affirme que "tout est possible", il prétend mener de front une soixantaine de réformes (rien que ça!). Non, je ne vois aucune trace de mendésisme là-dedans, ni dans la méthode, ni bien entendu dans le contenu.
Alors, Nicolas Sarkozy serait mitterrandiste, sachant que Mendès et Mitterrand ont été, l'un et l'autre, les deux voies possibles de la gauche française dans les années 60. Il le dit parce qu'il ose tout, mais est-ce vrai? Ecoutons-le d'abord:
"Je me reconnais dans la volonté de réforme de François Mitterrand entre 1981 et 1983, même si je n'étais pas d'accord avec sa politique."
La comparaison est-elle plus pertinente qu'avec Mendès? Non, parce que le volontarisme de Mitterrand ne relevait pas, à la différence de Sarkozy, d'un culte de la volonté ou du moi, mais s'articulait à un projet de transformation de la société, contenu dans le Programme commun. On peut en penser ce qu'on veut, on ne trouve rien de similaire chez Sarkozy. Sa "rupture" est un slogan au regard de ce qui s'est passé en 1981. Sarkozy et la moitié de son gouvernement, Xavier Bertrand au premier chef, étaient des ministres de Chirac, des membres de la majorité et du Parti au pouvoir. En matière de "rupture", on a fait mieux!
Mitterrand serait le premier surpris à se voir assimiler à Sarkozy. Tout les oppose psychologiquement, surtout cette formule fameuse du président socialiste: "Il faut laisser du temps au temps". Le rapport à la durée est essentiel pour qui veut comprendre un homme politique. L'hyperactif Sarkozy est entièrement étranger au méditatif Mitterrand.
Mais le plus surprenant dans ces deux références de Nicolas Sarkozy, c'est qu'elles font appel à deux personnalités non à travers leur réussite mais à travers leur échec. Là où Mendès a échoué, c'est qu'il n'a pas su durer. Là où Mitterrand s'est trompé, c'est qu'il a cru en une rupture qui a débouché sur un échec, et un changement de ligne politique en 1983.
Alors, Nicolas Sarkozy serait-il bête? Que non! Il continue ce qu'il a inauguré l'an dernier, l'instrumentalisation des personnalités de gauche, en vue de séduire cette partie de l'électorat. Se reconnaître en Mendès, c'est faire un clin d'oeil à la "deuxième gauche", se référer à Mitterrand, c'est tenter de séduire le socialisme traditionnel. Est-ce que ça va marcher? Là, c'est une autre histoire...
Bonne fin d'après-midi.
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