L'Aisne avec DSK

28 février 2009

La folie, le mal et la mort.

Bonjour à toutes et à soir.

J'ai regardé hier soir, tard, sur France 3, un petit reportage consacré à Richard Durn, le tueur du conseil municipal de Nanterre, en mars 2002. Autant vous dire que j'ai trouvé ce documentaire pas très bon, pas très intéressant, peu approfondi. On n'apprend rien. Simplement, les faits nous sont remis en mémoire. Trois remarques me sont venues en tête:

1- Notre société cartésienne, rationaliste, normalisée est incrédule devant la folie, le mal, la mort. Ces trois termes résument Durn. Nos concitoyens, devant toute affaire comparable, sont choqués, se demandent: pourquoi? comment? Ils veulent des explications là où il n'y a rien à comprendre, parce qu'il n'y a aucune explication à la folie, au mal et à la mort.

Même les psychiatres ont du mal à rendre compte du personnage et de son acte (du coup, l'opinion critique injustement leur incompétence, leur faiblesse). Jadis, c'était la religion qui se chargeait de donner un sens à la folie, au mal et à la mort. Elle n'a plus aujourd'hui cette puissance. Nous sommes nus, dépourvus, scandalisés face au mystère, à la tragédie de la folie, du mal et de la mort.

2- Notre société individualiste a distendu les liens sociaux autrefois très forts, la famille, le métier, le village ou le quartier. Durn n'a pas de boulot, pas de copine, pas d'amis: son seul face à face avec l'autre, c'est sa mère. Il va donc chercher ailleurs, au PS, à la Ligue des Droits de l'Homme, ce qui lui manque, sans résultat. C'est terrible.

Il y aurait toute une étude à faire sur les adhérents des partis politiques, les esprits fragiles, les pauvres têtes, les doux dingues, les fous furieux qui y trouvent refuge. Ce qui est terrible, c'est que cette frange d'individus (tous les militants ne sont pas zinzins, encore heureux!) ne peut être que trompée par le milieu politique, dur, compétitif, manipulateur, tout le contraire de ce qu'ils recherchent, de ce dont ils ont besoin.

3- Le documentaire passe sous silence, et c'est bien dommage, le contexte politique et social dans lequel se déroule la tragédie de Nanterre. Pour la première fois de son histoire, la France a l'impression d'être confrontée à un serial killer, à une tuerie irrationnelle telle qu'il n'en existe qu'aux Etats-Unis. Tout ça sur fond de campagne électorale des présidentielles, où le thème de l'insécurité est exploité par la droite, où une incroyable polémique frappe de plein fouet le Parti socialiste et Lionel Jospin, accusés de mener une politique de droite. La réforme des 35 heures soulève une hostilité et même une haine rarement vues.

Pour ma part, en quinze ans de militantisme, l'année 2002 aura été la plus terrible. Résultat: Jospin très largement battu, la montrée des extrémismes et une partie de la France qui se donne à Le Pen. C'est aussi cette société, qui crache sur la politique, qui ne croit plus au progrès social, qui injurie la gauche, c'est cette société qui engendre Richard Durn, qui l'encourage à passer à l'acte. De simples conseillers municipaux et adjoints de gauche d'une ville de banlieue vont devenir à ses yeux l'incarnation du mal, puisqu'à longueur de journée, il entend dire, à peu près partout, que les hommes politiques sont corrompus et tous les mêmes! Durn aurait pu s'en prendre à des patrons, des magistrats, des journalistes. Non, il choisit de tuer des élus.

Depuis cette tragédie, la France a un peu changé: l'extrême droite a reflué, les 35 heures sont beaucoup moins critiquées, la gauche est à nouveau respectée, la démocratie a repris son cours normal. La folie, le mal et la mort que portait Durn sont aussi en nous, lorsqu'on se met à ne plus aimer la République, ses grandeurs et ses faiblesses. Que plus jamais ne revienne l'année 2002 et un nouveau Richard Durn.


Bonne matinée.

2 Comments:

  • Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

    By Anonymous Anonyme, at 4:40 PM  

  • Il est rarissime que je supprime un commentaire. Je le fais quand celui-ci contrevient aux lois de la République. C'était le cas pour ce commentaire, dont l'auteur se cachait derrière un masque à croix gammée. Le contenu de son message consistait en une apologie, elle aussi masquée mais suffisamment visible, des meurtres de Richard Durn. Chacun comprendra donc que je l'ai supprimé

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 6:58 PM  

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