L'Aisne avec DSK

09 mai 2010

Jean-Claude Carrière.



Bonjour à toutes et à tous.


C'était hier au Salon du Livre et de la BD à Saint-Quentin, avec un beau plateau d'écrivains et de personnalités, dont une ancienne et toujours actuelle idole à moi : Jean-Claude Carrière. Quand j'étais ado, cet homme me fascinait. Sa voix très douce quand il passait chez Pivot, son élocution envoûtante, son immense savoir, tout ça, je le sentais, me rendait plus intelligent, me conduisait vers des domaines que j'ignorais et qui étaient fondamentaux. Carrière, comme beaucoup d'autres, a contribué à faire ce que je suis devenu. J'ai une sorte de dette envers lui.

Et puis, il y avait ses livres qui me passionnaient, ses scénarios avec Bunuel qui m'intriguaient, son étrange intérêt pour les hérésies chrétiennes dans le film La Voie Lactée. Jean-Claude Carrière représente pour moi le modèle de l'homme cultivé français, doté d'une curiosité et d'une culture universelles, tout le contraire du spécialiste borné, de l'universitaire rasoir ou de l'intellectuel pédant.

Donc hier il était là, à Saint-Quentin, dans le Palais de Fervaques, seul à son stand, devant ses ouvrages, et je n'osais pas aller le voir. Ce n'est pas que je sois particulièrement timide : j'aborde sans problème une personnalité politique ou une jolie femme, mais dans cette circonstance, à quelques mètres de Carrière, j'étais impressionné et par conséquent intimidé. Il y a une autre raison à mon hésitation : je n'aime pas faire le touriste, demander une dédicace. Carrière, je le connais sans avoir besoin de lui parler, par la lecture de ses ouvrages. Jouer à la midinette ou au fan, ce n'est plus de mon âge.

Mais je me suis dit : c'est quand même Jean-Claude Carrière, je n'aurais plus jamais l'occasion de le revoir, j'y vais. Et j'y suis allé ! Je ne l'ai pas regretté, c'était mon bonheur du week-end. Cette voix, ce visage, cette culture, c'était bien lui, pour de vrai comme disent les enfants. Toujours aussi charmant. Nous avons échangé quelques minutes. Je voulais savoir si ses investigations théologiques l'avaient entraîné vers une quelconque transcendance ou foi, cet athée m'a répondu que non mais que sa seule tentation pourrait être polythéiste, car plus conforme à la diversité du monde telle que nous la découvrons au fil de l'Histoire. J'ai pensé à ce mot de Bunuel, qui s'entend plus qu'il ne se lit : "Grâce à Dieu, je suis athée !" Carrière ne peut pas adhérer au monothéisme moralisateur chrétien, du moins tel qu'il le perçoit, mais il est attiré par la spiritualité (il m'a confié qu'il préparait un film sur le Dalaï Lama).

Je l'ai quitté en lui achetant un bouquin (en vignette). J'ai quand même bien fait de lui parler !


Bonne journée.