L'Aisne avec DSK

29 décembre 2007

Avoir la foi.

J'ai regardé cet après-midi un magnifique DVD, un film que j'avais vu il y a très longtemps, à la télévision, qui m'avait un peu rebuté (mais c'était il y a longtemps!) et que j'ai revu avec plaisir, et plus que du plaisir, de l'émotion et de l'admiration: je veux parler du film de Pasolini, "L'Evangile selon saint Matthieu". Une vie de Jésus au cinéma, c'est toujours un exercice casse-gueule. Ce film-là, c'est le plus beau et le plus réussi dans le genre. Et il a fallu un athée et un marxiste comme Pasolini pour nous faire une oeuvre profondément mystique! Enfin un Christ qui n'est pas ce blondinet efféminé aux yeux bleus délavés et cheveux au vent, sorte de hippie dégénéré qu'on voit dans de trop nombreux films. Jésus est brun, le regard noir, fixe, la parole violente, le comportement dur, sec. On s'attend toujours à ce que le film sombre dans le ridicule, notamment quand il est question des miracles. Et bien non, le réalisme est le plus fort.

Qu'est-ce qui m'intéresse dans ce film, moi qui n'adhère pas aux dogmes du catholicisme? Qu'est-ce qui mérite que je vous en parle sur ce blog politique? Ce film ne porte pas essentiellement sur la religion. Ce qui me frappe, c'est le portrait et la vie d'un homme de foi. Ce qui est admirable, fascinant, c'est cela. Que nous montre Jésus? Que la chose la plus importante dans la vie, c'est de croire en quelque chose. A partir de là, tout devient possible, soulever les montagnes ou triompher de la mort. Peu importe ce en quoi on croit. La foi peut être religieuse, sentimentale, professionnelle, croire en Dieu, croire en l'amour, croire en ce qu'on fait. Croire en soi, aussi. Et puis, la foi peut être politique. Elle porte alors un nom précis: la conviction. La politique, ce n'est pas qu'une affaire d'adhésion intellectuelle. Il faut aussi, il faut surtout y croire. C'est cela qui fait agir. Croire en ses idées, et croire en soi quand on veut jouer un rôle actif dans l'application de ses idées.

Qu'est-ce qui manque aux socialistes qui m'entourent pour qu'ils gagnent? Ils ne sont tout de même pas dans la situation des chrétiens d'il y a 2000 ans! Justement. Le confort intellectuel, l'habitude du pouvoir, la recherche des places, les compromis médiocres, le désenchantement un peu snob, tout ça a diminué la foi, la ferveur, le dynamisme, l'énergie. Il faudrait des militants, il n'y a plus que des notables, des apparatchiks ou des aspirants à ces deux situations. Quand je regarde ou que j'écoute quelqu'un, et plus encore un camarade, je saisis immédiatemment s'il a la foi en ce qu'il dit ou s'il récite ce qu'on lui a appris. Nous vaincrons quand nous aurons avec nous, à notre tête, des hommes ou des femmes de foi, pas des récitants. Je vais aller plus loin: il faut vivre un peu dans son existence le socialisme, sinon on ne trouve pas la force qui permet de le communiquer aux autres. Un homme de foi est invincible. Les échecs passent sur lui. Rien ne peut l'atteindre.

Qu'est-ce que la foi, quand elle ne désigne pas la croyance religieuse? Je dirais que c'est la volonté portée très loin, très haut, et le sentiment d'avoir en soi une certaine vérité. Ca n'a rien de proprement intellectuel. Ceux qui attendent des raisons pour agir n'agissent jamais, parce qu'ils trouvent toujours de bonnes raisons pour ne pas agir. Des comme ça, il y en a pas mal en politique: ils attendent, ils suivent. Non, il faut agir, avoir la foi.


Bonne nuit.

4 Comments:

  • Au 2e paragraphe, tu évoques la religion et tu écris "tout devient possible".
    Tu te souviens ? C'est le slogan de campagne de Sarkozy !
    Décidément, la foi est une source inépuisable d'inspiration...

    By Blogger Thierry D., at 12:03 AM  

  • Deviendrais-je sarkozyste sans m'en rendre compte? Que Dieu me préserve de ce grand malheur à l'approche de la nouvelle année!

    Bon, un peu de sérieux:

    1- A l'évidence, tout n'est pas possible, surtout en politique.

    2- Ce slogan, "tout est possible", aurait pu se trouver sur les murs en Mai 1968. "Soyons réalistes, demandons l'impossible" (slogan, authentique, de Mai 68).

    Alors?

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:15 AM  

  • « Croire en ses idées, et croire en soi quand on veut jouer un rôle actif dans l'application de ses idées. » C'est une très belle définition. Il y a à l'opposé des gens qui n'ont pas d'idées, et qui veulent le pouvoir pour le pouvoir et qui entendent bien combattre ceux qui ont des idées. C'est la guéguerre interne dans le PS, entre la frange marxiste qui désespère ne ne pas y arriver, et les sociaux démocrates qui sont confiants dans l'avenir. Petit à petit, nous arrivons à consvaincre.

    By Blogger jpbb, at 11:04 AM  

  • Si cette frange était réellement marxiste, elle aurait des idées, et ce serait plutôt bien. Ce que je crois et ce que je crains, c'est qu'elle est simplement opportuniste. Ce sont les petits Guy Mollet d'aujourd'hui, très à gauche dans le discours, et dans la pratique, un objectif, un seul, le pouvoir, y compris quelques petites places dans l'opposition municipale.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:13 AM  

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