Les trois révolutions.
Bonjour à toutes et à tous.
La grave défaite de la gauche aux présidentielles et la large victoire de Nicolas Sarkozy ne s'expliquent pas fondamentalement par la personnalité des candidats ou la tenue de leurs campagnes, mais par trois raisons, trois ruptures, trois révolutions culturelles qui ont affecté la société française ces dernières années:
1- La révolution de l'argent.
Vieux pays catholique, pétri de communisme égalitaire, société aristocratique pendant des siècles, les français ont eu longtemps un préjugé négatif envers l'argent. La droite n'en parlait pas, la gauche se battait pour l'amélioration des salaires, mais collectivement, dans un but de solidarité. Ces dernière années, le complexe des français à l'égard de l'argent s'est considérablement atténué. On en parle, on boursicote, on joue avec lui et pour lui dans les bistrots, on regarde à la télé les émissions qui font rêver d'argent et parfois en gagner. L'effacement structurel et culturel de l'Eglise catholique et du Parti communiste, qui condamnaient l'argent, est pour beaucoup dans la réhabilitation de celui-ci. A quoi s'ajoute l'américanisation de nos moeurs depuis près d'un siècle, mais qui s'est accentuée depuis une trentaine d'année.Résultat: quand les français entendent Sarkozy leur proposer de "travailler plus pour gagner plus", c'est la fin de la formule qui les interpelle.
2- La révolution de la pauvreté.
Le catholicisme donnait du pauvre une image très positive. Le communisme a pris la relève avec la figure du prolétaire, l'exploité qui se révolte. D'où une volonté, ancrée dans la culture nationale, de secourir le malheureux et de dénoncer "les gros". Ces dernières années, il y a eu là aussi retournement de l'opinion. Le riche est perçu de façon plus indulgente, sa situation est renvoyée à ses mérites et qualités. Le pauvre en revanche ne soulève plus vraiment la pitié, sauf l'extrême miséreux. Les pauvres sont considérés, d'un mauvail oeil, comme des "assistés", terme extrêmement négatif alors qu'il ne fait que désigner ceux que la société protège parce qu'ils ne le peuvent pas d'eux-mêmes. La dénonciation de l'assistanat, longtemps réservée à la droite, est devenu un réflexe généralisé, y compris chez des militants très à gauche. La droite a gagné sur ce point une immense bataille culturelle.
3- La révolution de la famille.
La famille a longtemps été vécue comme une fatalité biologique et une nécessité sociale. Aujourd'hui, les enquêtes le montrent, elle est perçue comme la première condition du bonheur et le résultat d'un libre choix. Elle est donc surévaluée par rapport au passé. Même les homosexuels veulent fonder une famille! Parallèlement, le couple et le mariage sont en crise, puisque près de la moitié débouche sur la séparation. Plus le couple se délite, plus la famille doit se renforcer, puisque le premier est le pivot du second. Si le rapport homme-femme (le couple) devient de plus en plus problématique et relâché, le rapport parents- enfants (la famille) se resserre et est valorisé. Voyez le succès sociologique du film Tanguy. Or, ce qui fait la valeur d'une chose, surtout dans notre société, c'est l'argent. Il n'est donc pas surprenant que la proposition la plus réactionnaire de Sarkozy, la quasi suppression des droits de succession, soit aussi la plus populaire.
Que doit maintenant faire la gauche, qui culturellement critiquait l'argent, soutenait les pauvres et contestait la famille? A ce stade de ma réflexion personnelle, je n'en sais trop rien, j'en suis plutôt au diagnostic, pas vraiment encore aux remèdes. Ce que je sais, c'est que désormais plus rien ne sera comme avant et que la gauche ne peut plus être la même, tout en devant rester la gauche: pas facile!
Bonne matinée.
La grave défaite de la gauche aux présidentielles et la large victoire de Nicolas Sarkozy ne s'expliquent pas fondamentalement par la personnalité des candidats ou la tenue de leurs campagnes, mais par trois raisons, trois ruptures, trois révolutions culturelles qui ont affecté la société française ces dernières années:
1- La révolution de l'argent.
Vieux pays catholique, pétri de communisme égalitaire, société aristocratique pendant des siècles, les français ont eu longtemps un préjugé négatif envers l'argent. La droite n'en parlait pas, la gauche se battait pour l'amélioration des salaires, mais collectivement, dans un but de solidarité. Ces dernière années, le complexe des français à l'égard de l'argent s'est considérablement atténué. On en parle, on boursicote, on joue avec lui et pour lui dans les bistrots, on regarde à la télé les émissions qui font rêver d'argent et parfois en gagner. L'effacement structurel et culturel de l'Eglise catholique et du Parti communiste, qui condamnaient l'argent, est pour beaucoup dans la réhabilitation de celui-ci. A quoi s'ajoute l'américanisation de nos moeurs depuis près d'un siècle, mais qui s'est accentuée depuis une trentaine d'année.Résultat: quand les français entendent Sarkozy leur proposer de "travailler plus pour gagner plus", c'est la fin de la formule qui les interpelle.
2- La révolution de la pauvreté.
Le catholicisme donnait du pauvre une image très positive. Le communisme a pris la relève avec la figure du prolétaire, l'exploité qui se révolte. D'où une volonté, ancrée dans la culture nationale, de secourir le malheureux et de dénoncer "les gros". Ces dernières années, il y a eu là aussi retournement de l'opinion. Le riche est perçu de façon plus indulgente, sa situation est renvoyée à ses mérites et qualités. Le pauvre en revanche ne soulève plus vraiment la pitié, sauf l'extrême miséreux. Les pauvres sont considérés, d'un mauvail oeil, comme des "assistés", terme extrêmement négatif alors qu'il ne fait que désigner ceux que la société protège parce qu'ils ne le peuvent pas d'eux-mêmes. La dénonciation de l'assistanat, longtemps réservée à la droite, est devenu un réflexe généralisé, y compris chez des militants très à gauche. La droite a gagné sur ce point une immense bataille culturelle.
3- La révolution de la famille.
La famille a longtemps été vécue comme une fatalité biologique et une nécessité sociale. Aujourd'hui, les enquêtes le montrent, elle est perçue comme la première condition du bonheur et le résultat d'un libre choix. Elle est donc surévaluée par rapport au passé. Même les homosexuels veulent fonder une famille! Parallèlement, le couple et le mariage sont en crise, puisque près de la moitié débouche sur la séparation. Plus le couple se délite, plus la famille doit se renforcer, puisque le premier est le pivot du second. Si le rapport homme-femme (le couple) devient de plus en plus problématique et relâché, le rapport parents- enfants (la famille) se resserre et est valorisé. Voyez le succès sociologique du film Tanguy. Or, ce qui fait la valeur d'une chose, surtout dans notre société, c'est l'argent. Il n'est donc pas surprenant que la proposition la plus réactionnaire de Sarkozy, la quasi suppression des droits de succession, soit aussi la plus populaire.
Que doit maintenant faire la gauche, qui culturellement critiquait l'argent, soutenait les pauvres et contestait la famille? A ce stade de ma réflexion personnelle, je n'en sais trop rien, j'en suis plutôt au diagnostic, pas vraiment encore aux remèdes. Ce que je sais, c'est que désormais plus rien ne sera comme avant et que la gauche ne peut plus être la même, tout en devant rester la gauche: pas facile!
Bonne matinée.
3 Comments:
Ton diagnostic est très intéressant. Il précise bien les évolutions et sur quoi doit réfléchir la gauche. Tu constateras sousjacemment que c'est une raison du glissement de la gauche pure et dure vers une gauche social democrate.
Sarkozy en pronant " travailler plus pour gagner plus" a tapé dans le mille! En effet, maintenant le travail et l'argent sont étroitement liés beaucoup plus que par le passé où c'était plutôt l'initiative, l'intelligence et l'action qui étaient porteurs de richesses! Il y a toujours néanmoins le rêve de gagner de l'argent facilement sans travailler ( la folie voire l'addiction aux jeux d'argent, le développement des placements boursiers sont là pour le prouver) mais il ne s'agit que d'un rêve et même d'un cauchemar pour certains!
Le problème en France et dans quelques pays riches européens est qu'il n'y a pas de culture de l'effort. Le travail nécessite un effort important, il faut s'obliger à des horaires, il faut s'astreindre à compléter sa formation, il faut sacrifier du temps libre. Le travail aliène la liberté mais donne les moyens d'en acquérir, c'est assez contradictoire. A quoi sert le temps libre si on n'a pas les moyens d'occuper ce temps!?
Tu évoques l'assistanat, un homme de gauche ne peut ignorer ceux qui restent sur le bord du chemin mais c'est insuffisant. Aujourd'hui sous l'impulsion de la gauche, les aides financières existent mais elles ne peuvent en aucun cas insérer dans la vie active (trop d'associations bidons et sous performantes!!). Il est impératif qu'un parti de gauche soutienne les plus faibles mais les oblige (il faut recrééer le sens de l'effort) à reprendre une activité sociale ( par exemple avec des entreprises intermédiaires qui verseraient les prestations en échange d'une participation active à la vie de la collectivité..). Seuls ceux qui sont dans l'incapacité physique ou mentale d'exercer une activité en serait dispensé. Je reviens à la conception sociale des amazoniens où tout est échange de biens et de services...
C'est par l'effort que l'homme peut progresser.
MD
By md, at 11:04 AM
Évidement, l'idéal étant de travailler moins et de gagner plus. C'est assez difficile à réaliser... mais on court le risque en travaillant moins de passer pour un feignant, surtout si on n'a plus d'argent... la valeur d'usage d'une chose est indépendante de sa valeur vénale, l'argent conserve sa valeur propre car il permet d'acheter, et surtout d'effacer la marque infâme de pauvre en affichant son pouvoir d'achat. La gauche doit aller encore plus à droite, et à force de tourner à droite elle finira par se retrouver à gauche. Faite l'expérience sur un rond point pour vous en convaincre, à vélo de préférence. Ceci pour dire que par la grâce de l'élection présidentielle qui oblige à un face à face entre deux personnes et deux projets, c'est la solution qui offre le meilleur pouvoir d'achat qui l'emporte. Pour la prochaine élection, c'est créer de nouvelles entreprises qui offriront de bons salaires et payera la dette qui sera l'argument principal. Si jamais Nicolas Sarkozy s'en empare avant et le réalise, on le verra cinq ans supplémentaires à la TV.
By jpbb, at 11:45 AM
A Michel:
Il y a au moins une mesure gouvernementale que je soutiens car elle va dans le sens d'une aise sociale favorisant la réintégration dans le monde du travail, c'est le RSA (revenu de solidarité active, se substituant au RMI), défendu par Martin Hirsch... un homme de gauche.
A Jean-Pierre:
Travailler moins et gagner plus, c'est une réalité pour les plus fortunés (et tant mieux pour eux, mais ce n'est pas une situation exemplaire!). Je me souviens d'un entretien avec Coluche dans le magazine "Actuel", où notre humoriste national affirmait qu'avec l'argent gagné, il pouvait sans difficulté vivre jusqu'à la fin de ses jours sans travailler.
By Emmanuel Mousset, at 1:06 PM
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