L'Aisne avec DSK

15 janvier 2011

Je n'aime pas les fachos.

Bonsoir à toutes et à tous.


Le Pen quitte ce week-end la direction du FN. La première fois que je l'ai vu, à la télé, j'avais treize ans, c'était en 1974, pour les présidentielles : un bandeau sur l'oeil, la mâchoire carrée, l'arrogance plein la bouche, une gueule de facho comme on n'en voit que dans les films de Mocky ou de Costa-Gavras. Le discours le confirmait : "un million de chômeurs, c'est un million d'immigrés en trop", voilà la saloperie, le mensonge que ce producteur de disques néo-nazis, ce milliardaire héritier des ciments Lambert dans des conditions pas claires, ce tortionnaire de l'Algérie française bavait, éructait sur le petit écran. Sa flamme tricolore me foutait un peu la pétoche. De bout en bout, c'était vraiment le style facho, et Le Pen, le type qu'on prenait plaisir à haïr. Je dois avouer que ce plaisir ne m'a jamais quitté.

Sauf qu'à l'époque, dans les années 70, tout le monde en convenait et le Front national faisait moins de 1% aux élections. En 1981, il ne parvenait même pas à réunir les 500 signatures pour se présenter à la présidentielle. On m'aurait dit alors que cet aventurier, ce délinquant de la politique, ferait un jour 17% à une élection présidentielle et battrait le candidat socialiste, j'aurais ri et pris pour folie une telle divagation. On connaît la suite. Mais je ne comprends toujours pas aujourd'hui qu'un prolo, une employé, un chômeur puissent voter pour Le Pen. Il ne peut rien, absolument rien leur apporter.

Pourtant, j'avais compris que les "idées" du FN (racisme, nationalisme, ultra-libéralisme) étaient plus répandues que ne le laissaient croire ses scores électoraux insignifiants. Même à gauche, je savais que ces pulsions morbides existaient. De là à imaginer qu'elles puissent un jour constituer un électorat, porter à un haut niveau le parti d'extrême droite et s'installer durablement dans le paysage politique français, non.

Bien sûr, je peux me réjouir que Le Pen ait raté tout ce qu'il a entrepris, que ce n'est qu'un batteleur de foire, un Mussolini d'opérette. Sauf que sa présence et son influence dans notre vie publique ont été délétères, une honte pour notre pays. Les électeurs de Le Pen n'ont pas de quoi être fiers. Je regrette qu'on les ait déresponsabilisés et parfois justifiés dans leur vote. Car les fautifs, au bout du compte, ce sont eux. Le Pen aurait dû demeurer le chefaillon d'un groupe d'extrémistes et de marginaux, pas le personnage reconnu et important qu'il est devenu. Quand je vois les scores que prédisent encore aujourd'hui les sondages à sa fille, je suis horrifié.

Je critique beaucoup l'extrême gauche sur ce blog, parce que la situation saint-quentinoise m'y conduit malgré moi. Mais je n'ai jamais renvoyé dos à dos, encore moins confondu extrême droite et extrême gauche. La formule qui veut que "les extrêmes se rejoignent" est stupide et dégueulasse. Si le choix, très théorique, était à faire, pas d'hésitation : pour l'extrême gauche, contre l'extrême droite. De même que j'ai voté Chirac contre Le Pen en 2002 sans rien regretter du tout. Le fascisme, même déguisé en clown, c'est la vermine.

Je veux terminer par deux anecdotes personnelles. En 1997, j'étais assesseur à Paris, dans le XIXème arrondissement, pour les élections législatives. Avec moi, il y avait un assesseur du FN, gentil garçon mais facho quand même. Je ne lui ai pas adressé la parole de la journée. Mais ce qui m'a le plus surpris, c'est quand il a offert aux membres du bureau des chocolats, avec un sourire et une générosité qui l'ont rendu très vite sympathique à tous. Sauf à moi, qui ai continué à lui faire ma sale gueule. En politique, on ne se méfie jamais assez des gens qui vous sourient, ce sont les plus dangereux.

Aux cantonales de 2005, à Saint-Quentin, le dimanche du second tour, je surprends deux gus du FN en train de déchirer mon affiche accolée sur le panneau près du pont de Rouvroy : j'arrête ma voiture et je leur gueule dessus. Ils déguerpissent mais ça ne me suffit pas : je les poursuis en bagnole, à la façon Starsky et Hutch. Je sais, c'est idiot, mais c'est plus fort que moi : j'ai horreur qu'on déchire mes affiches électorales. Après cinq minutes de poursuite dans le quartier, ils se sont réfugiés dans un appartement et le rodéo s'est terminé. Que voulez-vous, je n'aime pas les fachos.


Bonne soirée.

6 Comments:

  • Vous dîtes que le Front National est ultra-libéral alors qu'il est pour un retour aux francs et la sortie de l'UE, soit une économie en autarcie.

    By Blogger Arthur Nouaillat, at 9:06 PM  

  • Et puis votre anecdote ça doit pas être en 2005 mais plutôt en 2004 .. non?

    By Blogger Arthur Nouaillat, at 9:08 PM  

  • 1- Ultra-libéral dans le cadre strictement national, oui bien sûr. Mais ultra-libéral quand même, dénonçant le "fiscalisme", admirant en son temps la politique de Reagan.

    2- 2004, 2005, 2006 c'est possible, je ne m'en souviens pas, le temps passe si vite, et puis je m'en fous : je ne fais pas dans le détail, je cherche seulement à être compris quant au fond, sur les idées.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:24 PM  

  • vous devriez vous posez la question pour quelle raison les citoyen preferent votez pour le front national.depuis toujours le ps et l u m p roule dans la farine le peuple ce qui les interresse ce sont les indemnitees et le pouvoir regarder le nombre de chomeur dans notre ville

    By Anonymous Anonyme, at 12:13 AM  

  • Et vous, un prolo,
    vous pouvez lui apporter quoi ?

    By Anonymous Anonyme, at 1:02 AM  

  • Quand la gauche procapitaliste (autrement dit le PS et ses alliés carriéristes: PCF, Verts etc...) ne fait pas son boulot, quand une fois élue cette gauche-là mène une politique de droite (privatisations à outrance, cadeaux fiscaux aux patrons licencieurs et délocalisateurs, abandon d'une véritable vision socialiste et sociale de la société etc...), comment s'étonner alors que des électeurs affaiblis par le capitalisme aient envie de voter pour le FN, qu'ils imaginent à tort comme leur "sauveur" ?
    Le parti socialiste a une lourde responsabilité dans l'ascension des Le Pen. Et si DSK, votre gourou affameur des peuples, est candidat en 2012, je crains fort que le scénario du 21 avril 2002 ne se renouvelle.

    By Anonymous Anonyme, at 3:49 PM  

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