L'Aisne avec DSK

23 janvier 2011

Ecole en détresse.

Bonjour à toutes et à tous.


Je reviens ce matin sur les manifestations d'hier en faveur de l'Education Nationale. Deux rassemblements ont eu lieu dans l'Aisne, auxquels j'ai participé, très différents l'un de l'autre. A Laon, devant la préfecture, ce sont surtout des militants syndicalistes qui se sont réunis, derrière le collectif très large "Un pays, une école, notre avenir" (voir billet d'hier). A Saint-Quentin, devant l'Hôtel de Ville, la tonalité était beaucoup plus politique, avec une forte présence communiste et paradoxalement assez peu de parents d'élèves, malgré le soutien affiché aux écoles David-et-Maigret et Kergomard, qui vont probablement fermées.

Dans ce genre de rencontres, j'aime écouter ceux qui sont là, ne rien dire spécialement, questionner, saisir une ambiance, des sentiments. Les politiques parlent trop, même si c'est leur métier. Je ressens parfois une overdose de discours, de mots, de chiffres, d'analyses. Il faut aller à l'essentiel, s'intéresser au vécu des gens, comment ils perçoivent et subissent une situation, ce qu'ils veulent réellement. Ce n'est pas si simple parce qu'il y a un côté très subjectif derrière tout ça. Nos responsables croient s'en sortir en faisant des démonstrations, en tenant des raisonnements. Mais l'inquiétude et la souffrance sont rebelles à toute forme de calcul.

Cette approche est d'autant moins évidente pour moi que je suis un enseignant heureux et enthousiaste, qui globalement n'a pas à se plaindre de son métier, qui y croit, qui ne désespère pas. Et comme je ne suis pas parent d'élève, j'ignore ce que peut être l'angoisse de l'avenir. Mais je n'ai jamais cru que faire de la politique consistait à prendre son cas pour une généralité. Au contraire, l'homme politique doit oublier sa propre personne et se fondre en quelque sorte dans la population. En même temps, il garde la distance qui lui permet de comprendre, de choisir et d'agir.

En discutant hier avec mes collègues, les parents, la directrice de David-et-Maigret, j'ai senti monter des réactions très variées : colère, crainte, incertitude, accablement, incompréhension, sentiment d'abandon ... Je résumerais tout ça par un mot très fort : détresse. Oui détresse, parce que les personnels et les parents ne savent plus très bien où va l'école, ne voient plus très bien quelle école on leur prépare. Détresse et désarroi, oui c'est ça. Car il y a contradiction entre ce qui se dit et ce qui se fait, les "valeurs" proclamées de notre société et la réalité :

D'un côté on célèbre la "transparence", de l'autre on a le sentiment de ne pas tout savoir sur la prochaine rentrée scolaire. D'une part on vante les vertus de la "proximité", de l'autre on ferme des écoles pour procéder à des regroupements. L'enseignement "personnalisé" est prôné à tous les niveaux mais les classes à faibles effectifs sont supprimées. L'Education Nationale, dans les discours, est mise en avant et des milliers de postes d'enseignants ne sont pas reconduits. Le métier est fréquemment l'objet d'éloges et pourtant sa formation n'est pas sérieusement assurée et les concours ont cessé d'être attractifs. Le budget de la nation consacré à l'école avale des sommes gigantesques et rien ne semble s'arranger : on parle d'illettrisme alors que l'école, depuis toujours, est chargée d'apprendre à lire et à écrire ; on évoque régulièrement la violence dans des établissement qui devraient être des havres de paix. Comment y comprendre quoi que ce soit ?

Bien sûr, les statistiques ne manquent pas pour avancer des arguments d'ordre démographiques ou comptables. Bien sûr les études sont nombreuses pour exposer des théories sociologiques. Mais on ne gouverne pas avec des statistiques ou de la sociologie. Il faut des objectifs, les citoyens attendent des finalités, des directions et pas des directives dont le sens échappe. Où va l'école ? Que veut-on en faire ? Les réponses sont impératives. D'année en année, de rentrée scolaire en rentrée scolaire, de budget en budget, on nous assomme de justifications là où l'on voudrait, parents et enseignants, des explications et des motivations. Si le choix a été fait d'abandonner l'école publique, qu'on le dise clairement. Si la volonté est de la transformer, qu'on dise en quoi et pourquoi. Pour le moment, personne ne sait, la détresse et le désarroi viennent de là.

En la matière, la gauche a une responsabilité particulièrement importante. Elle doit reconquérir sa base enseignante, qui l'a en partie désertée. Elle doit faire oublier certains épisodes fâcheux et avancer des propositions fortes, un véritable projet pour l'école. Au PS, Bruno Julliard fait un énorme et intelligent travail là-dessus. Pour moi, quelques principes simples doivent nous guider : ne pas avoir la nostalgie de l'école d'autrefois qui, dans son grand mérite, n'était pas toujours jolie jolie ; n'oublier personne, personnels, élèves, parents, quelle que soit la réforme ; rappeler que l'école est une cause nationale, que son service est public, que son but est formateur et émancipateur. Il faut que la détresse d'école laisse place à une promesse d'école.


Bon dimanche.

4 Comments:

  • Rien compris , trop compliqué et pourquoi renier une école qui a fait les français des trente glorieuse ....

    By Anonymous Anonyme, at 1:05 PM  

  • Je ne renie rien puisque je reconnais que l'école du passé a eu un "grand mérite" (sic). Mais je ne veux pas vivre dans la nostalgie : l'école elle aussi doit évoluer. Est-ce que ça vous le comprenez ? A moins que ça ne soit encore trop compliqué ... Mais là je ne peux plus rien pour vous.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 1:35 PM  

  • Alea jacta est !!

    l'EN est effectivement compliquée .... TROP compliquée , alors pourquoi ne pas reformer en structures par réseaux ???

    By Anonymous Anonyme, at 3:19 PM  

  • Oui, comme ça ce sera encore plus compliqué ...

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 7:11 PM  

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