Chez les communistes libertaires.
Bonjour à toutes et à tous.
J'ai passé hier une excellente soirée chez mes amis communistes. Avec eux, on ne s'ennuie jamais ! J'ai cru, par moments, revenir une petite dizaine d'années en arrière, à la grande époque des non moins grandioses soirées du CLRIF (Comité local de lutte contre les infiltrations fascistes, quel nom ! Je préfère parler de comité anti-Baur, puisque celui-ci s'était allié au Conseil régional avec le FN). J'ai alors une pensée pour ceux qui sont partis (Philippe), pour le fondateur qui a pris sa retraite (Yves), surtout pour ceux qui ont depuis quitté ce monde (Denise).
Mais hier soir, c'est une autre génération qui a pris la relève, les trentenaires. Et cette différence de génération se sent, dans les références, les réflexes, presque les comportements. La section communiste du centre-ville, "Joliot-Curie", organisait donc un repas, chili con carne accompagné de riz, tarte aux pommes, chansons et danses, mojito et vin rouge. La nouvelle secrétaire de section, Aurélie Plé, a fait comme il se doit une petite allocution. J'étais d'accord avec tout, sauf la conclusion : pour "une société communiste et libertaire."
Bien sûr, si le communisme est le partage égalitaire des richesses et si libertaire vise le développement maximum de la liberté, je suis communiste et libertaire. Mais pourquoi suis-je alors social-démocrate ? Parce que le communisme libertaire est un idéal, magnifique, souhaitable, mais seulement un idéal (ce qui n'est déjà pas si mal !). Ce n'est pas une réalité. Or la politique consiste à travailler dans et sur la réalité, avec ses compromis peut-être fâcheux mais nécessaires.
Il y a plus embêtant : quand le communisme libertaire a voulu s'appliquer au XIXème, il s'est traduit par des communautés utopistes ou un mouvement plus vaste, la Commune de 1871, qui ont toujours échoué. Et quand le communisme libertaire a enfin réussi au XXème siècle, il a débouché, avec Lénine, Mao, Castro (pour les plus connus) sur la tragédie et parfois la barbarie. Comme si un idéal lumineux prenait la couleur du sang quand il passait dans le réel. C'est aussi pourquoi je suis modestement mais sûrement social-démocrate.
Et puis, dans le discours d'Aurélie, je ne sens pas de perspectives politiques, au sens de prises de responsabilités, gestion du pouvoir. A la limite, nous sommes plus dans le lyrisme que dans la politique. Mais c'est bien aussi : le lyrisme, le rêve, il en faut. Dans le même ordre d'idées, je suis surpris par le mélange de l'assistance, des sensibilités : communiste, anarchiste, trotskiste. Mais pour ceux qui sont là, ces mots, auxquels je tiens, ont-ils un sens ? Il y a dix ans, au CLRIF, les lignes restaient encore plus ou moins visibles, entre un socialiste, un communiste et un trotskiste. Aujourd'hui, j'ai l'impression qu'il y a en partie pénétration, dilution. Je note aussi avec intérêt que ces trentenaires communistes libertaires viennent pour la plupart de familles communistes de stricte obédience.
C'est peut-être ça le coup de génie du NPA : avoir compris que la génération Krivine était condamnée à la marginalité, qu'il fallait tourner la page, assurer la relève des générations. La LCR y est parvenue, c'est difficile et rare en politique, le passage de relais. Je ne sais pas ce que ça donnera, on verra, mais c'est assez bien parti, quand on sait que la LCR végétait à l'état de quasi groupuscule.
Je reviens sur cette osmose au sein de la gauche radicale: un socialiste de notre aile gauche, hostile à la social-démocratie, pourra être séduit par Besancenot (j'en connais), de même qu'un communiste contestataire ou un anarchiste pas trop sectaire. Il y a quarante ans, le mélange des genres était inconcevable et ces militants s'affrontaient, y compris physiquement. Maintenant ils dansent ensemble. Je ne dis pas que c'est mal, c'est même plutôt sympa. Il vaut mieux se caresser que se taper sur la gueule. Mais je reste perplexe, je me demande s'il va en surgir politiquement quelque chose, et quoi.
Ce n'est pas que je craigne pour l'avenir de la social-démocratie. Avec ses élus, ses notables, ses réseaux dans la société civile, sa culture de gestion locale et de gouvernement national, elle est puissante et n'a rien à redouter du NPA ou d'une quelconque formation radicale. Ce que je crains en revanche, et très fort, c'est qu'une partie de l'électorat ne se cristallise dans une posture seulement protestataire, lyrique, désespérant de toute solution politique. Alors, la droite aurait de beaux jours devant elle. C'est pourquoi l'UMP présente aujourd'hui Olivier Besancenot comme son meilleur opposant, pour mieux shunter le Parti socialiste. Ça, je n'en veux pas.
Bonne journée.
J'ai passé hier une excellente soirée chez mes amis communistes. Avec eux, on ne s'ennuie jamais ! J'ai cru, par moments, revenir une petite dizaine d'années en arrière, à la grande époque des non moins grandioses soirées du CLRIF (Comité local de lutte contre les infiltrations fascistes, quel nom ! Je préfère parler de comité anti-Baur, puisque celui-ci s'était allié au Conseil régional avec le FN). J'ai alors une pensée pour ceux qui sont partis (Philippe), pour le fondateur qui a pris sa retraite (Yves), surtout pour ceux qui ont depuis quitté ce monde (Denise).
Mais hier soir, c'est une autre génération qui a pris la relève, les trentenaires. Et cette différence de génération se sent, dans les références, les réflexes, presque les comportements. La section communiste du centre-ville, "Joliot-Curie", organisait donc un repas, chili con carne accompagné de riz, tarte aux pommes, chansons et danses, mojito et vin rouge. La nouvelle secrétaire de section, Aurélie Plé, a fait comme il se doit une petite allocution. J'étais d'accord avec tout, sauf la conclusion : pour "une société communiste et libertaire."
Bien sûr, si le communisme est le partage égalitaire des richesses et si libertaire vise le développement maximum de la liberté, je suis communiste et libertaire. Mais pourquoi suis-je alors social-démocrate ? Parce que le communisme libertaire est un idéal, magnifique, souhaitable, mais seulement un idéal (ce qui n'est déjà pas si mal !). Ce n'est pas une réalité. Or la politique consiste à travailler dans et sur la réalité, avec ses compromis peut-être fâcheux mais nécessaires.
Il y a plus embêtant : quand le communisme libertaire a voulu s'appliquer au XIXème, il s'est traduit par des communautés utopistes ou un mouvement plus vaste, la Commune de 1871, qui ont toujours échoué. Et quand le communisme libertaire a enfin réussi au XXème siècle, il a débouché, avec Lénine, Mao, Castro (pour les plus connus) sur la tragédie et parfois la barbarie. Comme si un idéal lumineux prenait la couleur du sang quand il passait dans le réel. C'est aussi pourquoi je suis modestement mais sûrement social-démocrate.
Et puis, dans le discours d'Aurélie, je ne sens pas de perspectives politiques, au sens de prises de responsabilités, gestion du pouvoir. A la limite, nous sommes plus dans le lyrisme que dans la politique. Mais c'est bien aussi : le lyrisme, le rêve, il en faut. Dans le même ordre d'idées, je suis surpris par le mélange de l'assistance, des sensibilités : communiste, anarchiste, trotskiste. Mais pour ceux qui sont là, ces mots, auxquels je tiens, ont-ils un sens ? Il y a dix ans, au CLRIF, les lignes restaient encore plus ou moins visibles, entre un socialiste, un communiste et un trotskiste. Aujourd'hui, j'ai l'impression qu'il y a en partie pénétration, dilution. Je note aussi avec intérêt que ces trentenaires communistes libertaires viennent pour la plupart de familles communistes de stricte obédience.
C'est peut-être ça le coup de génie du NPA : avoir compris que la génération Krivine était condamnée à la marginalité, qu'il fallait tourner la page, assurer la relève des générations. La LCR y est parvenue, c'est difficile et rare en politique, le passage de relais. Je ne sais pas ce que ça donnera, on verra, mais c'est assez bien parti, quand on sait que la LCR végétait à l'état de quasi groupuscule.
Je reviens sur cette osmose au sein de la gauche radicale: un socialiste de notre aile gauche, hostile à la social-démocratie, pourra être séduit par Besancenot (j'en connais), de même qu'un communiste contestataire ou un anarchiste pas trop sectaire. Il y a quarante ans, le mélange des genres était inconcevable et ces militants s'affrontaient, y compris physiquement. Maintenant ils dansent ensemble. Je ne dis pas que c'est mal, c'est même plutôt sympa. Il vaut mieux se caresser que se taper sur la gueule. Mais je reste perplexe, je me demande s'il va en surgir politiquement quelque chose, et quoi.
Ce n'est pas que je craigne pour l'avenir de la social-démocratie. Avec ses élus, ses notables, ses réseaux dans la société civile, sa culture de gestion locale et de gouvernement national, elle est puissante et n'a rien à redouter du NPA ou d'une quelconque formation radicale. Ce que je crains en revanche, et très fort, c'est qu'une partie de l'électorat ne se cristallise dans une posture seulement protestataire, lyrique, désespérant de toute solution politique. Alors, la droite aurait de beaux jours devant elle. C'est pourquoi l'UMP présente aujourd'hui Olivier Besancenot comme son meilleur opposant, pour mieux shunter le Parti socialiste. Ça, je n'en veux pas.
Bonne journée.
34 Comments:
Je ne comprends pas votre démarche,
vous vous plainiez de l'interpénétration,
vous craigniez pour la SD
et dans le meme temps, vous financez cette politique.
Puisque je ne doute pas que vous avez pris la formule chili complete
avec apéro, chili, tarte et 1/4 vin pour 10€.
C'est sur que ce ne sont pas vos 10€ qui permettrons d'éradiquer la SD, mais ils y contribueront.
By grandourscharmant, at 2:08 PM
Non seulement j'ai pris la formule à 10 euros, mais j'ai pris l'apéro de départ (l'apéro avant l'apéro à table) et j'ai laissé en partant 10 euros pour que les communistes boivent à ma santé. Ma générosité me perdra politiquement.
Quant à la social-démocratie, si elle sait se renforcer, elle n'aura rien à craindre de personne. C'est plutôt d'elle-même, de ses incertitudes, de ses hésitations qu'elle devrait avoir peur.
By Emmanuel Mousset, at 2:40 PM
Meme si vous en avez les moyens,
on ne peut que s'incliner devant tant de générosité.
Le chili et la tarte étaient bons ?
Si vous voulez faire un peu d'exercice et qu'il vous reste un peu d'argent,
il doit y avoir une visite des hauteurs de la basilique à 18h.
Cela vous permettra d'avoir l'impression de dominer la ville.
By grandourscharmant, at 2:56 PM
Vous m'avez déjà tendu ce piège pendant l'été : m'inviter au sommet ... pour me précipiter dans le vide. Merci bien, je dois digérer mon chili.
By Emmanuel Mousset, at 3:52 PM
Aucun piège pour vous,
c'est juste que je suis prêt à parier que vous ne l'avez jamais fait.
By grandourscharmant, at 4:13 PM
Je ne ressens nullement le besoin de dominer quoi ou qui que ce soit. Et je n'aime pas discuter avec de vulgaires parieurs.
By Emmanuel Mousset, at 4:38 PM
prendre de la hauteur et du recul permet de mieux voir et de mieux comprendre les choses.
Il savoir prendre des risques et faire des paris dans la vie,
c'est ce que font les progressistes.
Il n'y a que les conservateurs pour avoir peur de prendre des risques et refuser de faire des paris.
Surtout que c'était un bien petit pari où les risques de se tromper étaient moindre.
By grandourscharmant, at 5:02 PM
Pour prendre de la hauteur, il me suffit de monter sur un escabeau.
By Emmanuel Mousset, at 6:33 PM
Forcément,
à votre échelle, la basilique,
c'est bien trop haut pour vous.
By grandourscharmant, at 6:58 PM
Je ne vais pas chercher une protection illusoire du côté du Ciel.
By Emmanuel Mousset, at 7:44 PM
Alors c'&tait comment le chili et la tarte ?
By Anonyme, at 8:43 PM
Le chili était délicieux, et j'ai officiellement félicité Corinne. Réussir un bon chili, ce n'est pas donné à n'importe qui. J'en ai repris trois fois, et j'ai résisté pour ne pas recommencer. La tarte aussi était bonne, faite maison j'en suis sûr. J'espère que ce n'était pas un "space cake", mais j'ai trouvé la soirée merveilleuse. J'ai presque failli signer le formulaire d'adhésion au PCF, qui était sous mon assiette. Je me suis tout de même repris.
By Emmanuel Mousset, at 9:31 PM
sans les cocos, la ville serait bien triste politiquement.
By hein biloute, at 10:30 PM
C'est vrai, ils apportent de la couleur, de la vie et de la sincérité.
By Emmanuel Mousset, at 9:17 AM
ce qui par opposition,
signifie que chez les socialistes,
il n'y a pas de couleurs,
pas de vie
et pas de sincérité.
By grandourscharmant, at 9:33 AM
Vous avez une drôle de logique. Ce n'est pas parce que les uns sont sincères que les autres ne le sont pas. Et l'opposition, pourquoi ne pas l'avoir faite avec la droite ?
By Emmanuel Mousset, at 1:48 PM
parce que tous les partis pensent et disent du mal des socialistes,
surtout les socialistes.
Le PS, les mal-aimés de la politique.
By grandourscharmant, at 3:38 PM
Les socialistes étant le seul parti en capacité de mettre en échec la droite, c'est logique qu'on l'attaque. L'hommage du vice à la vertu, en quelque sorte.
By Emmanuel Mousset, at 4:38 PM
Le PS n'est pas en capacité de mettre en échec la droite,
c'est pour cela que tous se battent pour l'héritage
alors que le cadavre n'est pas encore tout à fait mort.
By grandourscharmant, at 5:23 PM
Méfiez-vous des cadavres. Vous qui êtes un personnage digne d'un film d'horreur, vous savez que le monstre se relève à la fin et qu'on n'en a jamais fini avec lui. Faites de beaux cauchemars !
By Emmanuel Mousset, at 7:00 PM
Dans les films d'horreurs peut etre,
et si votre vie ressemble à un film d'horreur, j'en suis désolé pour vous.
Moi, il y a bien longtemps que je ne crois plus aux histoires de croque-mitaine.
J'en connais de bien plus terrifiante, qui elles sont réelles.
Les contes sont fait pour faire peur aux enfants,
le réel est bien plus terrifiant.
Pour les films d'horreurs,
il vous aura surement échappé qu'ils étaient le plus souvent sponsorisés par les ligues de vertu et prônaient l'abstinence.
By grandourscharmant, at 7:19 PM
Vous semblez être un connaisseur du genre. En vous regardant dans le miroir, vous vous y retrouvez.
By Emmanuel Mousset, at 8:56 PM
De nous deux,
c'est quand meme vous qu'on prend pour le frere de quasimodo.
C'est bien pour cela que vous refusez de monter dans la basilique,
de peur qu'on ne vous laisse plus ressortir et qu'on vous force à hanter les lieux.
By grandourscharmant, at 9:36 PM
Si je suis le frère de Quasimodo, alors vous êtes le fils d'Elephant Man. Ca tombe bien, le cirque Amar est dans la ville, allez leur proposer vos services. Les enfants adorent voir des monstres.
By Emmanuel Mousset, at 10:43 PM
Elephant man est un homme pas un animal et puis on ne choisit pas ses parents, ni ses enfants,
on fait avec.
J'imagine que ce n'est pas sans raison que vous avez fait le choix de ne pas avoir d'enfants,
les pauvres auraient pu vous ressembler.
By grandourscharmant, at 10:59 PM
Elephant Man est un homme puisqu'il s'appelle Elephant Man. Il n'empêche que vous devez avoir à peu près la même tête que lui.
Vous avez raison, je ne veux pas d'enfants car leur intelligence les ferait trop souffrir.
By Emmanuel Mousset, at 12:36 PM
L'intelligence ne fait pas souffrir contrairement à ce que croient les idiots.
By grandourscharmant, at 1:32 PM
L'intelligence fait souffrir quand on est entouré d'idiots.
By Emmanuel Mousset, at 3:39 PM
Souffrir des gens qui les entourent,
meme les idiots en sont victimes.
Satre
"l'enfer, c'est les autres"
By grandourscharmant, at 6:40 PM
Non, l'idiot est innocent, il ne se rend compte de rien.
By Emmanuel Mousset, at 6:48 PM
L'idiot se rend compte de tout,
mais il ne comprend rien.
By grandourscharmant, at 7:19 PM
Nous sommes d'accord. Ca n'en fait pas moins de lui un idiot.
By Emmanuel Mousset, at 8:25 PM
Et des idioties,
ça en fait les idiots.
By grandourscharmant, at 8:46 AM
C'est un expert qui s'exprime.
By Emmanuel Mousset, at 9:46 AM
Enregistrer un commentaire
<< Home