L'Aisne avec DSK

24 novembre 2007

2009.

Bonjour à toutes et à tous.

Les gagnants de cette semaine de conflits, c'est à droite Xavier Bertrand, chez les syndicalistes Bernard Thibault, et à gauche ... Olivier Besancenot. On l'a vu dans les manifs, où il s'est fait applaudir, à la Mutualité où il a attiré du monde et des jeunes. Sa cote de popularité progresse, ce n'est plus tout à fait un marginal de la politique. En un mot, Besancenot plaît. Son impertinence juvénile, son sens de la dérision, sa façon d'adhérer très vite à tous les mouvements de contestation, sa non compromission avec les pouvoirs, tout cela plaît parce que tout cela est dans l'air du temps, dans l'esprit public. Jamais notre société n'a été aussi éloignée du trotskysme historique et idéologique, jamais l'un de ses héritiers n'a été aussi influent. Car Besancenot n'est pas en rupture avec notre société. Il en épouse au contraire parfaitement, plastiquement, les humeurs, les réactions, les coups de gueule et les coup de coeur. Qui y a-t-il de révolutionnaire, de marxiste, de trotkyste ou d'anticapitaliste à défendre becs et ongles les régimes spéciaux de retraite? Personne ne se pose la question. Mais beaucoup se reconnaissent dans le jeune postier qui proteste, parce qu'il y a dans l'air qu'une protestation doit avoir du bon.

Le parti socialiste est évidemment menacé par cette montée de popularité du leader de la LCR et par les critiques qui nous visent, provenant de la mouvance radicale (Josiane Balasko accusant les socialistes d'être absents de la lutte en faveur des sans logis, ce que François Hollande a voulu hier rattraper, comme pour se faire pardonner, en allant rue de la Banque). Nous n'avons rien à gagner à courir derrière l'extrême gauche, nous devons au contraire nous en distinguer, nous en dissocier, nous en séparer. Par rapport à elle, c'est la différence que nous devons cultiver, pas la ressemblance ou la proximité. Et savez-vous pourquoi? Parce que elle, l'extrême gauche, ne cesse de cultiver sa différence avec le PS, parce qu'elle n'arrête pas de nous critiquer et de nous culpabiliser.

Ne nous faisons pas trop d'illusions sur les élections municipales. Elles auront lieu dans quatre mois, c'est-à-dire demain. A mon avis, la politique de Nicolas Sarkozy n'aura pas encore foncièrement décu. Sauf événement politique imprévisible (mais il vaut mieux en politique s'appuyer sur le prévisible), le gouvernement aura conservé sa popularité, certes affaiblie, mais présente. Regardez comment il s'en est sorti avec le conflit sur les régimes spéciaux. Ca deviendra peut-être un cas d'école! Donc, pas d'illusions de ce côté-là, et pas d'illusions non plus de l'autre côté, chez nous, chez les socialistes. Voyez dans quelle situation nous sommes au niveau national, voyez ce qui se passe au niveau local (je reviendrai ce week-end sur l'état des socialistes dans l'Aisne). Pas besoin de vous faire un dessin. Nous arriverons aux municipales sans avoir rénové notre projet et nos pratiques. On ne peut pas nous le reprocher, le délai est trop court (et parfois nous sommes trop lents). Le moment sérieux de la rénovation, ce sera à la fin 2008, lors de notre prochain congrès. D'ici là, on aura beau se réunir, discuter (et il le faut), rien ne changera fondamentalement au PS.

J'irai même plus loin: nous assisterons à des phénomènes de régression, des replis identitaires, des accès de fièvre archaïque. Ce qui se passe à Saint-Quentin ( logique de courant, résurgence du poperénisme, pratique procédurière, exaltation de l'union de la gauche, radicalisation du discours, sorte d'ouvriérisme à la limite du comique prôné par un candidat proclamé "non bourgeois", etc). Autant vous dire que tout cela nous conduira à l'échec c'est-à-dire à la défaite (car en politique, qui ne gagne pas perd), sous les regards stupéfaits et amusés d'une droite qui se frotte les mains (et pas seulement parce qu'il fait froid en ce moment à Saint-Quentin!).

Les seules élections où le PS rénové pourra faire entendre sa (nouvelle) voix, ce seront les européennes en 2009, dans un an et demi. C'est le temps raisonnable et suffisant pour se refonder. Nous aurons alors adopté une ligne politique, une majorité se sera dégagée, nous aurons renouvelé nos instances dirigeantes, nous disposerons d'un nouveau secrétaire. Le choix des candidats sur la liste des européennes devra marqué très nettement notre volonté de rénovation, de même que notre attitude à l'égard de l'Europe. Oui, ces élections, et pas vraiment, pas d'abord les municipales, représenteront notre premier vrai rendez-vous avec la rénovation et l'électorat.

Oui mais ... Ce rendez-vous est à haut risque pour les socialistes. Non pour des raisons internes (le mouvement de rénovation est puissant, les résistances finiront par céder) mais externes, que décrit fort bien Anne-Sophie Mercier dans Charlie-Hebdo de cette semaine:

"Olivier Besancenot à un rêve, qui n'est même pas secret: danser sur les décombres de la gauche. Son analyse est simple, tranchante, radicale: il n'y a plus de place pour le réformisme. Le PS est mort, il a rejoint le PC au cimetière. Il suffit de le dépecer. Le versant gauche sera pour lui, ce n'est pas un Fabius affaibli et usé par ses nombreux revers qui lui barrera la route. Le versant droit sera pour Bayrou, aussi déterminé que lui. Les deux hommes ont, sans le dire, la même échéance: les européennes de 2009 (...) Ce refuge du vote protestataire devrait réussir aux deux hommes. Ce serait la mise en scène terrible de la décomposition du PS".

Pour que cela n'arrive pas, il nous faut d'urgence, dans l'année et demi qui nous reste, dénoncer toute dérive socialiste vers l'extrême gauche et, au contraire, récupérer grâce à un projet rénové et attractif tous les électeurs qui nous ont quitté pour Bayrou (et qui persisteront si nous n'avons rien de crédible et de solide à leur proposer).


Bonne matinée.

5 Comments:

  • je dois être dans l'air du temps car j'adhére totalement avec cette mouvance. depuis plusieurs années , je suis sensible aux propos de besancenot. l'impression d'écouter 1 personne authentique et sans prise de tête. et les propos de balasco dont je te parlais précédemment sont criantes de vérité également. enfin des politiques qui en ont. VAL

    By Anonymous Anonyme, at 12:27 PM  

  • La vérité se crie rarement, elle s'explique. Trop facile de hurler. J'attends des arguments, c'est plus difficile mais c'est plus vrai. Et je préfère une "prise de tête" que des gens sans tête.

    Tu adhéres à Besancenot? Eh bien, je ne comprends plus rien. Tes commentaires sur ce blog te rapprochaient plutôt de Bayrou. Mais peut-être n'y a-t-il rien à comprendre?

    L'air du temps, il faut s'en méfier. Il est souvent fait de courants d'air. C'est ce qu'on appelle le conformisme, qui peut être aussi d'extrême gauche.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 12:58 PM  

  • comme quoi on ne connait jamais vraiment les autres.... VAL

    By Anonymous Anonyme, at 2:36 PM  

  • Bonjour,
    voici des idées intéressantes qui se trouvent sur le blog suivant: http://larevolutionpourquoipas.blogs.nouvelobs.com/

    Durée des heures de travail
    A ceux qui systématiquement présentent comme conséquence de la réduction des heures de travail une baisse inéluctable des salaires nous répondons que ceux qui font ce parallèle ne prennent pas garde que, dans l’organisation sociale actuelle, le prix du travail ne se détermine pas seulement par les frais de production et par le travail exécuté : ce prix varie selon le rapport de l’offre à la demande.

    On tient compte de la durée du travail lorsque l’offre est balancée par la demande ; mais, lorsque la travail est plus demandé qu’offert, le salaire hausse, bien que le travail reste le même, et lorsque, au contraire, le travail est plus offert que demandé, le salaire baisse, sans que le travail diminue. Telle est la loi du salaire.
    Or, s’il était vrai que les ouvriers employés dussent nécessairement produire moins en travaillant moins longtemps, - ce que j’examinerai tout à l’heure, - il faudrait en employer un plus grand nombre, et, la demande tendant alors à excéder l’offre, comment une baisse des salaire pourrait-elle s’en suivre ?

    Que si un semblable résultat était à craindre, explique qui pourra l’ardeur avec laquelle les ouvriers ont, toujours et partout, réclamé la réduction des heures de travail. Ce fut, on s’en souvient, la première réclamation que le peuple de Paris fit entendre le lendemain de la Révolution de 1848, et il la présenta comme la conséquence la plus naturelle du grand évènement qui venait de s’accomplir.
    Que de fois ces mots : « réduction des heures de travail » n’ont-ils pas été écrits sur le drapeau des grèves !
    Je dirai simplement aux adversaires de notre proposition : N’invoquez pas contre nous l’intérêt de la classe ouvrière. Quelle que soit votre sollicitude pour elle, vous ne sauriez lui porter plus d’intérêt qu’elle ne s’en porte elle-même.

    On nous objecte que, si la réduction des heures de travail avait pour effet chez nous le renchérissement de la main-d’œuvre, nous risquerions de perdre des marchés. C’est précisément ce qu’on objectait en Angleterre aux promoteurs de la première loi sur le travail des enfants dans les manufactures. Alors aussi on fit sonner bien haut la nécessité de soutenir la concurrence étrangère. L’Angleterre a-t-elle eu à se repentir d’avoir passé outre ? A-t-elle trouvé une cause de ruine dans ces lois protectrices de l’enfance qu’elle n’a cessé d’étendre ? Non ; et pourquoi ? Parce que, au-delà d’un généreux effort vers le bien, l’impulsion donnée par elle ne pouvait manquer d’être suivie et l’a été en effet.
    L’argument tiré de la crainte de voir un marché se fermer suppose que rien ne sera changé aux conditions dans lesquelles s’exerce aujourd’hui l’industrie étrangère : est-ce probable ? Est-ce possible ?
    Croit-on que les besoins et les légitimes revendications de la classe ouvrière n’amèneront pas partout et bientôt des résultats analogues ? Et quelle gloire pour la France si elle contribuait, par son exemple, à relever les conditions du travail dans le monde ! Cette gloire vaudrait bien celle des armes.

    Dès lors, s’il est vrai que les peuples fussent réduits à s’acharner sans pitié sur ceux auxquels leur faiblesse devrait servir de sauvegarde, ce serait le cas de recourir à une entente internationale qui, d’un commun accord,ferait cesser un aussi douloureux trafic, comme elle a fait cesser le scandale de la traite des noirs.

    Tant de traités ont été conclus dans le but de faire tuer les hommes ! On saluerait avec une reconnaissance profonde ceux qui auraient pour but de les faire vivre !

    On nous crie de prendre garde, que nous allons porter atteinte à la production. Comme si l’on avait tout dit quand on a prononcé ce mot : la production ! Comme si l’accroissement de la production était nécessairement l’accroissement de la richesse ! Comme si la production ne pouvait pas devenir une cause de ruine, lorsque, se développant à l’aventure, elle dépasse la limite marquée par les besoins et les ressources de la consommation !
    Comme si la richesse enfin, ne devait pas, être appréciée dans son rapport avec le bonheur de tous ceux qui contribuent à la produire !

    Et puis, l’argument dont s’arment ici nos adversaires est-il aussi fondé qu’ils l’imaginent ?
    Abréger la durée du travail ! disait-on. Mais vous n’y pensez pas ! Si vous diminuez le travail d’une heure, rien que d’une heure, c’est 13 pour cent que vous enlèverez au produit de la fabrique. Or, les heures de travail furent limitées. Eh bien, qu’est-il résulté de cela ? L’intérêt industriel a-t-il souffert de cette grande victoire de l’humanité ? Non. Au contraire, jamais la richesse n’a été aussi bien et rapidement produite.

    La vérité est, - toute paradoxale que cette proposition semble au premier abord, - que l’ouvrier peut, dans un moindre temps, obtenir un résultat aussi grand que dans un temps plus long. En ménageant les forces de l’ouvrier, on arrive à un résultat meilleur et à une somme de produits proportionnellement plus grande dans un temps limité convenablement que lorsque l’ouvrier est accablé par un travail trop prolongé.

    En ce sens, il est certain que ce qui détruit dans le producteur, par un travail excessif, le germe même de la puissance productrice, ne saurait avoir pour effet d’enrichir un peuple.

    Vainement objecterait-on que, dans les usines, la science a fait passer de l’homme à la machine cette puissance productive : cela n’est vrai qu’en partie. Je conviens que les inventions mécaniques ont fait de l’ouvrier, là où on les applique, le surveillant, j’allais dire le serviteur d’une machine. Mais suit-il de là que l’action de l’ouvrier soit sans influence sur le rendement des métiers ? Compterons-nous pour rien l’impulsion qu’il donne à l’œuvre commune, la direction qu’il lui imprime, l’activité plus ou moins assidue de la surveillance qu’il exerce ?

    Alors, certes, si un ouvrier travaille 8 heurs pendant un jour, il fera ce jour-là, c’est certain, plus de besogne que s’il n’avait travaillé que pendant 5. Mais que cela continue pendant plusieurs mois ; et du dépérissement de sa santé, du graduel épuisement de ses forces, il résultera qu’au bout de plusieurs mois il aura moins contribué ou sera moins en état de contribuer à la production que s’il avait travaillé 5 heures par jour seulement.
    Et que serait-ce, si, au lieu de compter par jours et par mois, nous comptions par générations ? Quelle déperdition de richesses, dans le cours d’une génération, n’entraînerait pas la dégénérescence physique, morale et intellectuelle de la population ouvrière !

    Si je pouvais prendre sur moi de comparer à une machine, même en l’appelant la plus étonnante des machines et la plus merveilleuse, un être qui pense, qui sent et qui aime, je demanderais si l’on connaît une machine qui n’ait jamais besoin d’être réparée. C’est donc du temps gagné, pour la nation, prise dans son ensemble, que le temps donné par le travailleur à la culture de l’esprit et à un repos réparateur.

    De quoi dépend, après tout, la qualité d’un produit ? Est-ce qu’elle ne dépend pas de la qualité du producteur ? C’est donc le producteur qu’il faut s’attacher à améliorer, même en se plaçant au point de vue de la prospérité commerciale ; ce qu’il faut chercher à perfectionner, c’est le principe générateur de cette prospérité. Et ce principe, quel est-il ? Ce principe, c’est l’Homme !

    La question est donc celle-ci :
    à quel système demanderons-nous l’accroissement de la richesse ? Est-ce à celui qui, par un labeur trop prolongé, tend à saper dans l’ouvrier la vigueur du corps et la vigueur de l’âme, ou bien à celui qui, en ménageant ses forces et en lui donnant, avec le temps de s’instruire, le moyen de goûter les joies de la famille, tend à le rendre plus éclairé, plus robuste et meilleur ? Oui, lequel de ces deux systèmes est préférable ?

    Cordialement,

    G.B.

    By Anonymous Anonyme, at 2:54 PM  

  • D'un coté il y a Besancenot qui espère mordre dans le PS et de l'autre Bayrou qui compte avaler le reste. Mais nous avons la possibilité par le biais de la rénovation de nous positionner clairement, de renouveler nos pratiques, et d'arriver enfin à une sociale démocratie en accord avec nos partenaires européens. On peut croire à un moment de faiblesse pendant cette mue, mais je ne le pense pas. Je partage donc entièrement ta conclusion, nous pouvons proposer un chemin pour la France dans la mondialisation en y associant les autres pays européens, car nous avons profondément ancré en nous le goût du dialogue et de la négociation. L'art du compromis est le fondement du réformisme et manque cruellement à l'extrême gauche. Elle fait beaucoup de bruit, mais politiquement, elle cultive l'art de la gamelle, celle qu'elle se prend régulièrement à chaque élection et celle mendiée auprès du PS pour avoir des signatures afin de survivre médiatiquement.

    Il est temps de trancher ce lien gluant.

    By Blogger jpbb, at 3:21 PM  

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