C'est grave docteur?
Bonjour à toutes et à tous.
J'apprends dans L'Aisne Nouvelle que les médecins généralistes de la circonscription de Saint-Quentin sont 8 pour... 15000 habitants. Oui, vous avez bien lu! Pour pallier à cette pénurie, un médecin préconise la création de "maisons médicales", qui regrouperaient plusieurs professionnels de la santé. Si je comprends bien, on ferait en milieu rural ce qui a été fait dans les années 70 en milieu urbain avec les cabinets collectifs de médecins.
Dans le même temps, je suis de près la grève des internes de médecine, qui a mis dans la rue pas mal de monde il y a un peu moins de 15 jours. J'avoue ma circonspection. D'un côté, le mouvement a toute ma sympathie: des toubibs qui manifestent, ce n'est pas tous les jours qu'on voit ça! La profession reste sociologiquement marquée à droite et par une conscience bourgeoise de classe. Or, aujourd'hui, une partie du corps médical dénonce le système des franchises et donc la politique sanitaire de Nicolas Sarkozy. D'un autre côté, je suis surpris et méfiant envers la radicalité de certains slogans, qui ne sont évidemment pas faux mais qui appartiennent à un lexique plutôt proche de l'extrême gauche, comme la dénonciation d'une "médecine à deux vitesses" (je n'ai jamais très bien compris ce que venait faire la "vitesse" en matière de santé) ou d'une médecine "pour les riches et pour les pauvres". J'ai toujours pensé que l'exagération ou la caricature nuisaient à la crédibilité et à l'efficacité d'une cause.
Mais il y a plus étrange (sur les abus de langage, je suis prêt à passer l'éponge): le mouvement des internes lutte contre le projet dit de "démographie médicale", c'est-à-dire, en rapport avec ce que j'évoquais au début, la volonté de mieux répartir sur le territoire l'offre de médecine générale. Les internes refusent toute contrainte, ils veulent que leur profession demeure "libérale". C'est là où il y a un hic (pour moi en tout cas): d'un côté, la radicalité des slogans, un progressisme pur et dur, une forme d'idéalisme, le souci de la collectivité, de l'autre, la préservation d'une tradition "libérale", un réflexe corporatiste, une perspective purement individualiste. C'est peut-être ce que Marx appelait une "contradiction de classe" ou un hiatus entre le discours théorique et la réalité économique et sociale.
Dans Le Monde du 9 octobre, Martial Olivier-Koehret, président de MG France, un syndicat de généralistes, écrit des choses très justes, après avoir dénoncé l'injustice des franchises et l'illusion de l'automédication (si on pouvait se soigner soi même, cela se saurait; mais l'idée flatte l'individualisme contemporain): "la médecine générale et les soins primaires constituent la pierre angulaire d'un vrai système de santé". Un bon généraliste, si possible le même et qui vous suit régulièrement, voilà le secret de l'efficacité médicale, et pas prioritairement les économies budgétaires ou la "responsabilisation" des patients. Notre société hautement technologique a fait de la spécialisation une vertu cardinale, au détriment de l'approche "générale". C'est à nouveau une illusion. Le général, en médecine comme dans la culture, est premier et fondateur. La spécialité doit être l'exception. Il faut redonner vigueur et noblesse à la dimension "généraliste" de la médecine ( et je pourrais en dire de même pour le monde de l'enseignement). C'est un débat politique aux soubassements philosophiques.
Bonne fin de matinée.
J'apprends dans L'Aisne Nouvelle que les médecins généralistes de la circonscription de Saint-Quentin sont 8 pour... 15000 habitants. Oui, vous avez bien lu! Pour pallier à cette pénurie, un médecin préconise la création de "maisons médicales", qui regrouperaient plusieurs professionnels de la santé. Si je comprends bien, on ferait en milieu rural ce qui a été fait dans les années 70 en milieu urbain avec les cabinets collectifs de médecins.
Dans le même temps, je suis de près la grève des internes de médecine, qui a mis dans la rue pas mal de monde il y a un peu moins de 15 jours. J'avoue ma circonspection. D'un côté, le mouvement a toute ma sympathie: des toubibs qui manifestent, ce n'est pas tous les jours qu'on voit ça! La profession reste sociologiquement marquée à droite et par une conscience bourgeoise de classe. Or, aujourd'hui, une partie du corps médical dénonce le système des franchises et donc la politique sanitaire de Nicolas Sarkozy. D'un autre côté, je suis surpris et méfiant envers la radicalité de certains slogans, qui ne sont évidemment pas faux mais qui appartiennent à un lexique plutôt proche de l'extrême gauche, comme la dénonciation d'une "médecine à deux vitesses" (je n'ai jamais très bien compris ce que venait faire la "vitesse" en matière de santé) ou d'une médecine "pour les riches et pour les pauvres". J'ai toujours pensé que l'exagération ou la caricature nuisaient à la crédibilité et à l'efficacité d'une cause.
Mais il y a plus étrange (sur les abus de langage, je suis prêt à passer l'éponge): le mouvement des internes lutte contre le projet dit de "démographie médicale", c'est-à-dire, en rapport avec ce que j'évoquais au début, la volonté de mieux répartir sur le territoire l'offre de médecine générale. Les internes refusent toute contrainte, ils veulent que leur profession demeure "libérale". C'est là où il y a un hic (pour moi en tout cas): d'un côté, la radicalité des slogans, un progressisme pur et dur, une forme d'idéalisme, le souci de la collectivité, de l'autre, la préservation d'une tradition "libérale", un réflexe corporatiste, une perspective purement individualiste. C'est peut-être ce que Marx appelait une "contradiction de classe" ou un hiatus entre le discours théorique et la réalité économique et sociale.
Dans Le Monde du 9 octobre, Martial Olivier-Koehret, président de MG France, un syndicat de généralistes, écrit des choses très justes, après avoir dénoncé l'injustice des franchises et l'illusion de l'automédication (si on pouvait se soigner soi même, cela se saurait; mais l'idée flatte l'individualisme contemporain): "la médecine générale et les soins primaires constituent la pierre angulaire d'un vrai système de santé". Un bon généraliste, si possible le même et qui vous suit régulièrement, voilà le secret de l'efficacité médicale, et pas prioritairement les économies budgétaires ou la "responsabilisation" des patients. Notre société hautement technologique a fait de la spécialisation une vertu cardinale, au détriment de l'approche "générale". C'est à nouveau une illusion. Le général, en médecine comme dans la culture, est premier et fondateur. La spécialité doit être l'exception. Il faut redonner vigueur et noblesse à la dimension "généraliste" de la médecine ( et je pourrais en dire de même pour le monde de l'enseignement). C'est un débat politique aux soubassements philosophiques.
Bonne fin de matinée.
4 Comments:
La "médecine à deux vitesses" (ou plutôt : la médecine à deux qualités de soin) n'est pas une caricature.
Sinon, pourquoi les "pauvres" aurait-ils une espérance de vie si faible ? Pourquoi croise-t-on encore (en Thiérache par exemple) tant de gens (même jeunes) dans un état sanitaire déplorable ?
Même moi, avec 2000 euros/mois et une prise en charge à 100% par la sécu (affection longue durée), j'ai cessé de consulter les différents spécialistes dont j'ai besoin. Car les dépassements d'honoraires des consultations et examens, non pris en charge, m'empêcheraient de boucler mes fins de mois.
J'ai tout intérêt, financièrement, à laisser la maladie s'agraver, jusqu'à une hospitalisation en urgence, qui sera prise en charge intégralement.
Que ferait un smicard ? La même chose... en pire.
By Anonyme, at 11:29 PM
la médecine à 2 vitesses existe, mais absolument pas pour 1 raison financière. simplement par manque d'attractivité de certaines régions. comment reprocher à 1 personne qui a fait parfois 10 ans d'études qu'il refuse d'imposer à sa famille d'aller s'emmerder dans des trous perdus, sans enseignement, sans culture, sans distraction.... pour connaître beaucoup de médecins généralistes ou spécialistes, il serait peut être judicieux de les écouter, et de comprendre que l'américanisation de la mentalité française ( ils regardent trop la télé) a multiplié par 10 le montant de l'asssurance responsabilité. cicatrice trop voyante : procés, lenteur sur diagnostic ou erreur car le malade n'a pas su expliquer ou à cacher des info : procés. l'argent, l'argent toujours l'argent . les victimes de ces pb ne cherchent pas 1 traitement plus adéquat , non, ils veulent être indemnisés.
par contre , il y a danger et médecine à 2 vitesses de soins dans les petits hôpitaux.
By Anonyme, at 10:27 AM
les médecins sont libéraux et donc libres de s'installer où ils veulent. Ils établissent un bilan pour ou contre quand ils s'installent! Il est vrai que l'attractivité de la campagne ou de la province rebute! d'où une désertfication de la population médicae à la campagne. la seule solution est de rétablir le bilan en faveur du pour . Prime d'installation, encouragement fiscal pour l'installation...
si l'on veut que la profession reste libérale.
Ou bien si pour avoir une répartition homogène sur le territoire, il faut "fonctionnariser" les médecins, pourquoi pas il s'agit d'une profession liée à la santé publique.Cela existe dans d'autres pays!
MD
By md, at 11:43 AM
pour répondre à md, les médecins ne sont pas des crétins et le bilan est vite fait. il spréférent gagner moins car les campagne s profondes sont bardées de retraités couverts à 200% , soit 1 fonds de commerce, voire 1 mine d'or. et malgré cela , ils préférent gagner moins mais vivre. donc c'est la refonte de la carte électorale qu'il faudrait changer, la carte scolaire et surtout arréter de laisser la culture aux élites.
By Anonyme, at 11:56 AM
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