L'Aisne avec DSK

23 novembre 2007

La grève se termine.

Bonjour à toutes et à tous.

La grève se termine peu à peu, les AG appellent une à une à la reprise, les trains circulent petit à petit. Seuls les étudiants résistent dans leurs facs. Mais pour combien de temps? Que faut-il retenir de ce conflit social pas comme les autres, et surtout, pas comme 1995?

1- On ne peut pas dire que le gouvernement en sort complètement gagnant. Certes, sa réforme est passée. Mais de toute façon, quoi qu'il serait arrivé, sa réforme serait passée. Quand on occupe le pouvoir, quand on a été élu comme Nicolas Sarkozy a été élu, quand les sondages montrent que vous avez le soutien de l'opinion, les jeux sont faits. Non, l'échec du gouvernement est ailleurs, dans ces neuf jours de grève qu'il n'a pas su éviter, dans ces neuf jours où l'économie française a perdu gros, dans ces neuf jours où des millions de personnes ont été perturbés dans leur vie quotidienne, dans ces neuf jours qui ont fait perdre encore plus de pouvoir d'achat aux grévistes, dans ces neuf jours un peu absurde puisqu'on termine en revenant au point de départ, la négociation. Mais pourquoi ne pas l'avoir engagé plus tôt? Le gouvernement a joué avec le mouvement, son essoufflement, sa division. Il a voulu une victoire idéologique, il a une négociation à mener maintenant.

2- La CGT est la gagnante de ce conflit. C'est son idée de négociation tripartite qui l'a finalement emporté, reprise au dernier moment par le gouvernement. Thibault a su imposer la négociation tout en respectant la base plus radicale, les AG demandant la poursuite de la grève. Comment pouvait-il faire autrement? Un mouvement social, quand il est lancé, ne s'arrête pas si facilement. La CGT est probablement à un tournant de son histoire. Elle a fait un grand pas en direction du réformisme. Dans la négociation qui s'ouvre et qui durera un mois, elle aura l'occasion de prouver que le réformisme syndical est toujours ce qu'il y a de mieux pour les salariés, parce qu'il permet d'engranger des résultats concrets.

3- Ce conflit aura aussi confirmé l'existence d'un syndicalisme radical, protestataire, inspiré par l'extrême gauche, qu'on retrouve dans sa plus pure expression chez SUD et ses trotskystes, FO et ses lambertistes, une partie de la CGT et ses néocommunistes, sans parler des anarchistes de la CNT. Ce courant correspond bien sûr à toute une culture française, de nature révolutionnaire, qui a le droit d'exister, que le parti socialiste a le droit et le devoir de contester, car ce syndicalisme-là ne sert qu'à ceux qui préparent la révolution, il n'apporte rien de concret aux salariés.

4- Le parti socialiste a commis une erreur politique à la suite du conflit sur les retraites en 2003. A partir du moment où Fillon était parvenu à aligner la Fonction public sur les 40 années de cotisations du privé, les régimes spéciaux des assimilés et autres professions devenaient difficilement défendables. Il aurait fallu alors, haut et fort, demander l'alignement. Nous aurions ainsi dépassé cette question pour en aborder d'autres, plus cruciales: le montant des retraites, le taux de reversion, le problème de la décote et surcote, la pénibilité des métiers, l'approche globale des retraites. Nicolas Sarkozy nous a amusés avec les 40 ans, agitant un chiffon rouge sur lequel certains se sont précipités, reléguant au second plan les éléments qui pouvaient se discuter dans une négociation (et qui vont maintenant, enfin mais bien tard, se discuter dans la négociation d'un mois). Même Mélenchon, ce matin sur sur RTL, chez Apathie, n'a pas tout de suite dit non aux 40 ans, sachant bien que l'enjeu, surtout maintenant, est ailleurs. Mais à force d'insister, Apathie a fini par lui faire avouer qu'il disait non aux 40 ans.

Donc, le bilan de ce conflit est mitigé, en demi-teinte. Ce qui compte désormais, et qui permettra de faire un bilan exhaustif de ce qui s'est passé, c'est la suite des négociations. A partir de leurs résultats, nous saurons si nous sommes entrés douloureusement dans une nouvelle ère du dialogue social ou si tout cela n'est qu'une ruse tactique, un repli stratégique du gouvernement.


Bonne fin d'après-midi.