VS: premières réflexions.
Bonjour à toutes et à tous.
Je ne suis pas encore entré dans le dossier "vidéo-surveillance", assez épais, mais je vous livre quelques réflexions préalables, à partir de l'article consacré à ce sujet par Karine Perocheau dans L'Aisne Nouvelle de jeudi dernier. Sa conclusion est que les Saint-Quentinois ne craignent pas les caméras et que les commerçants sont demandeurs. C'est pourquoi, je crois, la gauche doit se saisir de ce thème avec discernement, ne pas se laisser enfermer dans la caricature d'elle-même, que la droite ne manquera pas de faire (n'est-ce pas déjà commencé?).
Je vois quatre questions fondamentales (et une cinquième que j'aborderai dans un billet suivant):
1- L'insécurité à Saint-Quentin est-elle une réalité à traiter ou un sentiment infondé, exagéré? Personnellement, je me sens en sécurité dans notre ville. Mais quand je vivais à Paris, d'abord à Pantin puis dans le XIXème, je me sentais déjà en sécurité. J'ai énormément utilisé le métro, tard le soir, je n'ai jamais eu peur ni rencontré de problèmes.
Sauf qu'on ne fait pas de la politique seulement avec une expérience personnelle mais à partir d'un vécu collectif. Que je ne partage pas ce sentiment d'insécurité qu'éprouvent nombre de mes concitoyens, tout le monde s'en fout. Ce qui compte, ce sur quoi il faut s'interroger, ce à quoi il faut répondre, c'est à ce sentiment d'insécurité.
Celui-ci est-il complètement irréel, fantasmé? Je ne crois pas. Je pense même qu'il est une véritable inquiétude, assez répandue, et parfois une souffrance, quand on devient victime. La gauche doit-elle s'en désintéresser en le vidant de toute légitimité? Ce serait une grave erreur, qui nous rendrait incompréhensibles et inaudibles. Une certaine droite exaspère le sentiment d'insécurité, une certaine gauche nie sa réalité. Nous devons échapper à ce dilemme. Jospin, sur ce point, avait montré la bonne direction. C'est la mienne sur le dossier de la vidéo-surveillance.
2- A quoi doit servir la vidéo-surveillance? Si c'est pour surveiller la population, je suis contre, archi contre. En démocratie, l'Etat n'a pas à surveiller les citoyens, car c'est le principe inverse qui s'applique: les citoyens doivent surveiller l'Etat. Je trouve personnellement insupportable qu'on surveille mes faits et gestes. C'est la fin de mon intimité et de ma vie privée si elles sont filmées et conservées sur des bandes, même inexploitées.
Mais est-ce l'objectif de la vidéo-surveillance? Il ne me semble pas, sinon les caméras seraient installées n'importe où et partout. 60 objectifs dans Saint-Quentin n'y suffiraient pas. Juridiquement, les images ne sont même pas des preuves légales en cas d'actes délictueux. A ce que je peux en savoir (pour le moment), il y a deux utilités à la vidéo-surveillance: elle dissuade la petite délinquance dans les lieux où elle est censée s'exercer (son rôle est donc préventif); elle contribue à donner des indices à la police en cas de délits.
3- La vidéo-surveillance, dans la prévention et la collection d'indices, est-elle efficace? Je crois que tout le monde peut au moins s'accorder que ce système ne se suffit pas à lui-même, que c'est un complément dans une politique plus vaste. Peut-on aller jusqu'à soutenir que la présence des caméras ne sert absolument à rien? Cette position est trop radicale. Et l'argument se retourne contre lui-même: si la vidéo-surveillance n'est qu'un joujou pour cow-boys, il n'y a rien à en craindre, il suffit de sourire aux caméras.
Quant au reproche d'un déplacement de la délinquance, il ne tient pas non plus. Mettez un gendarme, édictez une règle, vous ne réglez rien, une partie de la délinquance contourne la difficulté. Nous sommes bien d'accord que c'est l'éducateur, pas le surveillant, quel qu'il soit, qui transforme les individus. En attendant, je n'en conclus pas que les règles et les gendarmes n'ont aucune utilité.
4- Le coût de la vidéo-surveillance est-il trop élevé? C'est sans doute la question la plus pertinente. Avec cet argent, ne pourrait-on pas faire plus, mieux ou autre chose? Mais la réponse ne peut être convaincante que si on dit quoi et comment. Sinon, on est dans la critique facile.
Voilà pour mes premières réflexions, qui ne demandent qu'à être corrigées ou complétées. La réflexion est faite pour ça. Je parlerai ultérieurement de la cinquième grosse question à propos de la vidéo-surveillance: liberticide ou pas?
Bonne matinée.
Je ne suis pas encore entré dans le dossier "vidéo-surveillance", assez épais, mais je vous livre quelques réflexions préalables, à partir de l'article consacré à ce sujet par Karine Perocheau dans L'Aisne Nouvelle de jeudi dernier. Sa conclusion est que les Saint-Quentinois ne craignent pas les caméras et que les commerçants sont demandeurs. C'est pourquoi, je crois, la gauche doit se saisir de ce thème avec discernement, ne pas se laisser enfermer dans la caricature d'elle-même, que la droite ne manquera pas de faire (n'est-ce pas déjà commencé?).
Je vois quatre questions fondamentales (et une cinquième que j'aborderai dans un billet suivant):
1- L'insécurité à Saint-Quentin est-elle une réalité à traiter ou un sentiment infondé, exagéré? Personnellement, je me sens en sécurité dans notre ville. Mais quand je vivais à Paris, d'abord à Pantin puis dans le XIXème, je me sentais déjà en sécurité. J'ai énormément utilisé le métro, tard le soir, je n'ai jamais eu peur ni rencontré de problèmes.
Sauf qu'on ne fait pas de la politique seulement avec une expérience personnelle mais à partir d'un vécu collectif. Que je ne partage pas ce sentiment d'insécurité qu'éprouvent nombre de mes concitoyens, tout le monde s'en fout. Ce qui compte, ce sur quoi il faut s'interroger, ce à quoi il faut répondre, c'est à ce sentiment d'insécurité.
Celui-ci est-il complètement irréel, fantasmé? Je ne crois pas. Je pense même qu'il est une véritable inquiétude, assez répandue, et parfois une souffrance, quand on devient victime. La gauche doit-elle s'en désintéresser en le vidant de toute légitimité? Ce serait une grave erreur, qui nous rendrait incompréhensibles et inaudibles. Une certaine droite exaspère le sentiment d'insécurité, une certaine gauche nie sa réalité. Nous devons échapper à ce dilemme. Jospin, sur ce point, avait montré la bonne direction. C'est la mienne sur le dossier de la vidéo-surveillance.
2- A quoi doit servir la vidéo-surveillance? Si c'est pour surveiller la population, je suis contre, archi contre. En démocratie, l'Etat n'a pas à surveiller les citoyens, car c'est le principe inverse qui s'applique: les citoyens doivent surveiller l'Etat. Je trouve personnellement insupportable qu'on surveille mes faits et gestes. C'est la fin de mon intimité et de ma vie privée si elles sont filmées et conservées sur des bandes, même inexploitées.
Mais est-ce l'objectif de la vidéo-surveillance? Il ne me semble pas, sinon les caméras seraient installées n'importe où et partout. 60 objectifs dans Saint-Quentin n'y suffiraient pas. Juridiquement, les images ne sont même pas des preuves légales en cas d'actes délictueux. A ce que je peux en savoir (pour le moment), il y a deux utilités à la vidéo-surveillance: elle dissuade la petite délinquance dans les lieux où elle est censée s'exercer (son rôle est donc préventif); elle contribue à donner des indices à la police en cas de délits.
3- La vidéo-surveillance, dans la prévention et la collection d'indices, est-elle efficace? Je crois que tout le monde peut au moins s'accorder que ce système ne se suffit pas à lui-même, que c'est un complément dans une politique plus vaste. Peut-on aller jusqu'à soutenir que la présence des caméras ne sert absolument à rien? Cette position est trop radicale. Et l'argument se retourne contre lui-même: si la vidéo-surveillance n'est qu'un joujou pour cow-boys, il n'y a rien à en craindre, il suffit de sourire aux caméras.
Quant au reproche d'un déplacement de la délinquance, il ne tient pas non plus. Mettez un gendarme, édictez une règle, vous ne réglez rien, une partie de la délinquance contourne la difficulté. Nous sommes bien d'accord que c'est l'éducateur, pas le surveillant, quel qu'il soit, qui transforme les individus. En attendant, je n'en conclus pas que les règles et les gendarmes n'ont aucune utilité.
4- Le coût de la vidéo-surveillance est-il trop élevé? C'est sans doute la question la plus pertinente. Avec cet argent, ne pourrait-on pas faire plus, mieux ou autre chose? Mais la réponse ne peut être convaincante que si on dit quoi et comment. Sinon, on est dans la critique facile.
Voilà pour mes premières réflexions, qui ne demandent qu'à être corrigées ou complétées. La réflexion est faite pour ça. Je parlerai ultérieurement de la cinquième grosse question à propos de la vidéo-surveillance: liberticide ou pas?
Bonne matinée.
4 Comments:
Je trouve ce propos tres pertinent et j'apprécie vos axes de réflexions.
Et il est vrai que vous ne faites pas forcément parti des personnes vulnérables.
Nous serions plus âgés et femmes,
nous serions certainement plus exposé à l'insécurité.
By grandourscharmant, at 12:55 PM
Je comprends qu'il faille rassurer les commerçants victimes de braquages à répétition mais les petits voyous iront exercer leurs talents hors champ. Quant aux vrais de vrais, ils porteront cagoule et ne se gêneront pas pour agir. Que faire pour contrer les cambriolages perpétrés hors centre ville? (J'en sais quelque chose: 3 en 20 ans!)Les cameras vont encore grever le budget municipal pour un résultat très hypothétique!
By Anonyme, at 2:00 PM
A l'ours:
Bonne remarque: une société vieillissante voit se développer le fameux "sentiment" d'insécurité, dont on rit quand on est totalement valide et bien portant. Mais qu'on est bien obligé de prendre au sérieux quand on fait de la politique et qu'on réfléchit à ce que doit être la société.
By Emmanuel Mousset, at 2:54 PM
A l'anonyme:
1- Un système de vidéo-surveillance, financé par le contribuable, doit servir tous les citoyens, pas seulement les commerçants. Ces derniers peuvent assurer leur propre sécurité, par le gardiennage ou l'installation de caméras, à leurs frais, dans leurs établissements.
2- J'ai déjà répondu à l'argument du déplacement de la délinquance. C'est un sophisme. Dissuader, prévenir, ce n'est pas déplacer. De toute façon, le champ de la petite délinquance n'est pas extensible à l'infini.
3- La vidéo-surveillance ne peut rien contre le grand banditisme, qui se moque d'être filmé.
4- La petite délinquance se concentre dans certaines zones, principalement le centre-ville. C'est donc là qu'il faut agir. Je m'oppose à la généralisation de la vidéo-surveillance (qui reviendrait à devoir mettre des caméras dans toutes les rues!).
5- L'argument du financement, je l'ai dit aussi, est le plus sensible. Mais par quel autre système, moins cher, voulez-vous remplacer la vidéo-surveillance?
By Emmanuel Mousset, at 3:05 PM
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