L'Aisne avec DSK

15 novembre 2007

La cause étudiante.

Bonsoir à toutes et à tous.

Aux dernières nouvelles, la base cégétiste maintient le mouvement de grève. C'est un peu normal. Bertrand a d'abord dit qu'il refusait la réunion tripartite syndicat-direction-Etat, pour finalement céder sur ce point au premier jour de la grève. Cela sent le repli tactique. Mais peu importe les intentions, ce qui compte, ce sont les réalités: un espace de négociation vient de s'ouvrir, il faut s'en saisir. Et si la négociation n'aboutit pas, dans un mois, rien n'interdit de reprendre la grève, comme arme ultime et pas comme préalable. Thibaud a raison, il faut aller dans ce sens et obtenir un maximum d'avantages pour les salariés. Maintenant, ceux qui veulent continuer à contester l'alignement de tous les régimes de retraite sur les 40 annuités peuvent toujours le faire, je crains que ce combat ne soit sans issue.

Le mouvement étudiant, lui, a bloqué paraît-il une trentaine d'universités. J'ai déjà dit ce que je pensais ce matin de ces méthodes, je les condamne. Ce n'est pas ainsi, par la pression, qu'on fait avancer une cause. Justement, quelle est la cause des étudiants, et que faut-il en penser? Je répondrais avec modestie, je n'ai pas complétement suivi cette affaire:

1- Une réforme des universités adoptée pendant les vacances, ce n'est jamais une bonne chose. Le gouvernement a donné l'impression d'un mauvais coup. C'est donc une maladresse.

2- Cependant, cette réforme, sauf erreur de ma part, a été négociée avec l'UNEF et approuvée par le syndicat majoritaire, même si aujourd'hui, pour "coller" au mouvement, l'UNEF prend ses distances.

3- Cette réforme ne restreint pas l'accès à l'université. Par le passé, ce genre de mesure mettait beaucoup d'étudiants dans la rue. Là, nous avons plutôt à faire avec des dispositions administratives et gestionnaires.

4- L'idée d'une plus grande autonomie des universités et d'une intervention de fonds privés me choque-t-elle? Non, l'université française est pauvre, elle doit trouver de l'argent, le secteur privé doit y aider.

5- J'entends dire qu'il y aura des facs de riches et des facs de pauvres, des filières abandonnées parce que non rentables (les sciences humaines). Quand j'étais étudiant, autour de 1990, j'entendais déjà les mêmes inquiétudes. On me disait que la philo, c'était foutue. Aujourd'hui, je trouve que la philo ne se porte pas si mal dans notre société. Et puis, cette histoire de rentabilité qui sacrifierait certaines filières, je n'y crois guère. Un pays qui choisit d'être compétitif a besoin d'ingénieurs, de techniciens, de commerciaux, de cadres administratifs, mais il a tout autant besoin d'avocats, d'historiens, de philosophes, de sociologues, de psychologues. L'histoire le prouve: les grandes nations, les puissants empires ont rayonné à travers le monde parce que leur développement touchait tous les domaines. L'intelligence n'est pas sélective. Elle féconde tous les secteurs de la société et de la pensée. Je n'ai donc pas trop de crainte de ce point de vue là.

6- Cependant, je comprends le mouvement étudiant, même si je ne partage pas la totalité de ses mots d'ordre. Nicolas Sarkozy s'est fait élire avec un slogan, "gagner plus". Il a ainsi mis l'argent au coeur de sa politique et, quasiment, de sa morale, alors que c'est la justice qui, selon moi, devrait prendre la première place. Comment s'étonner que les étudiants ne soient pas inquiets devant une telle perspective?


Bonne soirée.

3 Comments:

  • force est de constater que les conflits musclés ( blocage, grèves, manifestation de masse..) marquent l'opinion publiques parfois provoquent des replis du gouvernement . il est vrai que cela donne des résultats à court terme mais ne solutionne pas le fond.
    idéalement et utopiquement, j'ai toujours penser que l'action la plus efficace serait l'inaction. c'est à dire : grève du zèle collective et solidaire :
    - les conditions de travail sont pénibles et inacceptables : on va sur son lieu de travail et on ne travaille pas.
    - on ne paie plus ses impots, ses charges,....
    - absence de moyens pour exercer correctement son job ( magistrats, professeurs, infirmières , médecins hospitaliers) : on travaille au prorata des moyens
    - salaire trop bas = production de travail à minima.

    cette démarche permettrait, certes de façon caricaturale, de mettre le doigt sur les pbs de fond et ouvrirait de véritables débats. VAL

    By Anonymous Anonyme, at 7:55 AM  

  • Je comprends l'inquiétude légitime des étudiants concernant le risque de privatisation de l'université, les entreprise françaises ne sont pas en général des mécènes. Si la gestion des universités passe par la collecte de fonds privés, il y risque de dérive (donnant donnant) d'autant qu'aucun avantage spécifique n'est donné aux entreprises qui financent! Pourquoi ne pas faire appel au peuple avec une réduction d'impôt comme pour les FCPI (fonds commun de placement dans l'innovation)? L'avantage serait une collecte plus grande et surtout sans lien direct entre le "mécène" et l'université d'où une plus grande neutralité?
    Par contre je n'accepte pas le blocage par une minorité d'étudiants!
    MD

    By Blogger md, at 9:15 AM  

  • A VAL: passer de l'action (mot d'ordre politique et syndical traditionnel) à la non action (terme que je préfère à inaction), c'est une idée à creuser. Après tout, il y a un siècle, certains ont pensé abandonner la violence au profit de la non violence. Ce qui est certain, c'est que les modes classiques de revendication sont à bout de souffle et qu'il faudrait en inventer de nouveau.

    Je crois d'ailleurs que la non action a déjà commencé, depuis un certain temps. En 1995, il était question de "grève par substitution". Le privé ne manifestait pas mais soutenait le secteur public en grève. La non action en faveur de l'action, en quelque sorte. Surtout, et j'en avais parlé dans un billet cet été, il y a, dans les entreprises, les bureaux, tout un mouvement de résistance, invisible, silencieux, une non action qui est une forme de protestation contre les conditions de travail et les formes modernes de management. Il faut lire à ce propos le livre de Corinne Maier, "Bonjour paresse". Peut-être que certains lecteurs de ce blog le font de l'ordinateur au bureau, volant ainsi de précieuses minutes, non travaillées, à leur patron!

    Maintenant, en tant que bon social-démocrate, je crois tout de même en l'action collective de masse, par l'adhésion aux organisations politiques et syndicales. Mais il est possible d'additionner différents types d'action (ou de non action).

    A MD: bien sûr l'université française ne doit pas dépendre des entreprises. Il faut qu'elle soit réellement "autonome", autant à l'égard de l'Etat que des entreprises. C'est la grande tradition de l'université française, son autonomie à l'égard des pouvoirs, politique autant qu'économique.

    Mais l'intervention de financements privés, sous conditions, régulés et contrôlés, ne me choque pas. Après tout, certains grandes entreprises ont besoin de la recherche pour se développer, et la recherche universitaire a besoin d'argent pour travailler. Je pense en particulier aux filières scientifiques. Ceci dit, il faut réfléchir de près à la question. Mais le principe me semble valable.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 1:41 PM  

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