Les leçons du RSA.
Le financement du RSA a été adopté au dernier conseil des ministres. Attendons maintenant l'épreuve du Parlement. Mais le débat houleux qui a suivi cette annonce me conduit déjà à certaines remarques:
1- Il s'agit d' "une mesure typiquement socialiste: on frappe le capital pour financer les exclus et les inciter à travailler (...). Sachant que les revenus du travail sont épargnés, il s'agit bien, camarades, d'une taxation du capital". Qui dit ça? Oncle Bernard, dans un remarquable article de Charlie-Hebdo sur le RSA. C'est pourquoi je soutiens cette mesure, peu m'importe que Sarkozy soit celui qui la met en oeuvre. 3,5 millions de ménages sont concernés, 700 000 personnes sortiront de la pauvreté (parmi les 12% de Français qui vivent avec 681 euros par mois). Je ne vois que ça.
2- On se demande où passe la fracture entre socialistes, au milieu des 21 contributions du congrès. Là voilà, la fracture, sur le RSA, entre les partisans du réel (les réformistes) et les partisans de l'idéal (les radicaux). Les premiers, dont je suis, pensent qu'il faut soulager la misère maintenant, en améliorant la situation de ceux qui sont en difficulté. Les seconds veulent une hypothétique revalorisation des bas salaires et considèrent que le RSA nourrit le travail précaire. Ils n'ont pas tort mais j'ai raison: mieux vaut lutter réellement contre la pauvreté qu'attendre idéalement une augmentation des rémunérations qui ne viendra peut-être jamais, qui n'est sans doute pas généralisable, qui ne réglera certainement pas le problème du chômage.
3- Ce débat nous a rappelé que l'épargne en France est importante, plus importante que dans d'autres pays européens, et que le capital n'est pas concentré entre les mains de quelques-uns, mais disséminé, certes inéquitablement, dans une grande partie de la population: 12 millions de personnes ont une assurance-vie, 6,5 millions sont de petits actionnaires, 4 millions de foyers propriétaires bénéficient de locations. La gauche a longtemps dénoncé "le grand capital". Il faut reconnaître qu'existe aujourd'hui un "petit capital". 40,3% des ménages ouvriers ont un contrat d'assurance-vie, 38,6% des ménages d'employés.
4- Qui va payer la fameuse taxe? Beaucoup de bêtises ont été dites là-dessus, certains laissant croire que les classes populaires seraient frappées, ce qui est exagéré, d'autres craignant pour les classes moyennes, ce qui est discutable, tellement le concept de classes moyennes est extensible et indéterminé. En vérité, ce sont essentiellement les classes moyennes supérieures, aisées, qui seront concernées, mais pas les plus riches, protégés par le "bouclier fiscal".
5- François Bayrou, tout à son objectif d'être le premier opposant à Sarkozy, a fait dans une incroyable démagogie, avançant un argument particulièrement idiot: avec le RSA, les loyers vont augmenter! Ni plus ni moins que pour n'importe quelle autre taxe ou hausse...
6- Si le RSA est une bonne chose, si son financement me convient, il n'empêche que l'impact de cette mesure est largement atténué par la politique fiscale dans laquelle elle s'inscrit, et que je n'ai cessé de condamner: crédits d'impôt pour les nouveaux propriétaires, quasi disparition des droits de succession, abattement ISF, disparition progressive de la fiscalité sur les plus-values immobilières, bouclier fiscal (qui contredit le principe de progressivité de l'impôt).
7- Ceux qui distinguent le RSA de son financement, approuvent l'un et condamnent l'autre, ceux-là sont des hypocrites, des inconséquents: qui veut la fin (le RSA) veut les moyens (son financement). Les deux sont liés. En politique, il faut choisir, et pas biaiser. Je vous conseille là-dessus un petit livre du philosophe Kant, sur les rapports entre théorie et pratique, critiquant ceux qui adhèrent à une théorie mais récusent sa pratique. On l'a vu en 2002 à propos des principales réformes de gauche, 35h, CMU, etc. En théorie, c'est bien, mais en pratique, c'est mal, nous expliquait-on. Non, il est idiot de raisonner ainsi, c'est une échappatoire, un sophisme, une ruse dialectique. Théorie et pratique sont solidaires.
Bonne fin d'après-midi.
1- Il s'agit d' "une mesure typiquement socialiste: on frappe le capital pour financer les exclus et les inciter à travailler (...). Sachant que les revenus du travail sont épargnés, il s'agit bien, camarades, d'une taxation du capital". Qui dit ça? Oncle Bernard, dans un remarquable article de Charlie-Hebdo sur le RSA. C'est pourquoi je soutiens cette mesure, peu m'importe que Sarkozy soit celui qui la met en oeuvre. 3,5 millions de ménages sont concernés, 700 000 personnes sortiront de la pauvreté (parmi les 12% de Français qui vivent avec 681 euros par mois). Je ne vois que ça.
2- On se demande où passe la fracture entre socialistes, au milieu des 21 contributions du congrès. Là voilà, la fracture, sur le RSA, entre les partisans du réel (les réformistes) et les partisans de l'idéal (les radicaux). Les premiers, dont je suis, pensent qu'il faut soulager la misère maintenant, en améliorant la situation de ceux qui sont en difficulté. Les seconds veulent une hypothétique revalorisation des bas salaires et considèrent que le RSA nourrit le travail précaire. Ils n'ont pas tort mais j'ai raison: mieux vaut lutter réellement contre la pauvreté qu'attendre idéalement une augmentation des rémunérations qui ne viendra peut-être jamais, qui n'est sans doute pas généralisable, qui ne réglera certainement pas le problème du chômage.
3- Ce débat nous a rappelé que l'épargne en France est importante, plus importante que dans d'autres pays européens, et que le capital n'est pas concentré entre les mains de quelques-uns, mais disséminé, certes inéquitablement, dans une grande partie de la population: 12 millions de personnes ont une assurance-vie, 6,5 millions sont de petits actionnaires, 4 millions de foyers propriétaires bénéficient de locations. La gauche a longtemps dénoncé "le grand capital". Il faut reconnaître qu'existe aujourd'hui un "petit capital". 40,3% des ménages ouvriers ont un contrat d'assurance-vie, 38,6% des ménages d'employés.
4- Qui va payer la fameuse taxe? Beaucoup de bêtises ont été dites là-dessus, certains laissant croire que les classes populaires seraient frappées, ce qui est exagéré, d'autres craignant pour les classes moyennes, ce qui est discutable, tellement le concept de classes moyennes est extensible et indéterminé. En vérité, ce sont essentiellement les classes moyennes supérieures, aisées, qui seront concernées, mais pas les plus riches, protégés par le "bouclier fiscal".
5- François Bayrou, tout à son objectif d'être le premier opposant à Sarkozy, a fait dans une incroyable démagogie, avançant un argument particulièrement idiot: avec le RSA, les loyers vont augmenter! Ni plus ni moins que pour n'importe quelle autre taxe ou hausse...
6- Si le RSA est une bonne chose, si son financement me convient, il n'empêche que l'impact de cette mesure est largement atténué par la politique fiscale dans laquelle elle s'inscrit, et que je n'ai cessé de condamner: crédits d'impôt pour les nouveaux propriétaires, quasi disparition des droits de succession, abattement ISF, disparition progressive de la fiscalité sur les plus-values immobilières, bouclier fiscal (qui contredit le principe de progressivité de l'impôt).
7- Ceux qui distinguent le RSA de son financement, approuvent l'un et condamnent l'autre, ceux-là sont des hypocrites, des inconséquents: qui veut la fin (le RSA) veut les moyens (son financement). Les deux sont liés. En politique, il faut choisir, et pas biaiser. Je vous conseille là-dessus un petit livre du philosophe Kant, sur les rapports entre théorie et pratique, critiquant ceux qui adhèrent à une théorie mais récusent sa pratique. On l'a vu en 2002 à propos des principales réformes de gauche, 35h, CMU, etc. En théorie, c'est bien, mais en pratique, c'est mal, nous expliquait-on. Non, il est idiot de raisonner ainsi, c'est une échappatoire, un sophisme, une ruse dialectique. Théorie et pratique sont solidaires.
Bonne fin d'après-midi.
5 Comments:
Il est vrai que c'est une bonne mesure mais le fait qu'elle ne rentre pas dans le bouclier fiscal montre que c'est sarko qui l'a mise en place.... .
Jez trouve que c'est une erreur de sa part car du coup les classes moyennes se sentent encore les dindons de la farce.
Enfin ils se rendront peu être compte que c'est pas sarko qui va faire de la justice sociale..
By Anonyme, at 8:23 PM
D'accord avec vous.
By Emmanuel Mousset, at 9:02 PM
A moins que les gens pensent que si ça avait été les socialistes au pouvoir la douloureuse aurait été encore plus lourde.
By grandourscharmant, at 10:07 PM
Mais surtout plus juste, un mot qui ne fait pas partie de votre vocabulaire, qui n'est pas inscrit dans votre encyclopédie UMP.
By Emmanuel Mousset, at 10:34 PM
alors
soit personne ne veut d'une société plus juste
soit personne ne vous croie
D'un autre coté, il suffit de voir l'injustice dont vous faites preuve entre vous pour etre convaincu que la justice n'est pas de votre camp.
By grandourscharmant, at 10:57 AM
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