L'anti-novembre 1995?
Bonjour à toutes et à tous.
La journée de grève d'hier, pour la défense des régimes spéciaux, a été moins suivie que la précédente. Surtout, le pouvoir s'en tire assez habilement, pour le moment. La proposition de négocier dans chaque entreprise en présence de l'Etat, dans un délai d'un mois, va dans le sens de ce qu'avait demandé la CGT. Plusieurs commentateurs parlent même de décision "historique". En plein conflit, la négociation retrouve ses droits et semble préférée à l'épreuve de force. Du coup, la CGT donne le sentiment de se convertir au réformisme, mais il faut attendre aujourd'hui les réactions de la base, dans les assemblées générales de grévistes. Le gouvernement, de son côté, présente une image d'ouverture et d'efficacité, dans le respect de ses engagements électoraux. Je ne sais pas si c'est du gagnant-gagnant, mais on s'en rapproche un peu.
Je fais ce commentaire avec beaucoup de prudence. A l'heure qu'il est, la suite du conflit reste incertaine, mais des évolutions se dessinent, et il est vrai qu'elles sont plutôt inédites dans la vie sociale et politique française. Ce sera peut-être un conflit qui fera date, qui marquera une étape dans l'histoire des relations sociales, un anti-novembre 1995 en quelque sorte. Les grands vainqueurs, si l'orientation actuelle se confirme, ce sera la CGT de Bernard Thibaud et le ministre du Travail Xavier Bertrand, l'un des rares ministres qui existe politiquement face à Sarkozy. Les grands vaincus, ce sera Sud-Rail et son syndicalisme protestataire, ainsi que FO toujours boostée par ses lambertistes. Mais 1995, c'est fini: ce n'est plus Blondel et sa centrale qui ont la main.
Politiquement, tout ça n'est pas très bon pour le PS, même si on peut se féliciter que syndicalement, le réformisme progresse. Les socialistes n'ont pas été très présents, mais avaient-ils les moyens politiques de l'être? Je ne crois pas. La réforme voulue par le gouvernement, nous aurions dû la faire, sous d'autres modalités, avec des résultats différents, de fortes compensations en direction des salariés, l'assurance que le montant des retraites ne serait pas affecté. Mais l'harmonisation des régimes de retraite, il fallait la faire, et l'opinion y est favorable. C'est encore une grande différence avec 1995. Dès le départ, sur ce blog, j'avais dit que le gouvernement nous entraînait sur un terrain miné. Il aurait mieux valu nous concentrer sur ce qui va se passer le 20 novembre dans toute la Fonction publique, contre la suppression massive de postes, pour la défense du service public. Là, nous avions, et nous avons toujours, un terrain de lutte qui nous est beaucoup plus favorable, qui peut plus facilement entrer en phase avec l'opinion.
Mais l'affaire des régimes spéciaux, surtout si le gouvernement s'en sort bien, va occulter le problème du service public et de sa pérennité. Nous avons été aussi trompés par les illusions et les dérives du mouvement étudiant, dont les bases de revendication ne sont pas très claires (j'y reviendrai plus longuement), dont les méthodes sont très contestables (AG manipulées, blocage forcé des facs, tentative d'occuper les gares, confusion extrême, gauchisme latent). L'idée d'extrême gauche d'une "convergence des luttes" est bien jolie mais peu réaliste. Elle laisse espérer une tournure des événements qui arrive rarement, sauf conditions historiques exceptionnelles (Mai 1968). Bref, là comme ailleurs, je reste indéfectiblement un réformiste, de méthode et de projet.
Un dernier mot pour vous parler de Saint-Quentin. Chez nous aussi, comme partout ailleurs, il faudrait entre socialistes privilégier le dialogue au rapport de forces. Car chez nous plus qu'ailleurs, un homme de droite est en train de gagner ses galons pour Matignon. C'est notre adjoint à la redynamisation, Xavier Bertrand. Contre lui, si nous ne sommes pas unis, je ne donne pas cher de notre peau à tous.
Bonne matinée.
La journée de grève d'hier, pour la défense des régimes spéciaux, a été moins suivie que la précédente. Surtout, le pouvoir s'en tire assez habilement, pour le moment. La proposition de négocier dans chaque entreprise en présence de l'Etat, dans un délai d'un mois, va dans le sens de ce qu'avait demandé la CGT. Plusieurs commentateurs parlent même de décision "historique". En plein conflit, la négociation retrouve ses droits et semble préférée à l'épreuve de force. Du coup, la CGT donne le sentiment de se convertir au réformisme, mais il faut attendre aujourd'hui les réactions de la base, dans les assemblées générales de grévistes. Le gouvernement, de son côté, présente une image d'ouverture et d'efficacité, dans le respect de ses engagements électoraux. Je ne sais pas si c'est du gagnant-gagnant, mais on s'en rapproche un peu.
Je fais ce commentaire avec beaucoup de prudence. A l'heure qu'il est, la suite du conflit reste incertaine, mais des évolutions se dessinent, et il est vrai qu'elles sont plutôt inédites dans la vie sociale et politique française. Ce sera peut-être un conflit qui fera date, qui marquera une étape dans l'histoire des relations sociales, un anti-novembre 1995 en quelque sorte. Les grands vainqueurs, si l'orientation actuelle se confirme, ce sera la CGT de Bernard Thibaud et le ministre du Travail Xavier Bertrand, l'un des rares ministres qui existe politiquement face à Sarkozy. Les grands vaincus, ce sera Sud-Rail et son syndicalisme protestataire, ainsi que FO toujours boostée par ses lambertistes. Mais 1995, c'est fini: ce n'est plus Blondel et sa centrale qui ont la main.
Politiquement, tout ça n'est pas très bon pour le PS, même si on peut se féliciter que syndicalement, le réformisme progresse. Les socialistes n'ont pas été très présents, mais avaient-ils les moyens politiques de l'être? Je ne crois pas. La réforme voulue par le gouvernement, nous aurions dû la faire, sous d'autres modalités, avec des résultats différents, de fortes compensations en direction des salariés, l'assurance que le montant des retraites ne serait pas affecté. Mais l'harmonisation des régimes de retraite, il fallait la faire, et l'opinion y est favorable. C'est encore une grande différence avec 1995. Dès le départ, sur ce blog, j'avais dit que le gouvernement nous entraînait sur un terrain miné. Il aurait mieux valu nous concentrer sur ce qui va se passer le 20 novembre dans toute la Fonction publique, contre la suppression massive de postes, pour la défense du service public. Là, nous avions, et nous avons toujours, un terrain de lutte qui nous est beaucoup plus favorable, qui peut plus facilement entrer en phase avec l'opinion.
Mais l'affaire des régimes spéciaux, surtout si le gouvernement s'en sort bien, va occulter le problème du service public et de sa pérennité. Nous avons été aussi trompés par les illusions et les dérives du mouvement étudiant, dont les bases de revendication ne sont pas très claires (j'y reviendrai plus longuement), dont les méthodes sont très contestables (AG manipulées, blocage forcé des facs, tentative d'occuper les gares, confusion extrême, gauchisme latent). L'idée d'extrême gauche d'une "convergence des luttes" est bien jolie mais peu réaliste. Elle laisse espérer une tournure des événements qui arrive rarement, sauf conditions historiques exceptionnelles (Mai 1968). Bref, là comme ailleurs, je reste indéfectiblement un réformiste, de méthode et de projet.
Un dernier mot pour vous parler de Saint-Quentin. Chez nous aussi, comme partout ailleurs, il faudrait entre socialistes privilégier le dialogue au rapport de forces. Car chez nous plus qu'ailleurs, un homme de droite est en train de gagner ses galons pour Matignon. C'est notre adjoint à la redynamisation, Xavier Bertrand. Contre lui, si nous ne sommes pas unis, je ne donne pas cher de notre peau à tous.
Bonne matinée.
1 Comments:
Voilà de fortes paroles, une analyse tout en contraste de la situation actuelle, un aspect de ta personnalité qui pour le moment ne s'était pas manifesté. Ce sont les circonstances qui mettent en avant les hommes. Salutations Emmanuel, ;-)
By jpbb, at 10:37 AM
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