L'Aisne avec DSK

23 novembre 2007

Réflexions sur la retraite.

Bonsoir à toutes et à tous.

En allant sur le blog de Manuel Valls, je découvre qu'il a publié mercredi un communiqué sur la réforme des retraites, signé aussi par le strauss-kahnien Jean-Marie Le Guen et Pascal Terrasse (les trois sont députés). Sur cette question, ce n'est pas que le PS n'a pas pris position, mais il n'est allé jusqu'au bout. Du coup, il donne une impression de "flou", là où il y a de la prudence et, sûrement, de la timidité. C'est que nous vivons encore avec l'idée qu'il ne faut fâcher personne au PS, que l'équilibre dans la moyenne des contraires est une position habile alors qu'elle est casse-gueule. La synthèse des différents avis est devenue tellement synthétique qu'elle dilue le message en un filet d'eau tiède et pas clair. Sarkozy a ceci de bon qu'il devrait nous inspirer des positions très carrées, non susceptibles d'interprétations multiples.

Valls, Le Guen et Terrasse sont carrés. De leur communiqué, je retiens quelques points forts qui m'amènent à réfléchir:

1- Allonger la durée de cotisation, oui, il faut l'affirmer clairement, parce qu'on ne peut pas accepter d'augmenter le taux de cotisation ou de diminuer le montant des retraites. Ceux qui ne veulent toucher à rien, qu'ils le disent et qu'ils expliquent quel sera l'avenir du système des retraites. Ceux qui veulent "faire payer les riches" (je suppose qu'il ne reste plus que cette solution-là quand toutes les autres ont été refusées), qu'ils nous disent comment ils s'y prendront. En attendant leur réponse, aux uns et aux autres, proposons d'augmenter la durée de cotisation, et passons à autre chose.

2- Par exemple, occupons-nous du scandale des petites retraites, dont tout le monde a conscience, y compris à droite. Il y a des vieux qui vivent mal, très mal, qui souvent ne disent rien parce qu'on a un peu honte de se plaindre quand on est vieux. J'emploie délibérément ce très beau mot de vieux, que plus personne n'utilise aujourd'hui, et qu'on a remplacé par le ridicule "senior". Et les jeunes, quand va-t-on les appeler les "juniors"? Donc, il y a des vieux, une minorité certes, qui sont seuls, ne peuvent pas compter sur leur famille, survivent ou vivotent, et dont on parle peu parce qu'ils n'ont pas de représentants, de syndicats, d'associations (à ma connaissance). Il ne devrait pas y avoir en France de "petites retraites" (par cette expression, on désigne une sorte de RMI de la vieillesse).

3- Etablir des décotes et des surcotes permettant à chacun de choisir librement sa date de départ à la retraite. Tout est là. Pendant longtemps (depuis toujours?), la gauche a pensé le problème de la retraite dans les mêmes termes: abaisser l'âge de départ. Le progrès, c'était ça, et rien que ça. On comprend bien pourquoi. Mais la société, le travail et l'individu ont changé. Un mot résume ce changement depuis trente ans: liberté. Et aussi, et par conséquent individualisme. Les mesures "couperets" sont mal perçues. Qu'il y ait un âge décent où chacun ait droit à ne plus travailler, oui. Que cette âge s'impose à tous, comme un progrès social évident et puissant, non (le même raisonnement serait applicable à la réduction du temps de travail). Il faut que chacun puisse choisir son départ à la retraite. Poursuivre au-delà de l'âge légal doit être possible, reconnu et valorisé.

4- Ce qui nous amène à ce que Valls, Le Guen et Terrasse appellent "l'employabilité des seniors" (expression affreuse et seul point de désaccord entre eux et moi, mais qui ne regarde que le vocabulaire). Quand on parle de retraite, on a en tête ces fameux "seniors" qui voyagent à travers le monde, s'occupent de leurs petits enfants, s'investissent dans la vie associative, etc. Mais cela ne concerne que les personnes âgées qui en ont les moyens financiers et qui jouissent d'une intégration sociale très riche pour maintenir des activités en dehors du travail. C'est oublier tout ceux dont l'existence sociale n'a de réalité qu'à travers leur travail, et qui vivent douloureusement la période de la retraite.
Jadis, c'était très différent: les "vieux jours" étaient relativement courts, occupés par le bricolage et le jardinage. Aujourd'hui, la retraite représente toute une tranche de vie, un "âge" à part entière. Pour certains (je dis bien pour certains, pas pour tous), rester à ne rien faire, être coupé du milieu professionnel, voir sa vie cantonnée à l'espace privée est mal vécu. Ils souhaiteraient continuer, parce qu'ils en ont encore la force, et surtout la volonté. Ils aimeraient encore "être utile", servir à quelque chose. C'est tout de même curieux, cette société qui fait l'éloge de la "valeur travail", et qui voudrait en priver les plus âgés qui en ont envie, qui aspirent à cette reconnaissance par le travail.

Voilà ce que m'a inspiré le communiqué de Valls, Le Guen et Terrasse. Et un texte qui vous fait réfléchir ne peut être qu'un bon texte. Il y a tellement d'écrits qui me font baîller!


Bonne soirée (sans baîllement, bien sûr).