Pourquoi je ne suis pas gaulliste.
Bonsoir à toutes et à tous.
En ce jour du 70ème anniversaire de l'appel du 18 juin, j'ai participé comme chaque année à la cérémonie devant le monument aux morts de la Résistance, boulevard Gambetta. Il me semble normal que la gauche, ses élus et ses militants soient présents. Mais le "rebelle" de 1940 n'est pas le "souverain" des années 60 (je reprends ces deux expressions de l'ouvrage de Jean Lacouture sur de Gaulle). Aujourd'hui, j'ai l'impression que tout le monde est devenu gaulliste, même à gauche. Je voudrais expliquer pourquoi je ne le suis toujours pas.
D'abord, quoi qu'on dise, de Gaulle était philosophiquement un homme de droite, ayant du pouvoir, de l'autorité, de l'histoire, de la nation des conceptions de droite. Dans les années 50, il lance le RPF, une formation politique qui prend des positions très à droite, qui la distinguent nettement de la droite libérale, centriste et modérée du MRP.
En 1958, de Gaulle revient au pouvoir sur un malentendu : les partisans de l'Algérie française le soutiennent, croyant qu'il les a "compris", s'estimant ensuite trahis. La décolonisation avait été largement amorcée sous la IVème République. En matière d'institutions, le général met fin au parlementarisme intégral au profit d'une sorte de "monarchie républicaine" (la formule est de Maurice Duverger) qui pose encore problème aujourd'hui tellement le déséquilibre en faveur de l'exécutif est flagrant.
En matière sociale, de Gaulle propose une très nébuleuse "participation" mais ne saisit pas les évolutions de la société moderne, qui conduiront à la crise majeure de Mai 1968. Par bien des aspects, c'est un homme du XIXème siècle. Il passe aussi à côté de la construction européenne, sur laquelle il ironise, se bornant à défendre une simple coopération entre les nations. La droite actuelle ne se réclame du gaullisme que dans les discours. En réalité, elle a depuis longtemps rompu avec cet impossible héritage.
Voilà pourquoi j'admire de Gaulle et ne suis pas gaulliste. Et je ne comprends pas que certains hommes de gauche, cédant au conformisme ambiant, affichent leur complaisance envers le gaullisme.
Bonne soirée.
En ce jour du 70ème anniversaire de l'appel du 18 juin, j'ai participé comme chaque année à la cérémonie devant le monument aux morts de la Résistance, boulevard Gambetta. Il me semble normal que la gauche, ses élus et ses militants soient présents. Mais le "rebelle" de 1940 n'est pas le "souverain" des années 60 (je reprends ces deux expressions de l'ouvrage de Jean Lacouture sur de Gaulle). Aujourd'hui, j'ai l'impression que tout le monde est devenu gaulliste, même à gauche. Je voudrais expliquer pourquoi je ne le suis toujours pas.
D'abord, quoi qu'on dise, de Gaulle était philosophiquement un homme de droite, ayant du pouvoir, de l'autorité, de l'histoire, de la nation des conceptions de droite. Dans les années 50, il lance le RPF, une formation politique qui prend des positions très à droite, qui la distinguent nettement de la droite libérale, centriste et modérée du MRP.
En 1958, de Gaulle revient au pouvoir sur un malentendu : les partisans de l'Algérie française le soutiennent, croyant qu'il les a "compris", s'estimant ensuite trahis. La décolonisation avait été largement amorcée sous la IVème République. En matière d'institutions, le général met fin au parlementarisme intégral au profit d'une sorte de "monarchie républicaine" (la formule est de Maurice Duverger) qui pose encore problème aujourd'hui tellement le déséquilibre en faveur de l'exécutif est flagrant.
En matière sociale, de Gaulle propose une très nébuleuse "participation" mais ne saisit pas les évolutions de la société moderne, qui conduiront à la crise majeure de Mai 1968. Par bien des aspects, c'est un homme du XIXème siècle. Il passe aussi à côté de la construction européenne, sur laquelle il ironise, se bornant à défendre une simple coopération entre les nations. La droite actuelle ne se réclame du gaullisme que dans les discours. En réalité, elle a depuis longtemps rompu avec cet impossible héritage.
Voilà pourquoi j'admire de Gaulle et ne suis pas gaulliste. Et je ne comprends pas que certains hommes de gauche, cédant au conformisme ambiant, affichent leur complaisance envers le gaullisme.
Bonne soirée.
posted by Emmanuel Mousset at
6:56 PM
7 Comments:
Complaisance ?
Je dirai plutôt lâcheté, ou couardise.
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Anonyme, at 11:56 PM
Non, ces mots sont trop forts, ils vous desservent.
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Emmanuel Mousset, at 12:19 AM
De Gaulle était de la grande tradition bourgeoise française "sabre et goupillon" et son soi-disant côté social (ah!! la participation) relevait ^plus d'un sentiment caritatif que d'une réelle volonté de justice sociale;d'ailleurs il méprisait le peuple ( "des veaux") et savait parfaitement utiliser son aura de sauveur de 1940 avec une démagogie sans pareille; l'homme du 18 juin d'accord, celui qui a mis fin à la guerre d'Algérie d'accord aussi ( c'est ma jeunesse) mais pour le reste il ne mérite sûrement pas les lauriers qu'on continue de lui dresser
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MF, at 5:16 AM
Le problème, avec certains hommes célèbres, c'est qu'ils vivent trop longtemps! Entendons-nous: je ne souhaite de mal à personne, je constate. Imaginez De Gaulle mort en 1945: il serait le héros incontesté, unanimement vénéré, sans discussion. Imaginez Pétain mort en 1936: il serait pour toujours le héros de Verdun, sans tache. On honore et respecte toujours le général Leclerc, mort à 47 ans. S'il avait vécu, qui sait comment il aurait orienté son parcours? A moins de se retirer complètement de la vie publique, il aurait sans doute été amené à prendre des positions qui auraient entamé son aura, de part ou d'autre. Je ne sais plus qui a dit "les vrais héros meurent jeunes!"
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Lormont, at 9:10 AM
tout à fait d'accord: les vieillards devraient mourir jeunes
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MF, at 2:35 PM
rectificatif :il faut lire tresser ( pour les lauriers) et pas dresser( sauf pour les cheveux des puristes qui auraient eu la malchance de buter sur cette faute de frappe);mes excuses et comme EM aime bien la bible: que ceux qui n'ont jamais pêché..etc.etc..
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MF, at 7:49 PM
Il me semble que la stature de de Gaulle tient beaucoup à ce que à la fois de 39 à 46, puis sur la guerre d'Algérie, il a su être fulgurant là où la gauche a beaucoup tardé à être à la hauteur des situations (c'est un euphémisme). Ensuite comme homme politique sous la 5ème République au fait que ceux qui ont fondé leur réputation politique sur la critique de ses choix constitutionnels se sont glissés ensuite confortablement dans le costard qu'il avait taillé.
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Ane-Vert, at 4:31 PM
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