L'Aisne avec DSK

16 mars 2008

Conseil de guerre?

Je suis allé hier à la mise en place du conseil municipal de Saint-Quentin, au palais de Fervaques, mais avec une heure de retard. Je n'ai donc pas tout vu, tout entendu, et je m'appuie aussi sur le compte-rendu de la presse locale pour vous donner mon avis. La salle était pleine. Dans quelques semaines, lors des conseils municipaux ordinaires, nous ne serons plus que quelques uns, au mieux une vingtaine. Hier, la séance était solennelle. Il y avait aussi le petit suspense dans la distribution des postes d'adjoints. Et puis, un premier conseil municipal donne un peu le ton des suivants, pendant six ans. De ce point de vue, je n'ai pas hélas été déçu et le type d'opposition que je craignais s'est mis en place.

D'abord, il y a le climat. C'est subjectif mais c'est important. Le Courrier Picard parle de "férocité". Je n'irai sans doute pas jusque là, mais j'ai senti la tension et de la brutalité dans les échanges. La droite trouve peut-être son compte à s'affronter à une gauche caricaturale et vulnérable, la gauche se plaît certainement à jouer le rôle déplacé de procureur. Et je ne vois pas pourquoi celle-ci laisse entendre que la précédente opposition municipale aurait manqué de force. Odette Grzegzulka n'était pas particulièrement tendre avec Pierre André. De 1995 à 2001, celui qui se présente aujourd'hui comme un modèle avant d'avoir fait ses preuves a-t-il laissé alors un souvenir impérissable d'opposant efficace? Alors, un peu de modestie, s'il vous plaît.

J'en viens au fond. Demander une représentation dans la communauté d'agglomération est une bonne chose. Faire un plaidoyer pour la démocratie dans une instance trop administrative, c'est parfait. Sauf que la loi n'oblige pas le maire à répondre positivement à cette revendication. On peut parler haut et fort tant qu'on voudra, ce qu'on ne peut pas avoir, on ne l'obtient pas. Hier s'est dessinée une ligne d'opposition qui n'est pas la mienne. Je voulais, je l'ai dit et écrit, ici même, une opposition constructive, qui propose autant qu'elle s'oppose. Attaquer frontalement Pierre André, on le peut, mais ça sert à quoi? L'opposition doit être utile à quelque chose, sinon pas la peine de venir siéger. Et sur ce point, nous ferons un bilan dans six mois et nous verrons ensemble ce qu'il en sera...

Je suis persuadé qu'un dialogue républicain au niveau local peut amener à satisfaire certaines revendications qui sont les nôtres, dont celle d'une démocratisation des conseils d'agglomération. Mais on n'y parvient pas en posant un pistolet sur la table. Le maire n'est pas suicidaire, mais je me demande parfois si la gauche ne l'est pas: André n'allait pas nous faire le cadeau de quatre conseillers d'agglomération alors que Lançon a juré de lui faire la peau. Aurai-je à sa place obtenu satisfaction? Allez savoir! Peut-être pas quatre, mais deux, pourquoi pas. Je ne joue bêtement au plus malin, je crois simplement qu'une autre forme d'opposition est possible, plus en phase avec ce qu'est devenue notre société et ce que sont les attentes de la population.

Je lisais cet après-midi l'excellent dossier de L'Express consacré à "Saint-Quentin en 1950", dont je vous reparlerai. Je ne voudrais pas que nous ayons une opposition des années 50 mais je crains fort que nous en prenions le chemin. Dans le dialogue, en avançant des arguments, en montrant qu'on est là pour construire et pas pour casser, en distinguant le niveau local où des points de consensus sont possibles et le niveau national où les grands choix politiques nous différencient, je reste convaincu qu'on peut se faire entendre et montrer ainsi à la population qu'on n'a pas été élu pour rien ou seulement pour gueuler.

Le climat d'hier, je ne m'y suis pas reconnu. Conseil municipal ou conseil de guerre? Quand j'entend le maire parler de "déshonneur" et de "honte" à propos du chef de file de l'opposition, quand il utilise un ton menaçant à son encontre, je me dis qu'on est mal parti, très mal parti. Qu'est-ce que la gauche va obtenir dans de telles conditions? Au mieux le contentement psychologique d'emmerder la droite. Vous ne croyez pas que que les Saint-Quentinois attendent autre chose de nous? Le problème, c'est que la gauche est plombée par le choix de la tête de liste. Le maire a beau jeu de lui rappeler à chaque fois ses responsabilités au sein du district... il y a 15 ans. Trop facile mais assez payant!

Nous nous sommes mis la tête dans le guêpier. Dieu sait si je n'étais pas toujours d'accord avec Odette, mais il y a un point sur lequel nous étions absolument en phase, validé en son temps unanimement par les socialistes: tourner définitivement la page du passé. Pierre André prend un malin plaisir à nous ramener loin en arrière alors que les socialistes devraient aller de l'avant. Nous avons accepté collectivement (et aveuglement) cette vulnérabilité, nous en subirons pendant six ans les conséquences. J'ai tout fait personnellement pour éviter ce scénario qui l'a finalement, hélas, emporté, avec la bénédiction d'Anne Ferreira. Nous ne mesurons pas encore aujourd'hui la gravité de l'erreur, mais les yeux progressivement s'ouvriront.

Lors de cette installation du conseil municipal, Antonio Ribeiro, le représentant très récent du MRC, a cru bon proposer de remplacer Freddy Grzeziczak par Vincent Savelli aux affaires sociales. C'est amusant, Freddy mérite sûrement qu'on le charrie depuis que la droite lui a obtenu une belle écharpe tricolore, mon collègue Savelli, si actif, ne mérite pas ce qui lui arrive, mais je ne pense pas qu'un conseil municipal soit un lieu d'amusement ou de blague. De plus, je lis ceci dans une brève du Courrier Picard:

"Les élus d'opposition ont traîné les pieds pour la photo officielle sur les marches intérieures du palais de Fervaques. La plupart n'avaient pas envie de poser avec l'ennemi bourgeois, même au lointain dernier rang."

Ridicule, parfaitement ridicule. Et quand Jean-Pierre Lançon déclare, dans L'Union du 14 mars, à propos de ses colistiers d'extrême gauche: "Ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous sépare", je le demande à vous tous: Qui va arrêter ça? Qui va stopper cette dérive? Sommes-nous encore au Parti socialiste? Allez demander à l'extrême gauche si elle tiendrait des propos analogues sur les socialistes. Bien sûr que non! Tout cela m'est insupportable. Je ne sais pas ce que politiquement je deviendrai, peut-être rien, ce sont mes camarades qui en décideront. Mais ce que je sais, c'est que je ferai tout, dans les prochains mois, les prochaines années, pour montrer, activement, qu'il existe à Saint-Quentin une autre façon d'être socialiste, une autre façon de concevoir l'opposition, une façon plus conforme à l'histoire et à la ligne nationale du Parti socialiste.


Bonne soirée électorale.