L'Aisne avec DSK

10 février 2009

Des idées pour la réforme.

Bonjour à toutes et à tous.

Comme promis, quelques mots sur la réunion d'hier soir à Athies sous Laon, autour de René Dosière et Jean-Pierre Balligand, à propos de la réforme des collectivités locales. C'était très roboratif, revigorant: pas de langue de bois, mais de la réflexion, des idées.

Balligand a commencé par un bilan de la décentralisation depuis 30 ans: globalement positif, très positif même. Les collèges par exemple ont beaucoup gagné à être financés par le Conseil général et non plus par l'Etat. Le point noir, c'est le fonctionnement démocratique, le pouvoir des citoyens. Un fait déplorable: dans une société où l'on ne parle que de "proximité", la participation aux scrutins locaux est en baisse constante.

Le problème est ancien et profond: tout le monde se plaint de l'hyper-présidence au niveau national alors que personne ne critique les hyper-maires que sont devenus ces élus depuis qu'ils sont à la fois représentant de l'Etat dans leur commune et président de l'assemblée délibérante qu'est le conseil municipal. Il y a confusion très dommageable entre l'exécutif et le délibératif, séparation pourtant au fondement de la démocratie.

Le pire, c'est que la réforme du Conseil général, au moment de la décentralisation de 1982-1983, a reproduit cette confusion: avant, le président de l'assemblée présidait, et c'était le préfet qui exécutait. Après, le président a cumulé les deux, il est devenu le "patron" du département (alors que la démocratie participative s'exerce difficilement à ce niveau, mais plutôt au niveau communal).

817 communes dans l'Aisne pour 530 000 habitants, on peut s'interroger sur l'efficacité de cet émiettement. Pour sa défense, on évoque souvent la démocratie de base, qui serait précieuse et irremplaçable. Quelle démocratie? Quand un conseil municipal est mené par un gros propriétaire terrien entouré de ses obligés, où est la démocratie?

Quant aux conseils d'agglomération, ils perçoivent la TPU (taxe professionnelle unique) à la place des communes, ils ne sont pas élus au suffrage universel direct, ils ne sont contestés par aucune opposition, ils ont le beurre et l'argent du beurre, avec quoi ils peuvent faire la pluie et le beau temps. Scandaleux et inquiétant.

Supprimer les départements, refonder les régions? Le vrai problème, c'est la "clause générale de compétence", dont je vous parlais hier (voir le billet "La réforme locale"), en vertu de laquelle chaque collectivité locale dispose en quelque sorte de la souveraineté en matière de compétence. C'est pourquoi un projet, quelle que soit sa nature, reçoit souvent quatre ou cinq financements différents, autant qu'il y a d'échelons, y compris l'Europe. C'est compliqué, c'est peu lisible, il faudrait une claire spécialisation de chaque niveau d'intervention.

Dosière et Balligand sont sur la même longueur d'onde quant à une réforme du système local, notamment en matière d'élection du conseil d'agglomération. Mais c'est pas gagné d'avance!


Bonne matinée.

16 Comments:

  • Etes vous sur que cela n'impliquerait de devoir modifier la constitution ?

    Puisque les différentes collectivités territoriales y sont définies communes, départements, régions.

    Les communautés de communes et les communautés d'agglomérations n'étant que des structures administratives,
    comme peuvent l'etre les offices hlm, les offices de santé, ...

    Là aussi faudra-t-il élire tout le monde au suffrage universel direct,
    de meme que les diverses conseils d'administration publics et parapublics, comme ceux des lycées par exemple ou des régies de transport ou de toursime ?

    D'un point de vue théorique,
    ce ne serait pas forcément une mauvaise idée et ce serait certainement bien plus démocratique.
    D'un point de vue pratique,
    la mise en place me parait bien plus compliqué.

    By Blogger grandourscharmant, at 1:55 PM  

  • Petite précision, l'Aisne compte 816 communes et non 817. Sans faire mauvais esprit, il y a lieu également de se pencher sur la question du cumul des mandats pour faire respirer la démocratie locale. Et l'exemple de vos interlocuteurs est édifiant : Balligand est maire, conseiller général, député et il a même cumulé la présidence du conseil général à un moment. Dosière a été député et maire, député et conseiller général, conseiller régional et maire. Il n'y a donc pas que la question des propriétaires terriens qui étouffent les communes. Le PS avait inscrit dans son projet présidentiel le non cumul d'un mandat local avec un mandat national. Heureusement que Ségolène a été battue... Même Montebourg, défenseur du mandat unique et de la 6e république a viré sa cutil en devenant président du conseil général de saone et Loire. Pour les européennes, Martine Aubry a limité le cumul. Il était question du mandat unique pour les députés européens et on en est revenu au non cumul d'un mandat de député européen et celle d'une présidence d'un exécutif local (conseil général et régional). On voit bien comment il est difficile de moderniser la vie publique.

    By Anonymous Anonyme, at 2:36 PM  

  • et pour compléter ce qu'explique l'anonyme,
    on voit bien qu'il y a de terribles conflits entre ce qui serait l'intérêt collectif et ce que peuvent être les intérêts particuliers.

    By Blogger grandourscharmant, at 2:53 PM  

  • A l'ours:

    - Sur le problème constitutionnel, c'est à vérifier. Mais Dosière et Balligand ne l'ont pas soulevé.

    - Certes les intercommunalités sont des structures administratives, mais qu'on ne peut tout de même pas assimiler à un conseil d'administration d'un lycée, puisqu'elles lèvent l'impôt.

    - Que la mise en place de cette démocratisation soit compliquée, c'est évident. Mais ce n'est pas une raison pour y renoncer.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 4:06 PM  

  • A l'anonyme:

    - Tant que le cumul des mandats n'est pas interdit, il est autorisé. Ce qui compte, c'est la loi et sa modification, pas les bonnes volontés individuelles.

    - La difficulté est dans la nature humaine: nul ne renonce volontairement à son pouvoir, sauf homme d'exception dans situation exceptionnelle.

    - Faut-il alors changer la nature humaine? Ceux qui s'y sont essayés sans sont mordus les doigts. En bon républicain, il faut changer la loi, par le débat, par la force de conviction, en recherchant sur ce point une majorité d'idées.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 4:12 PM  

  • C'est surprenant que la question de la constitutionnalité n'ait pas été évoqué
    déjà rien que pour la clause de compétence générale qui est me semble-t-il inscrit dans la constitution.

    Apres c'était peut etre pour ne pas etre trop technique.
    Mais il me semble que c'est une des 1ere questions à poser quels sont les lois, que permettent elles.


    Par contre sur les intercommunalités qui lèveraient l'impôt
    vous allez surement me trouver bien juridique
    si dans les faits c'est plus ou moins ce qu'il se passe
    C'est quand meme me semble-t-il parce que les communes leur ont délégué cette possibilité.

    Délégation sur laquelle on peut revenir.
    Là où le droit de lever l'impot des communes est lui constitutionnel.

    Quant au lycée me semble-t-il eux aussi fixe des droits d'inscriptions mais c'est l'état qui les paient avec les impots qu'il perçoit.

    Mais sinon croyez vous que les conservateurs et les partisans du statu quo sont pret à ces changements ?

    J'en doute,
    alors comment comptez vous mettre cela en oeuvre ?

    By Blogger grandourscharmant, at 4:45 PM  

  • J'entends bien vos précisions juridiques et techniques. Mais faire de la politique, c'est changer les choses, d'abord les mentalités et les lois.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 7:27 PM  

  • je suis pleinement d'accord avec vous.

    Mais vous savez bien aussi que la politique n'est pas faite que de bons sentiments, mais aussi de calculs qui amenent à voter contre ou à s'abstenir parce qu'on est dans l'opposition bien qu'on soit en accord avec le texte.

    By Blogger grandourscharmant, at 8:27 PM  

  • Ce n'est pas dans mes principes: quand je suis pour, je vote pour, quand je suis contre, je vote contre. Rocard, il y a 30 ans, appelait ça le "parler vrai".

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 9:22 AM  

  • cela doit etre difficile d'etre socialiste,
    eux qui usent si souvent de cette pratique plutot que de s'en tenir à vos principes

    By Blogger grandourscharmant, at 10:09 AM  

  • Pas plus difficile qu'être libéral ou gaulliste. Mais sans doute plus exigeant.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 1:44 PM  

  • ça ça ne demande pas vraiment d'effort,
    juste d'etre responsabl.

    By Blogger grandourscharmant, at 2:03 PM  

  • j'ai essayé de compter les points du match mais GO et EM jouent en même temps avec d'autres partenaires..c'est pas du jeu..on ne peut pas s"y retrouver

    By Anonymous Anonyme, at 5:22 PM  

  • C'est comme en politique: les joueurs vous sont imposés, alliés ou adversaires. Mais l'essentiel, c'est de participer, comme disait l'autre.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 7:38 PM  

  • Si l'anonyme renonce des qu'il y a une difficulté ou un handicap forcément.

    par charité,
    je proposerais mon aide,
    un tableau,
    un intervenant par colonnes
    comme pour un concours de tarots ou de belotes.

    By Blogger grandourscharmant, at 12:55 PM  

  • Ce que l'anonyme ne comprend pas, c'est qu'il n'y a pas de match, pas de jeu, pas de points, rien à gagner, rien à perdre, mais seulement des gens qui donnent des points de vue, plus ou moins bien, plus ou moins vrais, mais qui n'ont que ce mérite-là. Ca s'appelle aussi la démocratie.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 6:46 PM  

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