Qui sont nos adversaires?
Bonjour à toutes et à tous.
En ce 14 juillet, il est bon de parler de notre armée. J'ai dit quelques mots, il y a quelques jours, des relations tendues entre Nicolas Sarkozy et les militaires. Dans le Journal du Dimanche, un sondage a posé la question: Quels sont aujourd'hui les adversaires de la France? Car à quoi bon l'institution militaire si le pays n'est pas menacé, faute d'adversaires. Les réponses méritent commentaires:
A 66%, l'adversaire c'est le terrorisme. Ce qui signifie, à bien y réfléchir, que nous n'avons plus de véritables adversaires! Car l'adversaire de la France, durant des siècles, c'était un autre pays, un envahisseur potentiel ou réel, l'Angleterre pendant longtemps, perfide Albion, puis l'Allemagne, l'ennemi boche, enfin la Russie soviétique, le péril rouge. Même à l'époque des invasions barbares, Vikings ou Huns, l'ennemi était identifié à un peuple, sédentaire ou pas. Le terrorisme, ce sont des bandes armés, certes menaçantes, incontestablement dangereuses, mais sans commune mesure avec la puissance d'une nation, d'un Etat, d'une armée. C'est ce sens que nous n'avons plus d'adversaires réels.
Les Etats-Unis ont beau avoir été cruellement touchés par les attentats du Word Trade Center, ils n'en restent pas moins la première puissance au monde, nullement affectée, sinon psychologiquement, par ce qui est arrivé. Réussir un attentat n'est pas remporter une bataille. Et la lutte contre le terrorisme n'est pas une guerre en bonne et due forme comme il en a existé pendant des millénaires, mais une opération qui relève plus de l'intervention de police. Le véritable adversaire est celui qui peut vous abattre. Les terroristes peuvent faire mal, très mal, ils ont perdu d'avance.
A 45%, l'adversaire c'est l'islamisme. Mais pour beaucoup de gens, certes à tort, le terroriste et l'islamiste se confondent. Il est tout de même préoccupant de voir ainsi stigmatisé, injustement, une grande et belle religion, l'Islam, qui n'est pas plus terroriste que ne l'est le catholicisme. Ne me dites pas que l'opinion fait le subtil distinguo entre Islam et islamisme, musulmans et islamistes. Je n'y crois hélas pas. Allons-nous, après plusieurs siècles, vers de nouvelles guerres de religions? Il ne le faut évidemment pas.
A 32%, l'adversaire ce sont les petits pays disposant de l'arme nucléaire. La réponse recoupe les deux premières, car ces pays, par exemple le Pakistan ou l'Iran, sont perçus comme islamistes et terroristes. Il n'empêche que les 32%, comparés aux 66%, me semblent faibles. Le vrai danger pour la France et la paix mondiale est pourtant là, dans ce qu'on appelle la "prolifération nucléaire". Plus les bombes atomiques se multiplient, plus le risque de déflagration augmente. Mais le problème politique est le suivant: au nom de quoi un grand pays qui dispose de l'arme nucléaire, qui en a fait le coeur de sa stratégie militaire, au nom de quoi va-t-il interdire à un autre pays de faire de même? Et technologiquement, on voit mal ce qui pourrait empêcher le nucléaire civil et militaire de se répandre à travers le monde. Il y a de quoi être inquiet face à ce défi militaire, technologique et politique.
A 28%, l'adversaire c'est la Chine. Là je dis non, c'est stupide! La Chine n'est nullement un adversaire, elle ne nous menace pas militairement. Autant je dénonce la politique intérieure chinoise, son régime d'oppression, le non respect des droits de l'homme, autant sa politique extérieure ne me semble pas fondamentalement condamnable. Je crains que l'opinion, une fois de plus, ne mélange tout, en l'occurrence la menace militaire et la menace économique, comme précédemment elle confondait terrorisme et religion. Et même économiquement, en quoi la Chine serait-elle plus inquiétante que l'Inde? Derrière ces 28% se profile la figure ancienne du "péril jaune", aussi stupide que dangereuse.
A 14%, l'adversaire ce sont... les Etats-Unis. Mais oui, aussi incroyable que cela paraisse, une minorité non négligeable de Français pense que les USA sont nos adversaires, alors que ce sont nos plus anciens alliés, alors que personne n'imagine les GI nous envahir, d'autant que par deux fois, 1914-1918, 1939-1945, ils nous ont... libéré. Ce pourcentage extravagant signe la persistance d'une névrose nationale génératrice de nombreux fantasmes, l'anti-américanisme, d'une stupidité absolue, autant que peut l'être l'anti-européisme, hélas l'un et l'autre répandus dans certains milieux de gauche. A droite, en revanche, l'anti-soviétisme a quasi disparu, et c'est logique, avec la disparition de l'URSS, puisqu'il n'y a plus que 4% des Français à considérer ce pays comme un adversaire de la France. Pourtant, à bien y réfléchir, en quoi la Russie de Poutine serait-elle beaucoup moins inquiétante que l'Amérique de Bush pour notre sécurité nationale?
Dans nos villes et métropoles, l'armée va ce matin défiler, à Saint-Quentin dans le quartier Saint-Martin. Ce pourrait être un sujet de méditation pour les militaires, les élus et les citoyens: qui sont aujourd'hui les adversaires de la France?
Bonne matinée,
bon 14 juillet.
En ce 14 juillet, il est bon de parler de notre armée. J'ai dit quelques mots, il y a quelques jours, des relations tendues entre Nicolas Sarkozy et les militaires. Dans le Journal du Dimanche, un sondage a posé la question: Quels sont aujourd'hui les adversaires de la France? Car à quoi bon l'institution militaire si le pays n'est pas menacé, faute d'adversaires. Les réponses méritent commentaires:
A 66%, l'adversaire c'est le terrorisme. Ce qui signifie, à bien y réfléchir, que nous n'avons plus de véritables adversaires! Car l'adversaire de la France, durant des siècles, c'était un autre pays, un envahisseur potentiel ou réel, l'Angleterre pendant longtemps, perfide Albion, puis l'Allemagne, l'ennemi boche, enfin la Russie soviétique, le péril rouge. Même à l'époque des invasions barbares, Vikings ou Huns, l'ennemi était identifié à un peuple, sédentaire ou pas. Le terrorisme, ce sont des bandes armés, certes menaçantes, incontestablement dangereuses, mais sans commune mesure avec la puissance d'une nation, d'un Etat, d'une armée. C'est ce sens que nous n'avons plus d'adversaires réels.
Les Etats-Unis ont beau avoir été cruellement touchés par les attentats du Word Trade Center, ils n'en restent pas moins la première puissance au monde, nullement affectée, sinon psychologiquement, par ce qui est arrivé. Réussir un attentat n'est pas remporter une bataille. Et la lutte contre le terrorisme n'est pas une guerre en bonne et due forme comme il en a existé pendant des millénaires, mais une opération qui relève plus de l'intervention de police. Le véritable adversaire est celui qui peut vous abattre. Les terroristes peuvent faire mal, très mal, ils ont perdu d'avance.
A 45%, l'adversaire c'est l'islamisme. Mais pour beaucoup de gens, certes à tort, le terroriste et l'islamiste se confondent. Il est tout de même préoccupant de voir ainsi stigmatisé, injustement, une grande et belle religion, l'Islam, qui n'est pas plus terroriste que ne l'est le catholicisme. Ne me dites pas que l'opinion fait le subtil distinguo entre Islam et islamisme, musulmans et islamistes. Je n'y crois hélas pas. Allons-nous, après plusieurs siècles, vers de nouvelles guerres de religions? Il ne le faut évidemment pas.
A 32%, l'adversaire ce sont les petits pays disposant de l'arme nucléaire. La réponse recoupe les deux premières, car ces pays, par exemple le Pakistan ou l'Iran, sont perçus comme islamistes et terroristes. Il n'empêche que les 32%, comparés aux 66%, me semblent faibles. Le vrai danger pour la France et la paix mondiale est pourtant là, dans ce qu'on appelle la "prolifération nucléaire". Plus les bombes atomiques se multiplient, plus le risque de déflagration augmente. Mais le problème politique est le suivant: au nom de quoi un grand pays qui dispose de l'arme nucléaire, qui en a fait le coeur de sa stratégie militaire, au nom de quoi va-t-il interdire à un autre pays de faire de même? Et technologiquement, on voit mal ce qui pourrait empêcher le nucléaire civil et militaire de se répandre à travers le monde. Il y a de quoi être inquiet face à ce défi militaire, technologique et politique.
A 28%, l'adversaire c'est la Chine. Là je dis non, c'est stupide! La Chine n'est nullement un adversaire, elle ne nous menace pas militairement. Autant je dénonce la politique intérieure chinoise, son régime d'oppression, le non respect des droits de l'homme, autant sa politique extérieure ne me semble pas fondamentalement condamnable. Je crains que l'opinion, une fois de plus, ne mélange tout, en l'occurrence la menace militaire et la menace économique, comme précédemment elle confondait terrorisme et religion. Et même économiquement, en quoi la Chine serait-elle plus inquiétante que l'Inde? Derrière ces 28% se profile la figure ancienne du "péril jaune", aussi stupide que dangereuse.
A 14%, l'adversaire ce sont... les Etats-Unis. Mais oui, aussi incroyable que cela paraisse, une minorité non négligeable de Français pense que les USA sont nos adversaires, alors que ce sont nos plus anciens alliés, alors que personne n'imagine les GI nous envahir, d'autant que par deux fois, 1914-1918, 1939-1945, ils nous ont... libéré. Ce pourcentage extravagant signe la persistance d'une névrose nationale génératrice de nombreux fantasmes, l'anti-américanisme, d'une stupidité absolue, autant que peut l'être l'anti-européisme, hélas l'un et l'autre répandus dans certains milieux de gauche. A droite, en revanche, l'anti-soviétisme a quasi disparu, et c'est logique, avec la disparition de l'URSS, puisqu'il n'y a plus que 4% des Français à considérer ce pays comme un adversaire de la France. Pourtant, à bien y réfléchir, en quoi la Russie de Poutine serait-elle beaucoup moins inquiétante que l'Amérique de Bush pour notre sécurité nationale?
Dans nos villes et métropoles, l'armée va ce matin défiler, à Saint-Quentin dans le quartier Saint-Martin. Ce pourrait être un sujet de méditation pour les militaires, les élus et les citoyens: qui sont aujourd'hui les adversaires de la France?
Bonne matinée,
bon 14 juillet.
4 Comments:
Le principal adversaire de la France... Nicolas Sarkozy?
By Anonyme, at 11:44 AM
J'évoquais dans ce billet les adversaires de l'extérieur, pas de ceux de l'intérieur.
By Emmanuel Mousset, at 1:45 PM
Tfasson tan ke Le Pen sera pas o pvoir yora rien ki marchera c tt vs savez pa comprendr
By Anonyme, at 9:00 PM
Il me semble que plus jamais Le Pen n'accédera au pouvoir. Et je m'en réjouis.
By Emmanuel Mousset, at 10:52 PM
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