L'Aisne avec DSK

08 janvier 2008

Ainsi parlait Sarkozy.

Bonsoir à toutes et à tous.



Nicolas Sarkozy a parlé. Il a dit beaucoup de choses. C'est pourquoi il a parlé: introduire du neuf, en nombre, pour faire oublier l'ancien. Tout cela est bien sûr tactique: éblouir la presse, étourdir l'opposition, épater l'opinion. Il faut donc tenir bon pour restituer l'essentiel, souligner les grandes lignes. Oublions le bla-bla sur la "politique de civilisation". Le président reconnaît lui-même qu'il n'est pas un intellectuel. Ce n'est pas pour devenir maintenant philosophe. Oublions les propos convenus sur l'université, l'hôpital, l'école, la participation, oublions les réponses qu'il faut bien faire puisque la question a été posée, sur la vie privée par exemple. Ce qui compte dans cette conférence, c'est trois points, pas plus, pas moins:



1- "Oui" à la fin des 35 heures. Enfin! Pour la première fois, Sarkozy l'avoue, il se passe de la formalité sur les 35 heures "acquis social", il dit ce qu'il a sur le coeur et dans sa tête: il faut en finir avec les 35 heures. Ce dont la droite et le Medef rêvent depuis 10 ans, Sarkozy le fait. Les choses sont désormais claires, la phrase a été lâchée, on la retiendra, et avec elle ce qu'elle signifie: la réduction du temps de travail, défendue par la gauche depuis ses origines, vecteur puissant de progrès social, est abandonnée. Qu'une partie de l'opinion, y compris à gauche, adhère à cette critique des 35 heures (sans nécessairement demander leur abandon), c'est un autre problème. DSK a eu raison de dire que les 35 heures étaient derrière nous. Mais ce n'était pas vouloir leur suppression, contrairement à ce qu'a prétendu Xavier Bertrand à l'Assemblée nationale cet après-midi. Car le ministre du Travail, l'un des serviteurs les plus zélés du président, a repris la déclaration du matin, en réaffirmant que la page des 35 heures étaient désormais tournée. En fin d'après-midi, sur RTL, Henri Guaino, le conseiller le plus zélé du président, a été plus contourné, et même carrément hypocrite: la durée légale restera la même, mais des accords majoritaires d'entreprises ou de branches pourront déroger à cette durée légale.

2- Sur le pouvoir d'achat, Sarkozy était attendu. Sa campagne était fortement concentrée sur ce thème, qu'il avait réactivé en fin d'année, annonçant de prochaines initiatives. Et ce matin, que déclare-t-il? Qu'il n'y a pas que le pouvoir d'achat ... Si bien qu'il n'en parle pas, n'avance rien! C'est ce que j'appelle un aveu, conscient ou non, d'échec, que la "politique de civilisation" est chargée de masquer. Qu'il n'y ait pas que le pouvoir d'achat dans une action politique en faveur des salariés, je suis bien d'accord. Il y a aussi, et c'est autant important, les conditions de travail, la création d'emploi, la réduction des inégalités, etc. Mais c'est Sarkozy qui a choisi de mettre en avant l'augmentation du pouvoir d'achat. Et maintenant, plus rien!

3- Supprimer les 35 heures, abandonner la valorisation du pouvoir d'achat, il fallait un contrepoids, un contre-feu à ces deux décisions, pour les faire accepter et les faire oublier. Quoi de mieux, c'est la tactique Sarkozy, que de lancer une "révolution", rien que ça, pour plaire à la gauche et poursuivre sa déstabilisation. Cette fois, le président est allé chercher du côté de l'audio-visuel sa nouvelle idée: supprimer la publicité sur les télévisions de service public. Généralement, quand on est de gauche, la pub, on n'aime pas trop, à la télévision encore moins, et au milieu des films, pas du tout. Donc, Sarkozy croit une fois de plus jouer un bon tour à la gauche en faisant cette "révolution": décommercialiser les chaînes de télévision appartenant au service public. Sauf que la manoeuvre est grossière: la télé publique vit en grande partie de la publicité. Que va-t-il alors se passer? Va-t-on augmenter la redevance? Qui tirerait les bénéfices d'une telle décision? Les chaînes privées, dont les actions en bourse ont d'ailleurs, après la conférence du chef de l'Etat, augmenté. Normal: elles verront leur marché s'accroitre considérablement.

Deux vrais coups à droite, un faux coup à gauche, voilà la conférence de presse de Nicolas Sarkozy, devant 600 journalistes dont Alain Duhamel lui-même a dit qu'ils n'avaient pas fait leur métier de journaliste, aucune question véritablement dérangeante ne troublant le propos présidentiel, et surtout aucun droit de suite n'étant pratiqué, à la différence de la presse américaine.


Bonne soirée.

2 Comments:

  • Sur l'audiovisiuel, j'y vois 2 suites possibles et pas spécialement contradictoires.

    1) Il se dit que Bouygues pourrait bientot revendre TF1. Or les actions de la chaine ont fortement chuté en 2007. Et là, au miracle de la parole présidentielle, l'action a bondi en bourse. Ben oui, moins d epub sur france télévision, c'est davantage pour TF1... L'annonce est intéressante pour Buygues, un ami du président!!!

    2) France télévision pourra-t-il maintenir la même voilure sans les recettes publicitaires? Sarko annonce des compensations par une taxe sur les pub des chaines privées. Mais cela sera-t-il suffisant? A moins...A moins...A moins que le groupe publique diminue son nombre de chaine...Et voici revenu la vielle idée d'une privatisation de France 2!!! Lagardère en rève depuis longtemps...Tiens lagardère, un autre ami du président...

    By Anonymous Anonyme, at 9:15 PM  

  • Bizarre quand même que cette idée d'une taxation de la publicité sur les chaînes privées pour compenser la disparition de la pub sur les chaînes publiques. Il y a quelque chose de baroque dans le sarkozysme.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 12:41 PM  

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