L'Aisne avec DSK

26 mars 2011

L'heure est au rassemblement.

Bonsoir à toutes et à tous,


A la suite de mon entretien jeudi dans L'Aisne Nouvelle avec Guillaume Balout, j'ai reçu plusieurs messages de sympathie, de soutien et d'encouragement. Mes interventions dans la presse, depuis plusieurs années, suscitent l'intérêt et entraînent des réactions souvent positives, qui se mesurent aussi au succès remporté par ce blog au fil du temps. Mes analyses, mes propositions, la ligne politique que je défends ne laissent pas indifférent. Je sais qu'elles sont représentatives d'une partie de l'opinion de gauche saint-quentinoise (sinon, je ne m'évertuerais pas à les défendre). Mais les soutiens jusqu'à ce jour n'avaient pas été aussi forts et nombreux, même si bien sûr tout est relatif.

Cet état de fait est d'ailleurs logique : l'élimination des candidats socialistes au premier tour des élections cantonales a créé dans notre électorat un traumatisme dont on ne mesure pas encore très bien l'ampleur ni les conséquences. Car nos électeurs, eux, n'ont pas disparu : demain, ils iront voté, mais n'auront plus de choix qu'entre UMP et FN. Cette disparition de la gauche ne peut avoir dans l'ordre symbolique et politique que des effets gravissimes, si rien n'est fait pour y remédier. C'est pourquoi mes propos de jeudi, qui ne sont pas très nouveaux pour celles et ceux qui me font l'amitié de me lire et de suivre mes activités, ont eu un impact inédit et prometteur.

Je n'en tire d'ailleurs aucune conclusion hâtive, excessive ou optimiste. Je connais trop la force d'inertie, la tétanisation que provoquent les échecs profonds, les phénomènes de repli sur soi, la douleur des remises en question. L'hébétude dans laquelle plonge une défaite lourde, le déni de réalité qu'elle suscite ne sont guère favorables à des changements, alors même que ceux-ci seraient pourtant indispensables. En péril de mort, l'instinct de survie est plus puissant que tout. Or, celui-ci est un instinct de conservation, pas de renouvellement, encore moins de transformation de soi.

Je ne le dis pas pour désespérer ceux qui partagent mon point de vue mais pour rester conforme à une règle qui me semble majeure en politique : la lucidité. Ne pas se faire d'illusion, surtout ne pas illusionner les autres. La suite des événements, nul ne sait ce qu'elle sera, moi pas plus qu'un autre. La seule chose que je sais, c'est qu'à Saint-Quentin, ces dix dernières années, rien de ce qui a pu se passer à gauche (contrairement à la droite) n'était prévisible. Les circonstances, même le hasard, parfois les bizarreries rendent impossible toute prédiction ou anticipation. C'est d'ailleurs pour moi un handicap : je suis un esprit trop rationnel pour évoluer à l'aise et avec succès dans un contexte largement irrationnel. Les intuitifs et les affectifs auront toujours une longueur d'avance.

Pour être tout à fait honnête avec vous, une minorité des messages qui m'ont été adressés ces deux derniers jours avait aussi une dimension critique, des reproches à me faire. D'abord d'avoir été trop modéré, trop indulgent, de n'avoir pas nommément remis en cause, de m'être contenté d'évoquer la "responsabilité collective" de la défaite. A ceux qui me font cette amicale critique, je ne cesserais de répéter la même chose : le socialisme saint-quentinois souffre de ses divisions, d'une longue tradition de règlements de compte. Si je peux avoir quelque utilité, c'est de montrer une autre image de la gauche, c'est de rompre avec cette inclination ancienne qui dépasse largement ses acteurs du moment. Il n'y aurait aucune crédibilité à reprocher aux autres ce qu'on pratique soi-même.

Au contraire, il me faut défendre des méthodes et des principes nouveaux, qui se résument aujourd'hui en une seule phrase : l'heure est au rassemblement, parce que c'est notre existence même qui est en jeu. Évidemment, je n'ignore pas que les critiques ou les insinuations à mon égard ne feront qu'augmenter au fur et à mesure que les événements me donneront en partie raison. Que ceux qui veulent bien me soutenir ne prêtent, comme moi, aucune attention à ces attaques, qu'ils n'y répondent pas, qu'ils n'entrent pas dans ce jeu destructeur, je le leur demande solennellement (ou alors qu'ils cessent d'être à mes côtés !). C'est l'esprit de sérieux, de construction, de travail qui doit prévaloir, et par dessus tout l'esprit d'unité et de responsabilité. Je ne me livrerai donc à aucune attaque personnelle, je n'accuserai jamais personne, je maintiendrai le débat à un niveau exclusivement politique, et tant pis si je déçois !

Autre point de désaccord avec certains de mes bienveillants interlocuteurs : ils me pressent d'entrer très vite dans le rapport de forces, de faire venir mes "partisans" dans la section, de jouer des croix et des bâtons pour m'imposer rapidement. Là aussi, je ne renoncerai pas à ce que je pense depuis longtemps : la logique du rapport de forces est concevable quand on est fort ; quand on est faible, cette logique est destructrice pour tous. C'est l'expérience qui me le fait dire, pas un point de doctrine.

Que veulent les Saint-Quentinois ? Que les socialistes soient unis et crédibles, pas qu'ils s'affrontent entre eux, même pour des motifs légitimes. Au niveau local, il ne devrait pas y avoir, pour les choix locaux, de différends, de discriminants entre aile gauche, sociaux-démocrates ou ségolénistes. Ces étiquettes ne sont précieuses et pertinentes qu'au niveau national, quand il faut définir la ligne politique du Parti. Pas quand on constitue une liste municipale ou qu'on se choisit un candidat aux cantonales. Les Saint-Quentinois ne veulent pas devoir opter entre Mousset, Lançon ou Ferreira, dont à vrai dire ils se moquent en tant que personnes. Mais ils souhaitent, quand ils sont de gauche, voir des socialistes, que des socialistes, dans l'indifférence de leurs sensibilités politiques ou personnelles.

A nouveau, j'en suis désolé : je ne pratiquerai pas le contraire de ce que je préconise, je n'encouragerai pas des adhésions artificielles qu'on ne revoit plus quand il faut militer, puisqu'elles sont non dans une démarche de convictions mais d'allégeance à une personne. Vous me reprocherez peut-être de me montrer ingrat envers mes soutiens. Sans doute, mais c'est le prix à payer, finalement assez léger, pour qu'un jour la gauche puisse collectivement l'emporter. En tant que socialiste, si je veux vraiment rassembler, ce n'est pas en dénigrant, c'est au contraire en reconnaissant, en mettant en avant les qualités de mes camarades (que la réciproque ne soit pas pratiquée, je l'ai déjà dit, il faut y être indifférent), y compris de ceux qui ne partagent mes analyses, c'est-à-dire essentiellement l'aile gauche.

Rassembler, ce n'est pas contraindre à se soumettre à l'issue d'un rapport de forces artificiellement entretenu, c'est toute une dynamique, toute une exigence dans lesquelles chaque socialiste est reconnu et soutenu pour ce qu'il est, dans ses compétences, son influence, sa bonne volonté. Hormis cette stratégie-là, j'ai la ferme conviction que nous irons au désastre à répétitions. En cette veille de scrutin où le PS de Saint-Quentin sera absent, j'aimerais que tous aient cette pensée à l'esprit : l'heure est plus que jamais au rassemblement.


Bonne soirée.

2 Comments:

  • Pour le rassemblement, commencez déjà par ne plus taper sur les classes moyennes : que vous vouliez reconquérir les classes populaires, oui, mais pas au prix d'envoyer les classes moyennes en masse vers la droite.

    By Anonymous Citoyen, at 1:46 PM  

  • Ne vous tracassez pas pour les classes moyennes, elles suivront le mouvement.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 2:04 PM  

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