L'Aisne avec DSK

25 décembre 2008

L'Amérique bombe le torse.

Rien de telle que la nuit de Noël pour vous soumettre une petite réflexion politique. Puisque nous sommes sur le net, ce sera l'objet de ma pensée: qu'est-ce qui fait vibrer la toile en cette nuit de la Nativité, et depuis plusieurs heures? Les photos d'Obama torse nu sur une plage d'Hawaï. C'est, vous me direz, une information qui ne mérite aucun commentaire et qui relève plutôt d'un gentil divertissement. Pas d'accord: des images qui circulent à travers le monde, une information universellement reprise, aussi anodine soit-elle, cesse alors de l'être.

A travers ce buzz, c'est quelque chose qui s'exprime et qui mérite l'analyse: le culte de la jeunesse (surtout chez quelqu'un qui, à 47 ans, n'est plus vraiment jeune), le culte du corps, le culte de la beauté, le culte du sport. En se transmettant massivement ces images, les sociétés contemporaines nous rappellent à quelles valeurs elles adhèrent, qui n'ont d'ailleurs rien de déshonorantes, mais qui sont très éloignées du message primitif de Noël.

Les pectoraux et le ventre plat d'Obama, c'est aussi la fascination qu'exerce à travers le monde l'Amérique, qui s'offre ainsi une cure de rajeunissement, une thalassothéraphie politique. C'est aussi, hélas, la politique ramenée à ce qu'elle a de plus superficiel, de plus trompeur. Tout a commencé, déjà, là-bas, il y a 50 ans, avec Kennedy, le beau gosse, gendre parfait et idéaliste généreux.

La vérité, nous la connaissons aujourd'hui: Kennedy était un malade sexuel, un ambitieux prêt à tout et un piètre politique, ne réglant rien à la question du Vietnam, ratant lamentablement le débarquement de la Baie des Cochons. Sa seule grande décision politique, c'est la conquête de la Lune. Et pourtant, Nixon, qui a sorti son pays du bourbier vietnamien, est resté dans l'opinion un Mickey à sale gueule, le mythe Kennedy, complètement artificiel, continuant à opérer longtemps après sa disparition.

Pendant longtemps, en France, nous avons échappé à la politique-spectacle. En 1965, Jean Lecanuet, voulant jouer au Kennedy français, a hérité du surnom de "dents blanches". Qui aujourd'hui oserait se moquer d'Obama montrant ses muscles? Et ne me dites pas que ce sont des photos volées: nous vivons une époque où le faux est criant de vérité. Il suffit de se demander à qui profite l'information.

Il y a deux ans, le Premier ministre Villepin avait lui aussi joué les maîtres-nageurs à la sortie du bain, pour montrer qu'il n'avait aucune graisse. Mais où va la politique? De Gaulle, qui avait désobéi à l'Etat français, s'était affronté à la puissance allemande, avait échappé à plusieurs attentats, ne ressentait pas le besoin de se montrer en maillot de bain! Pauvre monde, triste époque, qui s'extasient devant le corps de l'homme le plus puissant du monde, ceci expliquant cela!


Bonne nuit de Noël.