Le roi est nu.
Bonjour à toutes et à toutes.
Notre monde médiatique est fait de telle façon qu'on n'a pas besoin de regarder une émission pour en connaître le contenu. Ce qui fait gagner du temps, surtout quand ce contenu n'est guère important. Qu'a dit hier le président de la République? Pas grand-chose (de nouveau). Il a expliqué la crise, il a compati avec ses victimes, il a voulu rassurer. Mais agir, proposer? Là non, pas vraiment, ou rien qu'un peu. En tout cas pas assez, "face à la crise", puisque tel était le titre de l'émission.
Il a "été bon', il s'est montré pédagogue, entends-je ce matin. Comme toujours. Y aurait-il un cataclysme nucléaire que Sarkozy serait "bon" à la télé et très pédagogue. Mais est-ce cela qu'on lui demande, est-ce cela qu'on attend de lui? Pas seulement, pas exactement. Il nous est apparu hier comme un homme de bonne volonté, un peu comme ces élèves qui reçoivent comme appréciation: "plein de bonne volonté", c'est-à-dire ne réussit pas, n'a pas beaucoup de capacités mais essaie quand même de s'en sortir. Qu'il est loin le président des premiers mois, hyperactif, affirmant péremptoirement que "tout est possible"!
La bonne volonté, elle se décline à travers plusieurs mesures, par exemple fiscales en direction des classes moyennes. Pour les plus défavorisés, le président promet que les intérêts perçus sur l'argent prêté aux banques serviront à des mesures sociales. Il cite quelques pistes, mais ils ne tranchent pas, ne s'engagent à rien. Bonne volonté, faible volonté. Il remplit ce vide par des spéculations philosophiques sur le partage du profit, les injustices du capitalisme, qui sonnent mal dans une bouche qui n'est pas habitué à ça. En désespoir de cause (et surtout de décision), il dit qu'il va rencontrer les syndicats. Bref, il faut attendre, demain sera un autre jour...
Ne soyons pas injuste: Sarkozy redevient ferme, volontaire, sûr de lui, une fois, une seule fois, pour l'unique annonce réelle d'hier soir, où il y abandonné la simple bonne volonté pour la grande volonté: la suppression de la taxe professionnelle. Et là, l'effet comique est garanti (j'ai toujours pensé que chez cet homme, il y avait du Louis de Funès): alors que la France fait grève, manifeste, attend du Pouvoir quelques mesures sociales, à la limite une seule, rien qu'une seule, mais ferme, assurée, garantie, à quoi s'engage le chef de l'Etat? A satisfaire une très ancienne revendication patronale! Il le fait exprès ou quoi?
Comprenez-moi bien: le débat autour de la taxe professionnelle est légitime, sa suppression est économiquement concevable, l'harmonisation fiscale en Europe est à discuter. Mais ce n'est pas ce que les salariés attendaient hier du président de la République. Celui-ci se justifie en expliquant que cette mesure va empêcher les délocalisations: faux, une entreprise qui veut délocaliser le pourra toujours, rien ne pourra l'en empêcher en économie de marché.
Et je ne crois pas que l'anticapitalisme récent et pittoresque de Nicolas Sarkozy le conduise jusqu'à abolir la liberté d'entreprendre et la circulation des marchandises. Faux aussi parce l'incitation ne sera jamais assez forte face aux pays où le coût du travail sera de toute façon très bas, quoi qu'on fasse chez nous. Et combien de fois faudra-t-il rappeler que les délocalisations ne sont pas la source principale du chômage en France?
Sarkozy est un président perdu, à contretemps, sans ligne politique, ballotté au gré des événements. Pour une raison de fond, qu'on ne peut pas lui imputer, qui est liée aux circonstances: il s'est fait élire sur le pouvoir d'achat, le volontarisme économique, le "travailler plus pour gagner plus". Avec la crise financière mondiale, tout cela explose: le pouvoir d'achat est menacé, le chômage repart à la hausse, la volonté politique rencontre ses limites, travailler plus ne sert pas à grand-chose. Les fondamentaux de Sarkozy, qui l'ont fait triompher en 2007, sont aujourd'hui laminés. Que lui reste-t-il? "Refonder le capitalisme", comme le naufragé s'accroche à son épave. A quand la noyade?
Bonne matinée.
Notre monde médiatique est fait de telle façon qu'on n'a pas besoin de regarder une émission pour en connaître le contenu. Ce qui fait gagner du temps, surtout quand ce contenu n'est guère important. Qu'a dit hier le président de la République? Pas grand-chose (de nouveau). Il a expliqué la crise, il a compati avec ses victimes, il a voulu rassurer. Mais agir, proposer? Là non, pas vraiment, ou rien qu'un peu. En tout cas pas assez, "face à la crise", puisque tel était le titre de l'émission.
Il a "été bon', il s'est montré pédagogue, entends-je ce matin. Comme toujours. Y aurait-il un cataclysme nucléaire que Sarkozy serait "bon" à la télé et très pédagogue. Mais est-ce cela qu'on lui demande, est-ce cela qu'on attend de lui? Pas seulement, pas exactement. Il nous est apparu hier comme un homme de bonne volonté, un peu comme ces élèves qui reçoivent comme appréciation: "plein de bonne volonté", c'est-à-dire ne réussit pas, n'a pas beaucoup de capacités mais essaie quand même de s'en sortir. Qu'il est loin le président des premiers mois, hyperactif, affirmant péremptoirement que "tout est possible"!
La bonne volonté, elle se décline à travers plusieurs mesures, par exemple fiscales en direction des classes moyennes. Pour les plus défavorisés, le président promet que les intérêts perçus sur l'argent prêté aux banques serviront à des mesures sociales. Il cite quelques pistes, mais ils ne tranchent pas, ne s'engagent à rien. Bonne volonté, faible volonté. Il remplit ce vide par des spéculations philosophiques sur le partage du profit, les injustices du capitalisme, qui sonnent mal dans une bouche qui n'est pas habitué à ça. En désespoir de cause (et surtout de décision), il dit qu'il va rencontrer les syndicats. Bref, il faut attendre, demain sera un autre jour...
Ne soyons pas injuste: Sarkozy redevient ferme, volontaire, sûr de lui, une fois, une seule fois, pour l'unique annonce réelle d'hier soir, où il y abandonné la simple bonne volonté pour la grande volonté: la suppression de la taxe professionnelle. Et là, l'effet comique est garanti (j'ai toujours pensé que chez cet homme, il y avait du Louis de Funès): alors que la France fait grève, manifeste, attend du Pouvoir quelques mesures sociales, à la limite une seule, rien qu'une seule, mais ferme, assurée, garantie, à quoi s'engage le chef de l'Etat? A satisfaire une très ancienne revendication patronale! Il le fait exprès ou quoi?
Comprenez-moi bien: le débat autour de la taxe professionnelle est légitime, sa suppression est économiquement concevable, l'harmonisation fiscale en Europe est à discuter. Mais ce n'est pas ce que les salariés attendaient hier du président de la République. Celui-ci se justifie en expliquant que cette mesure va empêcher les délocalisations: faux, une entreprise qui veut délocaliser le pourra toujours, rien ne pourra l'en empêcher en économie de marché.
Et je ne crois pas que l'anticapitalisme récent et pittoresque de Nicolas Sarkozy le conduise jusqu'à abolir la liberté d'entreprendre et la circulation des marchandises. Faux aussi parce l'incitation ne sera jamais assez forte face aux pays où le coût du travail sera de toute façon très bas, quoi qu'on fasse chez nous. Et combien de fois faudra-t-il rappeler que les délocalisations ne sont pas la source principale du chômage en France?
Sarkozy est un président perdu, à contretemps, sans ligne politique, ballotté au gré des événements. Pour une raison de fond, qu'on ne peut pas lui imputer, qui est liée aux circonstances: il s'est fait élire sur le pouvoir d'achat, le volontarisme économique, le "travailler plus pour gagner plus". Avec la crise financière mondiale, tout cela explose: le pouvoir d'achat est menacé, le chômage repart à la hausse, la volonté politique rencontre ses limites, travailler plus ne sert pas à grand-chose. Les fondamentaux de Sarkozy, qui l'ont fait triompher en 2007, sont aujourd'hui laminés. Que lui reste-t-il? "Refonder le capitalisme", comme le naufragé s'accroche à son épave. A quand la noyade?
Bonne matinée.
2 Comments:
prestation médiocre du Président, prestation non moins médiocre des journalistes ( incapables de poser de questions qui "fâchent"), bref une soirée pour rien; peut-être serait-il temps d'en finir avec cette forme compassée du face-à face Président/journalistes ( que tous le Présidents précédents ont d'ailleurs utilisée) pour en venir à une véritable confrontation élu/électeurs, seule capable de faire émerger les vrais problèmes de nos concitoyens mais..
l'élu (en général: Président, député ou autre) a-t-il le courage de se prêter à cet exercice? ( évidemment ça peut être "casse-gueule" mais l'élu après tout nous doit des comptes non?)
By Anonyme, at 5:46 PM
Vous posez un vrai problème, fort ancien: le journalisme de complaisance, de faire valoir, qui n'est pas un journalisme. De ce point de vue, je suis favorable au journalisme à l'américaine, offensif, pinailleur.
La confrontation élus-électeurs, ça s'est fait à la télé ces dernières années. J'ai toujours été déçu par ce genre d'émission. Je me souviens de Balladur, Premier Ministre, confronté à un panel représentatif. C'était du grand n'importe quoi, les gens posaient des questions purement perso, pas du tout politiques.
Je préfère donc la confrontation avec des journalistes bien formés, aguerris, professionnels, connaissant leurs dossiers et faisant leur métier.
By Emmanuel Mousset, at 6:42 PM
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