Les remous de la retraite.

Bonjour à toutes et à tous.

MD, dans son commentaire d'hier soir, m'interpelle sur mon soutien à Manuel Valls et à ses propositions dans Les Echos du même jour, en considérant que c'est un programme de droite et du Medef. Quelques remarques à ce sujet:

1- On est toujours à droite de quelqu'un. Quand il m'arrive de discuter avec des trotskystes lambertistes, ils ne sont pas loin de considérer Besancenot comme de centre-droit, ils lui dénient en tout cas tout caractère révolutionnaire.

2- Droite et gauche sont des "étiquettes", comme le fait remarquer VAL ce matin, ce qui compte, c'est ce qu'on met dans le bocal. Aligner les régimes spéciaux sur le régime général des fonctionnaires, parce que certains acquis sociaux qui se justifiaient autrefois n'ont plus le même sens aujourd'hui, parce que l'égalité des situations est souhaitable, parce que la retraite par répartition est menacée si son financement n'est pas assurée, est-ce un raisonnement de droite ou de gauche? Un homme de gauche doit-il y renoncer parce qu'un homme de droite y adhère? Pour moi, l'essentiel en politique est de servir la population au nom de certaines convictions.

3- Faire "un bout de chemin" avec la majorité que les français se sont donnés aux présidentielles et législatives est-il scandaleux? Non. L'important, c'est agir pour ce qu'on croit être la vérité, et en toute sincérité. Dans les années 70, Giscard avait mis en place la "décrispation". A cette époque préhistorique, il était inconcevable que des hommes de droite et de gauche se rencontrent à un très haut niveau pour discuter politique. Je vais vous raconter une anecdote amusante et incroyable. Il y a quelques années, secrétaire de la section socialiste, je participais à l'inauguration d'une fête foraine. Il se met à pleuvoir, un responsable de l'UMP, Monsieur Savelli, maire-adjoint et collègue de travail, propose de m'abriter sous son parapluie (il pleuvait fort!). Un journaliste prend une photo, publiée dans le journal local avec un titre marrant, du genre "droite et gauche sous un même parapluie". Que n'avais-je pas fait! Des camarades m'ont reproché, avec le plus grand sérieux, cette "faute politique". Je sais bien que l'humour n'est pas la première qualité des socialistes saint-quentinois, mais tout de même...

4- Qu'on me comprenne bien: droite et gauche n'ont pas disparu, ce sont deux projets différents et même opposés, la démocratie consiste à choisir entre l'un et l'autre. Que cela soit très clair! Je combats sur ce blog, vous le savez bien, la politique de Nicolas Sarkozy, avec laquelle je suis extrêmement sévère parce que cette politique me semble très néfaste. Son déséquilibre en faveur des plus fortunés, à grands coups d'exonérations fiscales de toute sorte, est socialement injuste et économiquement inefficace. Cette position très ferme doit-elle m'interdire de soutenir certaines mesures quand elle me paraissent justes? Bien sûr que non. D'autant qu'en matière de retraites, si j'approuve la réforme des régimes spéciaux, je désapprouve la méthode, qui ignore la négociation, exclut toute discussion sur la "pénibilité", n'envisage aucun nouveau financement précis des retraites et, plus généralement, ne propose aucun nouveau progrès social pour les salariés.

5- Dans cette affaire, le PS se déchire, une fois de plus, et sur une question politique fondamentale: Valls et Montebourg sont pour la réforme, Mélenchon et Bartolone sont contre. On fait quoi et comment? La situation est devenue impossible, nous perdons toute crédibilité aux yeux des français, les textes précédents que nous avons statutairement adoptés n'aident pas à trancher. Et pourtant, il est urgent de se positionner. Deux solutions: une majorité se dégage clairement au PS dans un sens ou dans un autre, mais il faut passer par un congrès, qui est normalement prévu... l'an prochain. Ou alors, les socialistes créent deux partis, un d'inspiration social-démocrate, l'autre d'inspiration anticapitaliste, chacun se présent aux élections sous son étiquette et ce sont les électeurs qui tranchent.


Bonne matinée.