La crise et ses victimes.
Bonjour à toutes et à tous.
Je ne suis pas particulièrement un fan d'Alain Minc. Je sais qu'il a commencé à gauche, mais je ne sais plus très bien où il est aujourd'hui. En tout cas, il n'est pas socialiste! Je sais cependant qu'une certaine gauche radicale le déteste, que le populisme ambiant le désigne comme le représentant honni des "élites". Ce qui suffit à mes yeux à redorer un peu son blason et a susciter mon intérêt pour lui.
Quoi qu'il en soit, j'ai plutôt apprécié hier sa prestation à l'émission "Ce soir (ou jamais)". Il était question de la crise et des catastrophes de tous ordres qui menacent l'humanité. Le ton des invités était au "catastrophisme", idéologie très répandue, résurgence religieuse, apocalyptique laïcisée. Minc, presque seul, résistait à la sinistrose, et c'était assez bien vu et bienvenu.
Il a rappelé que la crise financière n'avait rien à voir avec celle de 1929, que si on avait pris dans les années 30 les mesures de soutien aux banques qu'on a prises en 2008, le fascisme et la guerre ne l'auraient peut-être pas emporté. Il a souligné aussi qu'une partie des classes moyennes n'étaient pas touchées par la crise (la consommation continue, le pouvoir d'achat ne s'effondre pas, les stations de ski ont fait un beau chiffre d'affaires cet hiver...).
Des victimes de la crise, hélas, il y en aura et il y en a. Les premières, on l'a vu, ce sont certains banquiers et chefs d'entreprise. Je compatis mais ne les plains pas: c'est leur job, ils ont pris des risques, comme le soldat peut laisser sa peau au combat. En revanche, je me soucie des victimes innocentes: les salariés mis au chômage, les chômeurs ne retrouvant pas d'emploi, parce que le marché du travail se rétrécit. Les victimes, elles sont à chercher du côté de la classe ouvrière (les salariés de l'automobile, par exemple) et des travailleurs précaires.
A trop vouloir être catastrophiste, à laisser croire que le monde roule vers l'abîme, on mélange tout, on confond, on égalise, on généralise. Et on se trompe. Je vois autour de moi le milieu petit-bourgeois qui est le mien: qui peut soutenir sérieusement qu'il est frappé par la crise? Je ne crois pas qu'il va substantiellement renoncer à ses loisirs, ses achats, ses vacances. Être de gauche, c'est penser qu'il y a dans cette société des exploités, des victimes, mais que tous les hommes ne le sont pas (tous exploités, pas d'exploités!).
De ce point de vue, je reste très traditionnel: les victimes de la crise, c'est d'abord la classe ouvrière, les employés et les précaires. C'est vers eux que la gauche doit se tourner, c'est à eux que la gauche doit s'adresser. Ce qui n'implique pas d'oublier les autres (d'autant que les classes moyennes forment les gros bataillons de l'électorat socialiste, que l'UMP de Xavier Bertrand convoite).
Mais j'en ai un peu marre du lamento autour des "classes moyennes". Comme s'il n'existait pas des situations autrement plus périlleuses, autrement plus prioritaires. Le problème du PS, c'est sa vision de classe: imprégné par l'état d'esprit et les intérêts de la petite bourgeoisie, il a du mal à s'en départir. Avec Martine Aubry, nous avons commencé ce retour à nos fondamentaux, à une ligne de classe qui remet le socialisme à l'endroit.
J'en reviens à Alain Minc hier soir: même Jean-Pierre Dupuy, philosophe du "catastrophisme éclairé" que j'apprécie beaucoup, était en deçà de ce que Minc disait, et pas toujours très clair, très convaincant dans ses explications (c'est l'histoire de l'albatros avec ses ailes de géant qui l'empêche de marcher: un philosophe à la télé, quand il ne s'appelle pas BHL, Comte-Sponville ou Onfray, c'est souvent la cata!). La sagesse, la raison étaient du côté de Minc (j'ai presque envie de dire: hélas...).
La preuve, c'est qu'à la fin de l'émission, les invités se sont à peu près rangés derrière son opinion: oui nous vivons une crise sérieuse, grave, non ce n'est pas la fin du monde. C'est tout au plus la fin d'un monde, celui du capitalisme financier non régulé. Le monde a connu et connaîtra pire. Le catastrophisme, le pessimisme ne sont pas des valeurs de gauche.
Minc s'est exclamé, excédé par les jérémiades anticapitalistes: "Le marché, c'est la vie!" Oui, je veux bien, moi aussi, à condition de préciser que l'inverse n'est pas vrai: la vie, ce n'est pas le marché, la vie déborde très largement le marché, la vie n'a parfois rien à voir, rien à faire avec lui. C'est sans doute ce qui distingue ici Alain Minc et un homme de gauche.
Bonne matinée.
Je ne suis pas particulièrement un fan d'Alain Minc. Je sais qu'il a commencé à gauche, mais je ne sais plus très bien où il est aujourd'hui. En tout cas, il n'est pas socialiste! Je sais cependant qu'une certaine gauche radicale le déteste, que le populisme ambiant le désigne comme le représentant honni des "élites". Ce qui suffit à mes yeux à redorer un peu son blason et a susciter mon intérêt pour lui.
Quoi qu'il en soit, j'ai plutôt apprécié hier sa prestation à l'émission "Ce soir (ou jamais)". Il était question de la crise et des catastrophes de tous ordres qui menacent l'humanité. Le ton des invités était au "catastrophisme", idéologie très répandue, résurgence religieuse, apocalyptique laïcisée. Minc, presque seul, résistait à la sinistrose, et c'était assez bien vu et bienvenu.
Il a rappelé que la crise financière n'avait rien à voir avec celle de 1929, que si on avait pris dans les années 30 les mesures de soutien aux banques qu'on a prises en 2008, le fascisme et la guerre ne l'auraient peut-être pas emporté. Il a souligné aussi qu'une partie des classes moyennes n'étaient pas touchées par la crise (la consommation continue, le pouvoir d'achat ne s'effondre pas, les stations de ski ont fait un beau chiffre d'affaires cet hiver...).
Des victimes de la crise, hélas, il y en aura et il y en a. Les premières, on l'a vu, ce sont certains banquiers et chefs d'entreprise. Je compatis mais ne les plains pas: c'est leur job, ils ont pris des risques, comme le soldat peut laisser sa peau au combat. En revanche, je me soucie des victimes innocentes: les salariés mis au chômage, les chômeurs ne retrouvant pas d'emploi, parce que le marché du travail se rétrécit. Les victimes, elles sont à chercher du côté de la classe ouvrière (les salariés de l'automobile, par exemple) et des travailleurs précaires.
A trop vouloir être catastrophiste, à laisser croire que le monde roule vers l'abîme, on mélange tout, on confond, on égalise, on généralise. Et on se trompe. Je vois autour de moi le milieu petit-bourgeois qui est le mien: qui peut soutenir sérieusement qu'il est frappé par la crise? Je ne crois pas qu'il va substantiellement renoncer à ses loisirs, ses achats, ses vacances. Être de gauche, c'est penser qu'il y a dans cette société des exploités, des victimes, mais que tous les hommes ne le sont pas (tous exploités, pas d'exploités!).
De ce point de vue, je reste très traditionnel: les victimes de la crise, c'est d'abord la classe ouvrière, les employés et les précaires. C'est vers eux que la gauche doit se tourner, c'est à eux que la gauche doit s'adresser. Ce qui n'implique pas d'oublier les autres (d'autant que les classes moyennes forment les gros bataillons de l'électorat socialiste, que l'UMP de Xavier Bertrand convoite).
Mais j'en ai un peu marre du lamento autour des "classes moyennes". Comme s'il n'existait pas des situations autrement plus périlleuses, autrement plus prioritaires. Le problème du PS, c'est sa vision de classe: imprégné par l'état d'esprit et les intérêts de la petite bourgeoisie, il a du mal à s'en départir. Avec Martine Aubry, nous avons commencé ce retour à nos fondamentaux, à une ligne de classe qui remet le socialisme à l'endroit.
J'en reviens à Alain Minc hier soir: même Jean-Pierre Dupuy, philosophe du "catastrophisme éclairé" que j'apprécie beaucoup, était en deçà de ce que Minc disait, et pas toujours très clair, très convaincant dans ses explications (c'est l'histoire de l'albatros avec ses ailes de géant qui l'empêche de marcher: un philosophe à la télé, quand il ne s'appelle pas BHL, Comte-Sponville ou Onfray, c'est souvent la cata!). La sagesse, la raison étaient du côté de Minc (j'ai presque envie de dire: hélas...).
La preuve, c'est qu'à la fin de l'émission, les invités se sont à peu près rangés derrière son opinion: oui nous vivons une crise sérieuse, grave, non ce n'est pas la fin du monde. C'est tout au plus la fin d'un monde, celui du capitalisme financier non régulé. Le monde a connu et connaîtra pire. Le catastrophisme, le pessimisme ne sont pas des valeurs de gauche.
Minc s'est exclamé, excédé par les jérémiades anticapitalistes: "Le marché, c'est la vie!" Oui, je veux bien, moi aussi, à condition de préciser que l'inverse n'est pas vrai: la vie, ce n'est pas le marché, la vie déborde très largement le marché, la vie n'a parfois rien à voir, rien à faire avec lui. C'est sans doute ce qui distingue ici Alain Minc et un homme de gauche.
Bonne matinée.
6 Comments:
bonjour
je suis assez d'accord avec toi et c'est d'ailleurs le sens du message que j'ai envoyé hier à mes clients.
ci après quelques extraits :
"La crise est là et il convient de prendre les bonnes décisions !
Il est habituel de dire dans le monde de la finance qu’il faut acheter au son du canon et de vendre au son du clairon !
En cette période il n’ya que deux alternatives : Subir ou agir.
- Subir c’est à dire courber le dos et attendre des jours meilleurs. La plus mauvaise décision serait de vendre des parts à faible coût et matérialiser ainsi les moins values ! tant qu’on n’a pas vendu, on n’a pas perdu !!
- Agir c’est à dire prendre les bonnes décisions compatibles avec vos moyens, vos objectifs et la durée. Tout a baissé et c’est donc le moment d’acheter à moindre coût ! Il est inconcevable de croire que la bourse et l’immobilier ne retourneront pas à la hausse. Crise signifie opportunité. Ne pas céder à la panique qui ne peut qu’être mauvaise conseillère et vous dicter les mauvaises décisions (rachat et/ou arrêt de l’épargne mensuelle en sont deux !!)
- Le phénomène est récurrent. Souvenez- vous de 1929, 1948 et plus récemment 1992, 1995 ou 2003 ! Il y avait déjà la crise.
Les entreprises, l’Etat et les banques ne peuvent laisser l’économie mourir. Il convient donc d’anticiper la future hausse et réaliser des plus values très intéressantes...."
" La bonne décision aujourd’hui est donc d’investir ! La présence d’un conseiller est la garantie d’un suivi régulier. Les banques traditionnelles de dépôt et les compagnies d’assurance sont bien souvent défaillantes en des périodes comme aujourd’hui. Pour ma part, j’ai toujours été auprès de mes clients dans les hausses comme dans les baisses ! Quelque soit vos moyens du moment, une solution existe : maintenir ou créer une épargne mensuelle si vos moyens sont limités, investir plus sur des fonds opportunistes ou dans l’immobilier (l’Etat a encore favorisé fiscalement ce type d’investissement en raison de besoins croissants). Un sondage récent a montré que plus de 70% des Français sont prêts à réduire leur consommation pour accroître leur épargne (en prévision d'un avenir incertain : retraite, éducation des enfants, dépendance…..)!..."
La crise existe mais sera surmontée avec une régulation plus grande car ce sont les petits qui trinquent et pour un homme de gauche ce n'est pas acceptable!
MD
By md, at 10:28 AM
Un type qui a fini major de sa promotion à l'ENA apres avoir été diplomé de l'institut d'etudes politique de Paris et etre ingénieur de l'école nationale supérieur des mines de Paris forcément,
il ne peut que déplaire à certains.
By grandourscharmant, at 11:51 AM
Michel,
Quand j'aurai un peu d'argent de côté, je te le confierai!
By Emmanuel Mousset, at 2:01 PM
A l'ours:
Pourquoi ce qui plait aux uns déplait-il aux autres?
By Emmanuel Mousset, at 2:03 PM
Être de gauche, ce n'est pas penser en terme de victimes, il y a le SAMU pour cela, mais inscrire dans le réel nos idéaux de toujours, « Le bien-être pour tous, et l'augmentation de l'autonomie de chacun ». C'est avoir une action, et pas seulement une pensée. C'est être universaliste, et ne pas tenir un compte de boutiquiers, ou seuls les ouvriers mériteraient qu'on se lamente sur leur sort, comme si pratiquer la charité envers les classes laborieuses nous empêchait de voir l'ensemble de la problématique. Être de gauche, c'est prendre de la hauteur, et ne tomber ni dans le larmoyant, ni dans le populisme racoleur.
By jpbb, at 2:49 PM
Loin de moi l'idée de cultiver la victimologie. Mais ce qui justifie mon engagement à gauche, c'est l'existence de la souffrance sociale. Sinon, si tout va bien dans le meilleur des mondes, la gauche n'a plus sa raison d'être, il suffit alors de se demander qui sera meilleur gestionnaire.
By Emmanuel Mousset, at 7:58 PM
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