L'Aisne avec DSK

23 septembre 2007

Entre Val et Valls.

Le Parlement a commencé cette semaine à examiner le projet de loi sur l'immigration, qui ne sert strictement à rien et n'apporte aucune disposition fondamentalement nouvelle, sinon quelques aménagements techniques destinés à rendre plus difficile le regroupement familial. Alors, pourquoi une nouvelle loi sur l'immigration puisque plusieurs ont été adoptées il n'y a pas si longtemps? La réponse est très simple, pas de mystère, pas de secret: le gouvernement se doit de satisfaire une partie de son électorat, d'extrême droite, qui a permis à Nicolas Sarkozy de devenir président de la République en abandonnant dès le premier tour sa fidélité à Le Pen. Ce que la politique d'ouverture signifie en direction de l'électorat de gauche devenu sarkozyste, la politique d'immigration le signifie aussi en direction des ex-frontistes. La droite remercie ceux qui l'ont porté au pouvoir en leur faisant cadeau d'un thème qui les excite.

Avec l'ouverture, cette stratégie est dérisoire et sans conséquence, récupérant quelques socialistes égarés. Mais en ce qui concerne l'immigration, c'est autrement plus grave, la droite joue avec le malheur des gens, de ceux qui ont parfois tout quitté, qui ont fui la misère pour tenter leur chance en France. De ce point de vue, comme le rappelle Philippe Val dans Charlie-Hebdo de cette semaine, "l'immigration est un de ces sujets où gauche et droite ne peuvent ni ne doivent pas tomber d'accord", et il explique la différence:

"La droite caresse secrètement le vieux rêve que les européens referont un jour suffisamment d'enfants pour rétablir un niveau démographique que seule l'immigration maintient" alors que "pour la gauche, il est clair que l'immigration est un phénomène qu'il faut certes maîtriser, mais qui est souhaitable, désirable, et pour les émigrants, et pour les pays d'accueil".

Au passage, Philippe Val égratigne un camarade dont le parcours ces dernières semaines m'intéresse et dont je partage souvent les analyses et propositions, Manuel Valls, que Val qualifie perfidement d' "excellent exemple de la droite humaniste et honnête". Quand on est socialiste, ce n'est pas un compliment! Pourquoi cette remarque acide? Parce que Valls a affirmé récemment que l'immigration devait être un objet de consensus entre la gauche et la droite.

J'en pense quoi? J'en pense que je suis embêté... Philosophiquement, je suis d'accord avec Val, la droite défend un modèle de société homogène, une conception restrictive du vivre ensemble qu'elle appelle "identité nationale", alors que la gauche est favorable à une société cosmopolite, métissée, ouverte sur le monde. Mais politiquement, je suis d'accord avec Valls: l'immigration est devenue un point de fixation largement fantasmatique, qu'il faut ramener à sa dimension rationnelle et réinscrire dans une perspective humaniste, en l'arrachant aux phobies de l'extrême droite et en essayant d'en faire un sujet de compromis. Mais c'est très mal parti, avec cet amendement odieux sur le test ADN.

Je vais manger un morceau et je vous en reparle.

A tout à l'heure.

2 Comments:

  • Entre Val et Valls je choisis Val parce qu'il est impossible de savoir ou se situe Valls. J'ai rarement vu un telle girouette politique tour à tour Jospinien hollandais ségoliniste NPS etç etç.Tu parlais recemment de Fillon comme d'un nul mais ou est la profondeur dans la pensée de Valls.Je la cherche .C'est bien lui qui resasse tjrs cette idée usée jusqu'a la corde de changement du "logiciel "du PS et de changer de nom? Heureusement le PS n'est pas un logiciel.

    By Anonymous Anonyme, at 8:22 PM  

  • Sur le "logiciel" (terme utilisé aussi par DSK et quelques autres), je suis d'accord avec toi. Le socialisme n'est pas un programme informatique mais une pensée vivante. Ceci dit, chacun voit bien ce que ceux qui emploient ce mot veulent dire: il faut rénover notre pensée.

    Sur Valls, je constate avec toi ses revirements, mais il n'est pas le seul: regarde Peillon, Montebourg, sur une ligne très à gauche et qui se sont ralliés très vite à Ségolène Royal. Sans même parler de Fabius, qui là dessus remporte le pompon: 20 ans de social-libéralisme et maintenant porte parole de l'aile gauche! En revanche, ce que j'admire chez DSK, c'est la remarquable stabilité et continuité de sa pensée.

    Par tempérament, je suis porté à l'indulgence. Peu importe le passé des uns et des autres, ce qui compte, c'est ce qu'ils proposent pour le présent et pour l'avenir. Jusqu'à maintenant, Valls n'avait pas attiré mon attention et l'âge n'est pas pour moi un argument. Mais quand je l'écoute et je le lis, je me sens depuis quelques semaines seulement proche de lui (en gros).

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:37 PM  

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