Le million contre Bertrand.
Bernard Thibault n'a pas calmé sa colère contre Bertrand, Sarkozy et le gouvernement à propos des 35 heures, ou plutôt de la fin des 35 heures. Car c'est bien vers cela qu'on s'achemine sournoisement, sous prétexte d'un accord sur la représentativité syndicale dans les entreprises, trahi dans une partie de son contenu. Il y en a un qui a tout compris et qui dit les choses plus franchement (ou moins habilement?) que Bertrand, c'est Devedjian, très remonté la semaine dernière, très apaisé hier, lorsqu'il a déclaré qu'il pourrait "ne plus y avoir du tout de système des 35 heures" avec ce que propose le gouvernement. L'UMP a gagné. On comprend la colère de la CGT, qui veut vraiment marquer le coup le 17 juin, en se donnant l'objectif, inhabituel et risqué, de mettre un million de manifestants dans la rue.
Je l'ai dit, je le redis: avec sa loi dite de la démocratie sociale, Xavier Bertrand a commis son premier faux pas, c'est-à-dire qu'il a montré son vrai visage, ses intentions réelles. Il ne pourra plus se targuer d'être un ministre "social". Antisocial, voilà son nouveau titre, et bien mérité, jugez-en plutôt:
Sa "démocratie sociale" n'est ni démocratique, ni sociale. J'appelle "démocratie" tout système respectant le principe majoritaire. Avec la loi Bertrand, 30% de salariés suffisent pour déroger à la loi sur les 35 heures. Socialement, c'est la catastrophe, du jamais vu. Les contingents d'heures supplémentaires étaient jusqu'à maintenant fixés par la loi. Fini. Ce sont les accords d'entreprises qui vont en décider, et sans avoir besoin de l'autorisation de l'Inspection du Travail. Même chose pour les repos compensateurs, même chose pour la majoration des heures supplémentaires. En matière d'horaires, la régression est impressionnante, les garanties élémentaires sautent: L'annualisation permettra une semaine de 48 heures dans un trimestre travaillé en moyenne 35 heures. Le forfait d'heures autorisera des journées à 13 heures, et pas payées en heures sup.
Vous me direz peut-être que ce sont des maximas, que le patronat est raisonnable, que ces propositions sont surtout applicables dans des situations professionnelles particulières. Moi, ce que je retiens, c'est que des garanties légales protectrices pour les salariés disparaissent et ne sont remplacées que par le maigre espoir de gagner un peu plus en travaillant plus. Objectivement, le compte n'y est vraiment pas. Dans des milliers de PME-PMI sans présence syndicale forte, les salariés seront livrés au bon vouloir patronal, qui n'est pas nécessairement désintéressé ou animé par l'esprit de justice. Non pas que je sois hostile au patronat, loin de là, mais je crois qu'il défendra d'abord ses intérêts, comme n'importe quel être humain ou groupe d'êtres humains. Dans l'entreprise comme partout, la force est du côté du pouvoir. C'est le pouvoir patronal que Xavier Bertrand vient, avec sa loi, de renforcer.
Sa responsabilité est d'autant plus grande et grave que la CGT, sur les 35 heures, en signant l'accord du 9 avril, avait fait un nouveau et louable effort vers le réformisme, concédant au patronat qu'on pouvait assouplir les 35 heures en augmentant expérimentalement le contingent d'heures supplémentaires. En vérité, la droite veut casser le réformisme, aussi bien syndical que politique. Des syndicats contestataires, des partis révolutionnaires, voilà ce qu'il lui faut pour éviter de faire des concessions dans le compromis social. Le pouvoir cherche toujours l'affrontement quand il sait qu'il en sortira vainqueur.
Pour la CGT, le pari du million n'est pas gagné. FO, Unsa, CFTC, CGC ne vont pas se joindre au mouvement du 17 juin. L'accord du 9 avril ne leur convient pas, détériorant leur représentation syndicale dans les entreprises. Or Thibault appelle à manifester pour le respect de cet accord. Bertrand, depuis le début, sait tout ça. Sa ruse est là: s'appuyer sur un texte en le distordant, tout en sachant que tous les syndicats ne le défendront pas. C'est le bon tour qu'il a voulu leur jouer. Y parviendra-t-il? Réponse le 17 juin.
En dehors de ces divergence syndicale, il faut que les socialistes se lancent dans cette bataille politique de défense des 35 heures. Cette réforme est leur réforme, qui est un thème identitaire pour la gauche. Si Martine Aubry a été hier tant applaudie, c'est qu'elle incarne cette réduction du temps de travail.
Bonne fin d'après-midi.
Je l'ai dit, je le redis: avec sa loi dite de la démocratie sociale, Xavier Bertrand a commis son premier faux pas, c'est-à-dire qu'il a montré son vrai visage, ses intentions réelles. Il ne pourra plus se targuer d'être un ministre "social". Antisocial, voilà son nouveau titre, et bien mérité, jugez-en plutôt:
Sa "démocratie sociale" n'est ni démocratique, ni sociale. J'appelle "démocratie" tout système respectant le principe majoritaire. Avec la loi Bertrand, 30% de salariés suffisent pour déroger à la loi sur les 35 heures. Socialement, c'est la catastrophe, du jamais vu. Les contingents d'heures supplémentaires étaient jusqu'à maintenant fixés par la loi. Fini. Ce sont les accords d'entreprises qui vont en décider, et sans avoir besoin de l'autorisation de l'Inspection du Travail. Même chose pour les repos compensateurs, même chose pour la majoration des heures supplémentaires. En matière d'horaires, la régression est impressionnante, les garanties élémentaires sautent: L'annualisation permettra une semaine de 48 heures dans un trimestre travaillé en moyenne 35 heures. Le forfait d'heures autorisera des journées à 13 heures, et pas payées en heures sup.
Vous me direz peut-être que ce sont des maximas, que le patronat est raisonnable, que ces propositions sont surtout applicables dans des situations professionnelles particulières. Moi, ce que je retiens, c'est que des garanties légales protectrices pour les salariés disparaissent et ne sont remplacées que par le maigre espoir de gagner un peu plus en travaillant plus. Objectivement, le compte n'y est vraiment pas. Dans des milliers de PME-PMI sans présence syndicale forte, les salariés seront livrés au bon vouloir patronal, qui n'est pas nécessairement désintéressé ou animé par l'esprit de justice. Non pas que je sois hostile au patronat, loin de là, mais je crois qu'il défendra d'abord ses intérêts, comme n'importe quel être humain ou groupe d'êtres humains. Dans l'entreprise comme partout, la force est du côté du pouvoir. C'est le pouvoir patronal que Xavier Bertrand vient, avec sa loi, de renforcer.
Sa responsabilité est d'autant plus grande et grave que la CGT, sur les 35 heures, en signant l'accord du 9 avril, avait fait un nouveau et louable effort vers le réformisme, concédant au patronat qu'on pouvait assouplir les 35 heures en augmentant expérimentalement le contingent d'heures supplémentaires. En vérité, la droite veut casser le réformisme, aussi bien syndical que politique. Des syndicats contestataires, des partis révolutionnaires, voilà ce qu'il lui faut pour éviter de faire des concessions dans le compromis social. Le pouvoir cherche toujours l'affrontement quand il sait qu'il en sortira vainqueur.
Pour la CGT, le pari du million n'est pas gagné. FO, Unsa, CFTC, CGC ne vont pas se joindre au mouvement du 17 juin. L'accord du 9 avril ne leur convient pas, détériorant leur représentation syndicale dans les entreprises. Or Thibault appelle à manifester pour le respect de cet accord. Bertrand, depuis le début, sait tout ça. Sa ruse est là: s'appuyer sur un texte en le distordant, tout en sachant que tous les syndicats ne le défendront pas. C'est le bon tour qu'il a voulu leur jouer. Y parviendra-t-il? Réponse le 17 juin.
En dehors de ces divergence syndicale, il faut que les socialistes se lancent dans cette bataille politique de défense des 35 heures. Cette réforme est leur réforme, qui est un thème identitaire pour la gauche. Si Martine Aubry a été hier tant applaudie, c'est qu'elle incarne cette réduction du temps de travail.
Bonne fin d'après-midi.
5 Comments:
C'est une politique de bouts de chandelles que mène le gouvernement. Ce n'est pas en désorganisant l'existant qu'on l'améliore, c'est en proposant mieux que ce qui existe. Apparement le pouvoir en place en est incapable. Des mesurettes telles que celles préconisées par le rapport Attali, la loi de la jungle en lieu et place d'un cadre légal ou chacun se sente à sa place et où le dialogue social soit la règle, bref du n'importe quoi. Aucune vision, une gestion d'épicier. Pour tout dire la médiocrité à l'état brut. Ce n'est pas en tirant l'ensemble du monde du travail vers le bas que l'on pourra s'en sortir vis-à-vis de la mondialisation et que l'on trouvera un substitut au changement indispensable à mener pour passer des énergies fossiles aux énergies renouvelables.
Ce n'est pas par le stress et la précarité généralisée que l'on peut mobiliser les énergies pour gagner ce challenge. L'échec a rendez-vous avec Sarkozy, il ne voit rien.
By jpbb, at 10:02 PM
Je n'aimerai vraiment pas etre à la place de Mr Thibault.
Il a perdu et il le sait.
Avant meme de commencer, il savait qu'il ne pouvait pas gagner car il défendait l'indéfendable.
Mais comme c'est son role, il s'y est tenu.
Juste une précision quand meme de quelle pme etes vous en train de nous parler ?
Celles qui sont passés aux 35h ou celles qui n'y seront jamais et qui sont majoritaires ?
Vous reconnaissez vous meme que les syndicats sont peu présent dans ces entreprises et vous nous expliquez ensuite que ces syndicats peu présent sur le terrain seraient les mieux à meme de comprendre et de défendre les salariés de ces entreprises.
Les salariés de ces entreprises sont donc inconscient à ce point, les pressions qu'ils subissent sont donc si pesantes.
Certainement, l'autre option serait que ces syndicats majoritairement présent dans la fonction publique défendraient surtout les intérets de la fonction publique.
Cela ne peut etre évidement.
Et c'est forcément et uniquement de la faute du méchant patronnat si un syndicat comme la cgt par exemple qui avait une majorité d'adhérent dans le secteur marchand a vu ses effectifs fondre comme neige au soleil en 30a.
L'idéologie pousssé à l'extreme doit avoir des limites.
D'ailleurs, j'ai été surpris d'apprendre que la cgt était en danger de ne plus etre un syndicat réformiste.
Je croyais que le sujet était tabou que dans les faits ct plus ou moins ce qui s'était produit mais qu'il ne fallait pas en parler.
quand je parlais des promesses intenables de Mr Thibault, ce n'était pas par rapport à l'opinion mais par rapport à sa base.
Ce que je retire de votre post, c'est que ceux qui devraient etre en situation de négocier avec l'état n'en sont pas capable car ils ne sont pas capable de se mettre d'accord entre eux et de s'organiser et c'est forcément la faute du gouvernement.
On aurait d'un coté, un gouvernement organisé qui saurait défendre ses idées et les faire passer et de l'autre des interlocuteurs plus en difficulté.
Evidement tout cela ne doit rien avoir à voir avec le choix des hommes et leur compétences, le ministre Bertrand est un maillon faible, l'oracle Mousset l'a suffisamment dit et répété.
Encore un conseil de lecture,
Management de ce mois, vous y trouverez un dossier assez intéressant sur la négociation.
Ne jamais oublier que pour négocier il faut etre 2 et qu'on ne peut pas négocier ce qui ne peut l'etre.
Des négociations de ce type vous avez du en avoir et elles n'ont pas abouti avec JPL parce que vous ne vouliez pas négocier.
Comme quoi c'est toujours facile de rejeter la faute sur son interlocuteur quand on refuse de négocier avec lui.
By grandourscharmant, at 8:16 AM
Vous avez une façon de retourner mes propos qui est assez... renversante. C'est moi, le social-démocrate, le réformiste, qui n'aimerait pas la négociation, alors que c'est ce que je prône constamment, et entre partenaires sociaux, et entre socialistes! Il y a chez vous un peu de perversité à me faire passer pour le contraire de ce que je suis!
Sur la désaffection envers les syndicats: vous les tenez pour responsables. J'y vois plutôt une conséquence des évolutions de notre société: individualisme, méfiance envers les organisations, etc. Quant aux petites entreprises, elles n'ont jamais connu de forts taux de syndicalisation.
By Emmanuel Mousset, at 10:13 AM
pourquoi ?
parce que je vous présente tel que vous etes et tel que les autres vous perçoivent et non pas tel que vous aimez à vous présenter ?
N'oubliez pas que je ne suis là que pour vous nuire, que je suis méchant, que je ne suis pas objectif.
quand on passe son temps à proner mes intérets particuliers sont supérieurs aux intérets du groupe
comment voulez faire comprendre aux gens qu'à long terme, les intérets particuliers et les intérets généraux se rejoignent si bien sur à court terme on privilegie les intérets du groupe.
Qu'est ce qui est nécessaire,
qu'est ce qui est suffisant,
qu'est ce qui est superflu
et surtout à qui cela profite ?
A défaut d'avoir pu assister à l'enregistrement de l'émission, ce matin, détendez-vous en écoutant Xavier chez les grosses tetes de RTL à 16h aujourd'hui
si cela ce n'est pas une consécration.
By grandourscharmant, at 12:22 PM
Votre dernier propos est-il une blague? Le populisme de Bertrand le conduirait jusqu'aux Grosses Têtes? C'est au demeurant une excellente émission, mais un ministre n'y a pas sa place. Laissez ça à Besancenot, qui lui aussi a rigolé avec Bouvard. C'est de Gaulle qui, une fois de plus, doit se retourner dans sa tombe! Après la droite bling-bling de Sarkozy, la droite ouaf-ouaf de Bertrand. Qu'est-ce qu'on se marre!
By Emmanuel Mousset, at 3:55 PM
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