Notre mort nous appartient.
La mort peut-elle être un droit? Non, ce n'est pas un sujet de philo, c'est une question politique, celle de l'euthanasie, interdite en France. La loi du 22 avril 2005 va loin, mais pas jusque là. Elle autorise à laisser mourir, à arrêter un traitement inutile quand la situation est désespérée, à administrer un puissant sédatif qui provoque l'endormissement presque total et abrège la vie. C'est beaucoup, ce n'est pas tout, ce n'est pas l'euthanasie, c'est-à-dire le choix de sa mort, légalement admise et techniquement permise. Car il n'est pas si simple de mourir, quoi qu'on dise. Le philosophe contemporain Gilles Deleuze a fait le saut de l'ange pour mettre fin à ses jours. Mourir écrasé au sol, c'était sa seule issue.
Un rapport récent, que j'ai évoqué sur ce blog il y a quelque temps, le rapport du député UMP Leonetti, ne change presque rien à la loi et n'avance pas vers l'euthanasie. La sédation terminale pourra être arrêtée, l'interruption des traitements inclura la famille, et pas seulement le médecin. Le reste repose sur le développement des soins palliatifs. Le socialiste Gaëtan Gorce avait suggéré une sorte d'euthanasie exceptionnelle dans les cas les plus dramatiques. Même cette mesure a été rejetée.
Pourquoi le projet d'euthanasie passe-t-il très mal? Le corps médical, à travers ses grands médecins et professeurs, a toujours été très conservateur. Son objectif, évidemment louable, est de guérir, pas de tuer. Au nom de ce principe apparemment éminent, on a longtemps soigné en refusant de soulager, en méconnaissant le traitement de la souffrance. Pour la mort volontaire, on en est encore là. Laisser mourir, à la limite oui, faire mourir, non, le corps médical ne veut pas, ou bien clandestinement, individuellement, illégalement.
L'euthanasie et son refus posent quatre problèmes:
1- La mort: est-elle en soi à rejeter, est-elle absolument mauvaise? Non, quand la vie, qui est une valeur supérieure à la mort, n'est plus une vie, quand la souffrance détruit tout, quand un homme n'est plus un homme, enfermé irrévocablement dans la peur et le désespoir. Là, personnellement, réduit à n'être plus que ça, j'aimerais en finir, et vite.
2- La liberté: "la liberté du malade qui demande la mort est un leurre", estime Jean Leonetti. Je crois en la liberté, qui est un absolu que rien ne peut altérer, pas même la souffrance. Si l'homme est libre, il l'est en toutes circonstances, et la société se doit de respecter cette liberté, y compris quand elle réclame l'acte fatal. Cette liberté ne peut pas s'exercer dans la solitude du geste irréparable, car nous parlons ici de malades, d'êtres dépendants, qui ne peuvent plus vivre seuls, qui peuvent encore moins mourir seuls. Il est question ici de droit à la mort, pas de droit au suicide. Les amants éplorés n'ont pas besoin d'une loi pour préférer la mort à la vie.
3- Le droit: il est actuellement dramatiquement imprécis et inadapté. L'euthanasie, donner la mort à un tiers à sa demande, est un homicide volontaire, mais il n'y a pas incrimination lorsqu'il y a complicité dans une aide au suicide. La frontière est confuse. La grande peur des anti-euthanasie, c'est la banalisation de la mort, un droit comme un autre dont on pourrait user et abuser. Je n'ai pas cette crainte. Un droit est une possibilité souvent pour éviter le pire, pas une nécessité qui deviendrait la norme. Le droit d'avorter ne promeut pas l'avortement, il instaure une liberté et une propriété, celle de son corps.
4- La laïcité: eh oui, je me demande si le combat pour l'euthanasie n'est pas le dernier combat laïque. Notre corps nous appartient, notre vie et aussi notre mort. Chacun doit être libre d'en faire ce qu'il veut. Je ne dis pas qu'il est glorieux de mettre fin à ses jours, je respecte ceux qui pensent que la souffrance peut être rédemptrice et que la vie est sacrée, même quand elle est réduite au fonctionnement purement biologique. Mais, en tant que laïque, je demande à ce que la société, l'Etat, les pouvoirs n'imposent rien à personne, ni dans un sens ni dans un autre.
Vendredi soir, à l'hôpital de Saint-Quentin, Olivier Jardé, député Nouveau Centre d'Amiens, est venu défendre la petite révision de la loi Leonetti. Dans notre ville, l'association Jalmav, luttant pour les soins palliatifs et l'accompagnement de la fin de vie, est très active et influente. Dans les deux cas, les pro-euthanasie sont absents. Il faut remédier à ce profil bas, s'organiser collectivement, s'exprimer publiquement, dépasser sur ce point les clivages politiques.
L'UMP Vincent Savelli est en pointe dans le combat pour l'euthanasie. Il faut qu'on fasse quelque chose ensemble dans le premier trimestre de la nouvelle année. A l'Assemblée Nationale, certains députés PS et UMP vont se rapprocher pour tenter de relancer le débat sur et pour l'euthanasie. Fabius et Valls sont sur cette ligne. A Saint-Quentin aussi, nous devons militer en ce sens.
Bonne fin d'après-midi.
Un rapport récent, que j'ai évoqué sur ce blog il y a quelque temps, le rapport du député UMP Leonetti, ne change presque rien à la loi et n'avance pas vers l'euthanasie. La sédation terminale pourra être arrêtée, l'interruption des traitements inclura la famille, et pas seulement le médecin. Le reste repose sur le développement des soins palliatifs. Le socialiste Gaëtan Gorce avait suggéré une sorte d'euthanasie exceptionnelle dans les cas les plus dramatiques. Même cette mesure a été rejetée.
Pourquoi le projet d'euthanasie passe-t-il très mal? Le corps médical, à travers ses grands médecins et professeurs, a toujours été très conservateur. Son objectif, évidemment louable, est de guérir, pas de tuer. Au nom de ce principe apparemment éminent, on a longtemps soigné en refusant de soulager, en méconnaissant le traitement de la souffrance. Pour la mort volontaire, on en est encore là. Laisser mourir, à la limite oui, faire mourir, non, le corps médical ne veut pas, ou bien clandestinement, individuellement, illégalement.
L'euthanasie et son refus posent quatre problèmes:
1- La mort: est-elle en soi à rejeter, est-elle absolument mauvaise? Non, quand la vie, qui est une valeur supérieure à la mort, n'est plus une vie, quand la souffrance détruit tout, quand un homme n'est plus un homme, enfermé irrévocablement dans la peur et le désespoir. Là, personnellement, réduit à n'être plus que ça, j'aimerais en finir, et vite.
2- La liberté: "la liberté du malade qui demande la mort est un leurre", estime Jean Leonetti. Je crois en la liberté, qui est un absolu que rien ne peut altérer, pas même la souffrance. Si l'homme est libre, il l'est en toutes circonstances, et la société se doit de respecter cette liberté, y compris quand elle réclame l'acte fatal. Cette liberté ne peut pas s'exercer dans la solitude du geste irréparable, car nous parlons ici de malades, d'êtres dépendants, qui ne peuvent plus vivre seuls, qui peuvent encore moins mourir seuls. Il est question ici de droit à la mort, pas de droit au suicide. Les amants éplorés n'ont pas besoin d'une loi pour préférer la mort à la vie.
3- Le droit: il est actuellement dramatiquement imprécis et inadapté. L'euthanasie, donner la mort à un tiers à sa demande, est un homicide volontaire, mais il n'y a pas incrimination lorsqu'il y a complicité dans une aide au suicide. La frontière est confuse. La grande peur des anti-euthanasie, c'est la banalisation de la mort, un droit comme un autre dont on pourrait user et abuser. Je n'ai pas cette crainte. Un droit est une possibilité souvent pour éviter le pire, pas une nécessité qui deviendrait la norme. Le droit d'avorter ne promeut pas l'avortement, il instaure une liberté et une propriété, celle de son corps.
4- La laïcité: eh oui, je me demande si le combat pour l'euthanasie n'est pas le dernier combat laïque. Notre corps nous appartient, notre vie et aussi notre mort. Chacun doit être libre d'en faire ce qu'il veut. Je ne dis pas qu'il est glorieux de mettre fin à ses jours, je respecte ceux qui pensent que la souffrance peut être rédemptrice et que la vie est sacrée, même quand elle est réduite au fonctionnement purement biologique. Mais, en tant que laïque, je demande à ce que la société, l'Etat, les pouvoirs n'imposent rien à personne, ni dans un sens ni dans un autre.
Vendredi soir, à l'hôpital de Saint-Quentin, Olivier Jardé, député Nouveau Centre d'Amiens, est venu défendre la petite révision de la loi Leonetti. Dans notre ville, l'association Jalmav, luttant pour les soins palliatifs et l'accompagnement de la fin de vie, est très active et influente. Dans les deux cas, les pro-euthanasie sont absents. Il faut remédier à ce profil bas, s'organiser collectivement, s'exprimer publiquement, dépasser sur ce point les clivages politiques.
L'UMP Vincent Savelli est en pointe dans le combat pour l'euthanasie. Il faut qu'on fasse quelque chose ensemble dans le premier trimestre de la nouvelle année. A l'Assemblée Nationale, certains députés PS et UMP vont se rapprocher pour tenter de relancer le débat sur et pour l'euthanasie. Fabius et Valls sont sur cette ligne. A Saint-Quentin aussi, nous devons militer en ce sens.
Bonne fin d'après-midi.
2 Comments:
Je ne suis pas sur que vous vous rendiez bien compte de la signification et de la portée de vos propos.
Et de toutes les conséquences induites, si on applique cela au pied de la lettre.
By grandourscharmant, at 3:01 PM
Vous êtes pour ou contre l'euthanasie? Si vous êtes contre, dites-le clairement, au lieu de tourner autour du pot.
By Emmanuel Mousset, at 6:43 PM
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