Article 4 contre 1er amendement.
Bonsoir à toutes et à tous.
J'aimerais revenir ce soir sur l'ouvrage de Philippe Val, "Reviens, Voltaire, ils sont devenus fous", dont je vous ai parlé hier soir. Plus précisément sur les pages 289 à 293, où l'auteur évoque le problème de la liberté d'expression: a-t-elle des limites? Doit-on se moquer de tout? Peut-on tout dire? Ce sont des questions classiques, mais qui reviennent régulièrement, comme si aucune réponse satisfaisante et définitive n'était concevable.
Il me semble que la réponse attendue est apportée par Philippe Val, sous un angle auquel je n'avais jamais pensé et qui m'a paru intéressant à vous évoquer. C'est évidemment l'affaire Dieudonné-Faurisson qui me conduit à cette réflexion. Souvent, dans mes rencontres, on m'oppose la liberté d'expression à mes condamnations d'un tel ou d'un tel. Et on me rappelle qu'en République on a le droit de dire ce qu'on veut.
Je ne suis pas complètement d'accord. Dire ce qu'on veut, oui, mais dire n'importe quoi, non. C'est un sophisme? Pas du tout. Le mensonge, la calomnie, le racisme sont condamnés par la loi, et personne ne propose qu'il en soit autrement. Ce qui prouve que dire ce qu'on veut et dire n'importe quoi, ce n'est pas la même chose.
Dire ce qu'on veut, c'est la République, où l'on peut être librement nationaliste, gaulliste, libéral, centriste, socialiste, communiste, écologiste, trotskiste, anarchiste, pour ne citer que les principaux courants politiques. Dire n'importe quoi, c'est Dieudonné-Faurisson, par exemple. Ces deux-là trouvent qu'en France la liberté d'expression est bâillonnée, parce qu'ils confondent, sciemment, dire ce qu'on veut et dire n'importe quoi.
Sur les camps de concentration nazis, chacun est libre de dire ce qu'il veut. C'est même la liberté de l'historien de faire avancer nos connaissances historiques. Mais on n'a pas le droit de dire n'importe quoi, comme le fait le pseudo-historien Faurisson en affirmant que les chambres à gaz ne servaient pas à l'extermination des juifs. C'est pourquoi je suis un fervent défenseur de la loi Gayssot, du nom d'un ministre communiste dont le PCF devrait être beaucoup plus fier qu'il ne l'est.
J'en reviens à Philippe Val. Ce qu'il nous explique, aux pages citées plus haut, c'est qu'il y a une différence fondamentale dans la conception de la liberté d'expression, en France et aux Etats-Unis. Chez nous, la liberté est définie par l'article 4 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen d'août 1789: "La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui". Bref, on peut dire et faire ce qu'on veut, mais pas n'importe quoi.
Aux Etats-Unis, c'est le premier amendement de la Constitution, rédigé en 1791: "Le Congrès ne pourra faire aucune loi concernant l'établissement d'une religion ou interdisant son exercice, restreignant la liberté de parole ou de la presse..." C'est cette fois la liberté de dire n'importe quoi, car restreinte par aucune loi, Gayssot ou autre. Résultat: on peut se balader aux Etats-Unis en uniforme nazi, tenir des propos homophobes, faire partie d'un groupuscule raciste etc. sans être automatiquement inquiété. D'où la grande violence américaine, qu'aucune loi ne prévient. Du coup, les victimes font appel aux tribunaux, ce n'est plus l'Etat mais les avocats qui restaurent, ou pas, la justice bafouée par la liberté.
Avec Val, je tiens fermement à la liberté d'expression à la française, article 4 de notre Déclaration, et pas sa conception américaine et le premier amendement de sa Constitution.
Bonne soirée.
J'aimerais revenir ce soir sur l'ouvrage de Philippe Val, "Reviens, Voltaire, ils sont devenus fous", dont je vous ai parlé hier soir. Plus précisément sur les pages 289 à 293, où l'auteur évoque le problème de la liberté d'expression: a-t-elle des limites? Doit-on se moquer de tout? Peut-on tout dire? Ce sont des questions classiques, mais qui reviennent régulièrement, comme si aucune réponse satisfaisante et définitive n'était concevable.
Il me semble que la réponse attendue est apportée par Philippe Val, sous un angle auquel je n'avais jamais pensé et qui m'a paru intéressant à vous évoquer. C'est évidemment l'affaire Dieudonné-Faurisson qui me conduit à cette réflexion. Souvent, dans mes rencontres, on m'oppose la liberté d'expression à mes condamnations d'un tel ou d'un tel. Et on me rappelle qu'en République on a le droit de dire ce qu'on veut.
Je ne suis pas complètement d'accord. Dire ce qu'on veut, oui, mais dire n'importe quoi, non. C'est un sophisme? Pas du tout. Le mensonge, la calomnie, le racisme sont condamnés par la loi, et personne ne propose qu'il en soit autrement. Ce qui prouve que dire ce qu'on veut et dire n'importe quoi, ce n'est pas la même chose.
Dire ce qu'on veut, c'est la République, où l'on peut être librement nationaliste, gaulliste, libéral, centriste, socialiste, communiste, écologiste, trotskiste, anarchiste, pour ne citer que les principaux courants politiques. Dire n'importe quoi, c'est Dieudonné-Faurisson, par exemple. Ces deux-là trouvent qu'en France la liberté d'expression est bâillonnée, parce qu'ils confondent, sciemment, dire ce qu'on veut et dire n'importe quoi.
Sur les camps de concentration nazis, chacun est libre de dire ce qu'il veut. C'est même la liberté de l'historien de faire avancer nos connaissances historiques. Mais on n'a pas le droit de dire n'importe quoi, comme le fait le pseudo-historien Faurisson en affirmant que les chambres à gaz ne servaient pas à l'extermination des juifs. C'est pourquoi je suis un fervent défenseur de la loi Gayssot, du nom d'un ministre communiste dont le PCF devrait être beaucoup plus fier qu'il ne l'est.
J'en reviens à Philippe Val. Ce qu'il nous explique, aux pages citées plus haut, c'est qu'il y a une différence fondamentale dans la conception de la liberté d'expression, en France et aux Etats-Unis. Chez nous, la liberté est définie par l'article 4 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen d'août 1789: "La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui". Bref, on peut dire et faire ce qu'on veut, mais pas n'importe quoi.
Aux Etats-Unis, c'est le premier amendement de la Constitution, rédigé en 1791: "Le Congrès ne pourra faire aucune loi concernant l'établissement d'une religion ou interdisant son exercice, restreignant la liberté de parole ou de la presse..." C'est cette fois la liberté de dire n'importe quoi, car restreinte par aucune loi, Gayssot ou autre. Résultat: on peut se balader aux Etats-Unis en uniforme nazi, tenir des propos homophobes, faire partie d'un groupuscule raciste etc. sans être automatiquement inquiété. D'où la grande violence américaine, qu'aucune loi ne prévient. Du coup, les victimes font appel aux tribunaux, ce n'est plus l'Etat mais les avocats qui restaurent, ou pas, la justice bafouée par la liberté.
Avec Val, je tiens fermement à la liberté d'expression à la française, article 4 de notre Déclaration, et pas sa conception américaine et le premier amendement de sa Constitution.
Bonne soirée.
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