Obama à St Quentin.

L'effet Obama retombe un peu, les médias se calment, l'opinion est passée à une nouvelle source d'excitation, je ne serais pas surpris que les premières déceptions arrivent très vite. Tant mieux, nous allons pouvoir maintenant réfléchir. Obama, c'est une nouvelle façon de pratiquer la politique, dont la France, et pourquoi pas la gauche axonaise et saint-quentinoise, feraient bien de s'inspirer. Il vaut mieux prendre modèle sur ceux qui gagnent que sur ceux qui perdent.

Attention, je ne demande pas qu'on parte à la recherche de l'Obama français... ou saint-quentinois. Ce serait d'un profond ridicule, qui n'a pas été évité à tous ces derniers jours. Mais il faut observer de près ce qui s'est passé là-bas et comment on gagne une élection aujourd'hui. C'est ce qu'a fait Xavier Bertrand, en envoyant sur place son chef de cabinet, Michel Bettan. Je ne propose pas que la section socialiste de Saint-Quentin dépêche l'un des siens outre-atlantique (même si je me porte candidat!), nous n'avons même pas de quoi nous payer un local! Mais rien interdit de réfléchir aux conditions modernes de la pratique politique.

De ce point de vue, nous sommes très en retard, champions du collage d'affiches que personne ne lit, de la distribution de tracts qui vont à la poubelle ou de l'organisation de réunions pour les seuls convaincus. Que nous apprend Obama? Que la politique est un métier, un vrai job, avec sa dimension professionnelle. Mitterrand avait une bonne formule: "en politique, le meilleur des amateurs ne remplacera jamais le pire des professionnels". Prendre conscience que la politique n'est pas une distraction pour esseulés en mal de reconnaissance sociale mais un boulot (et un boulot de chien!), ce serait déjà un grand progrès.

Puis vient la technologie contemporaine, dont Obama a fait grand-usage, essentiellement l'internet. Prenez l'exemple de ce blog: en une journée, je contacte plus de personnes que je ne le ferais en un an. Après, ça vaut ce que ça vaut et ça donne ce que ça donne, mais le fait est là. Tout le monde sait qu'un blog régulièrement approvisionné a une influence, que l'internet est le mode vivant, interactif, de la communication moderne. Obama a joué à plein là-dessus.

Cependant, il n'a pas négligé les anciennes méthodes, mais en les renouvelant, avec cette idée centrale: il faut que chaque citoyen se sente acteur et organisateur de la campagne. On est loin du militant homme-à-tout-faire qui sévit encore dans les partis en France. L'idéal du colleur d'affiches et du distributeur de tracts, assujetti à sa hiérarchie, est mort. L'important maintenant, c'est de faire appel aux compétences de chacun plutôt qu'à l'esprit de discipline, c'est de laisser l'adhérent s'investir dans l'activité de son choix, sans le soumettre à un modèle canonique, c'est de s'ouvrir très largement aux sympathisants et aux électeurs du Parti et de les organiser.

Quant au nouvel homme politique incarné par Obama, son projet est scénarisé, sa personne devient un personnage, son parcours se transforme en destin, sa vie s'élève à la légende, ses idées se traduisent en rêve. C'en est fini des pensums électoraux que personne ne lit, des épaisses brochures qui ne servent à rien. Les convictions sont mises en scène à travers des sentiments, des séquences émotionnelles. Les réunions interminables, confidentielles et absconses sont remplacées par des créations d'évènements, mobilisateurs, attractifs, ludiques, porteurs de sens. Qui sait si Ségolène Royal n'a pas été précurseur? Cette évolution peut choquer, et moi-même j'ai des réticences. Mais, à l'évidence, la vie politique ne peut plus durer comme elle dure depuis trop longtemps.


Bon après-midi.