L'Aisne avec DSK

09 octobre 2010

L'adversaire le plus redoutable.


Bonsoir à toutes et à tous.


La photo, grande, en noir et blanc, est belle. L'homme est assis dans un fauteuil, jambes croisées, mains fermement réunies, sourire imperceptible, visage grave, avec un tableau derrière lui. Devant lui, car l'homme ne s'est pas mis au premier plan, c'est le buste de Marianne, symbole de la République, qui prend une bonne moitié de la place, comme si le symbole était plus important que l'homme. Cette photo est dans L'Aisne Nouvelle d'aujourd'hui, page 9 (voir vignette ci-dessus) ; l'homme, c'est le nouveau maire de Saint-Quentin, Xavier Bertrand.

Tout ce qui va se jouer désormais entre lui et nous, entre Bertrand et la gauche, est dans cette photo. Celui qui est là, posant devant les journalistes, respire le calme, la détermination et l'assurance. Pour ceux qui ne l'auraient pas encore compris, ce sera notre adversaire le plus redoutable. Pierre André avait des aspérités, des emportements, parfois des complicités, des faiblesses affectives, un côté malgré tout sentimental. Xavier Bertrand, c'est une bête politique, une machine de guerre, un bloc de marbre. Il sait ce qu'il veut, où il va, qui sont ses amis et ses adversaires. Pour la gauche, c'est l'adversaire le plus terrible.

De son entretien à L'Aisne Nouvelle, je n'ai strictement rien à dire. Avec Pierre André, il y avait souvent des coups de gueule ou des coups de griffe, des affirmations politiques assez fortes. Avec Xavier Bertrand rien, même en cherchant bien. Et c'est cette méthode (car c'en est une) qui le rend redoutable : c'est une savonnette ; mouillée, elle vous glisse entre les doigts ; mais sèche, elle vous fait très mal quand vous la recevez en pleine tête.

Cette méthode Bertrand, nous en avons eu une petite idée cette semaine, qui annonce les quatre ans qui viennent : continuité, présence, apolitisme. Xavier Bertrand le confirme : il n'y aura pas rupture avec le "système Pierre André". Pourquoi changer un système gagnant ? En retour, la gauche aurait tort de ne pas reconnaître la partie positive de ce bilan, sans renoncer bien sûr à préparer et à proposer son propre projet.

La présence, Bertrand n'a pas attendu d'être maire pour la pratiquer. C'est même sa marque de fabrique. On peut dire de lui tout le mal qu'on voudra, le gars est là, sur le terrain, à faire le job, à tel point qu'on se demande comment il s'y prend. Je ne donne pas cher de la peau de la gauche si elle ne bouge pas ses fesses et reste aussi "discrète". Les tambours de guerre pendant les séances du conseil municipal, c'est bien. Mais croire que tout se joue là, non certainement pas.

Enfin l'apolitisme : c'est amusant, c'est même un comble quand on est le patron de l'UMP. Mais je vous fiche mon billet que ça marchera auprès des Saint-Quentinois, hélas. C'est pourquoi la gauche doit se concentrer sur les dossiers locaux et pas en rester aux combats nationaux, aussi utiles et nécessaires soient-ils.

Il est quand même malin, le Bertrand. A la suite de l'interview avec Nassera Lounassi et Aurélien Walti, il répond aux questions d'Eric Leskiw sur la politique nationale et la réforme des retraites, sous ce titre : "Taxer plus le capital". C'est tout de même formidable ! On croirait entendre un homme de gauche. Mais Xavier Bertrand ne se veut-il pas le représentant de la "droite sociale", et personnellement "humaniste" de surcroît ? C'est le dernier piège qu'il nous tend, celui de la séduction. Autant vous dire que j'y suis totalement insensible, indifférent. Mais là aussi le charme peut opérer auprès des Saint-Quentinois, y compris de gauche. C'est pourquoi cet homme est notre adversaire le plus redoutable.


Bonne soirée.


6 Comments:

  • L'interview est intéressante au final même si les réponses sont très (auto)cadrées évitant tout débordement. Par contre, pourquoi diable ce E.L vient-il apporter sa patte alors que sa signature suffit à decrédibiliser l'ensemble de la page?

    By Anonymous stquentinois, at 10:52 PM  

  • C'est le partage des tâches entre la "départementale" et la "locale". Et puis, Bertrand a sans doute voulu avoir son mot à dire sur les retraites, puisque c'est d'actualité. Quant à ce que sont et font les journalistes, l'écrasante majorité des lecteurs n'en sait strictement rien. Je ne crois donc pas que la crédibilité soit en question.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:03 PM  

  • "De son entretien à l'Aisne Nouvelle je n'ai strictement rien à dire".
    Et comme dirait l'autre ce n'est pas parce qu'on à rien à dire qu'il faut fermer sa gueule.

    By Anonymous Anonyme, at 11:11 PM  

  • En politique, c'est même fortement recommandé. C'est pourquoi je m'étonne d'y rencontrer si souvent des muets.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:53 PM  

  • Et inversement on s'étonne d'y rencontrer des gens qui parlent pour ne rien dire.

    By Anonymous Anonyme, at 2:52 PM  

  • C'est un cas de figure beaucoup moins fréquent et certainement plus sympathique.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:20 PM  

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