L'Aisne avec DSK

24 avril 2011

Pourquoi je ne suis pas content.

Bonsoir à toutes et à tous,


Je pourrais être assez content : DSK est donné gagnant à la présidentielle dans tous les sondages, Nicolas Sarkozy est au plus bas en matière de popularité, mon parti vient de se rassembler autour d'un projet dont tout le monde salue la crédibilité ... De quoi rendre heureux le socialiste que je suis ! Et pourtant, je suis inquiet, préoccupé, angoissé même : à cause de la montée fulgurante de l'extrême droite dans l'électorat populaire, confirmée aujourd'hui par un sondage dans Le Journal du Dimanche.

36% des ouvriers voteraient Le Pen, 17% DSK et 15% Sarkozy. Effrayant ! Pour mémoire, en 2 007, 16% des ouvriers avaient voté Le Pen, 25% Royal et 26% Sarkozy. Je ne suis pas trop surpris : après les élections cantonales, j'avais parlé d'une "gauche FN", expression terrible mais terriblement vraie. L'électorat ouvrier, c'est notre coeur de cible, comme disent les publicitaires : si celui-ci n'est pas de notre côté, à gauche, c'est notre identité qui vole en éclat. La droite n'a pas ce genre de problème, son ancrage sociologique reste le même, très solide.

Je suis sensible à cette question parce que ma ville de Saint-Quentin illustre à la perfection (si j'ose dire) cette crise de la sociologie de gauche (qui ne peut qu'avoir des répercussions politiques) : frappé fortement par le chômage, constitué de classes populaires peu formées, mal payées, marqué par une tradition communiste pas si ancienne, l'électorat de gauche se mobilise difficilement et ne vote pas pour les candidats socialistes. Aux trois dernières élections locales, cantonales, municipales et législatives, le Parti socialiste a été battu dès le premier tour par l'UMP ou par le FN. La situation du camp progressiste est catastrophique, désespérée et désespérante, aggravée parfois par l'auto-aveuglement faussement consolateur de ses protagonistes.

De ce point de vue, Saint-Quentin est un "laboratoire", non pas celui dont parlait le journal Libération en 2 008, désignant ainsi les alliances PS-extrême gauche, mais plutôt celui du devenir sociologique de la gauche : la ville est la pure expression du divorce entre le PS et les classes populaires, dans un miroir certes grossissant, mais traduisant bien une tendance nationale qu'on retrouve un peu partout ailleurs.

Que faire pour en sortir ? Nous avons un bon programme, qui parle à nos militants mais pas nécessairement à notre électorat populaire. Il faudra mettre en musique ce programme, le médiatiser, le populariser en retenant des thèmes mobilisateurs. Nous savons parler aux classes moyennes parce que la plupart d'entre nous en sont issus, parlent le même langage, en partagent les intérêts. Mais les classes populaires, c'est autre chose ! (je sais, j'en viens et je continue dans mes activités d'éducation populaire à les côtoyer).

Il va falloir que nous reprenions le chemin des sorties d'usines, des centres sociaux et des festivités populaires. Je le dis comme je le pense : le Parti socialiste crèvera de demeurer petit-bourgeois. C'est bien sûr mieux que se convertir à la grande bourgeoisie, qui n'attend rien de nous pour défendre ses intérêts. Mais ça ne fait pas encore du PS un parti populaire, ouvrier, tel qu'il devrait être et tel qu'il était en grande partie par le passé.

Ne croyez pas que ma position soit contradictoire avec mon strauss-kahnisme. Je connais mon histoire : Jaurès, Blum et Mitterrand étaient des bourgeois à la tête d'un parti qui avait un ancrage populaire autrement plus important qu'aujourd'hui, qui se réduit à peau de chagrin. Le problème n'est pas dans l'origine sociale de notre leader ou candidat mais dans la composition sociologique de notre appareil, notamment aux niveaux intermédiaires, parmi les cadres du base du Parti, qui sont en contact avec la population, qui peut donc ou non se reconnaître en eux.

Le problème est aussi dans la présentation et la lisibilité de notre programme : faire simple, direct, efficace, populaire. Sinon c'est l'extrême droite qui continuera à faire des ravages dans nos rangs. Je crains que le pire soit devant nous. Raison de plus pour espérer, faire en sorte qu'il ne se produise pas. Le jour où les ouvriers voteront à nouveau d'abord pour nous, où la gauche saint-quentinoise franchira normalement le stade du premier tour (et pourquoi pas l'emportera au second), je serai content.


Bonne soirée.

12 Comments:

  • C'est bien VOUS qui avait dit :

    Vous vous trompez ou vous mentez : les rois de l'intox, c'est la famille Le Pen, qui arrive à vous faire croire qu'elle pourrait faire 40%.

    ET POURTANT :

    Selon une enquête de l'Ifop pour le JDD, La candidate du Front national serait le choix préféré des ouvriers. Dominique Strauss-Kahn arrive ensuite avec 17% des intentions de vote, Nicolas Sarkozy avec 15%.

    La candidate du FN opère une solide percée auprès des ouvriers d'après l'enquête Ifop/Paris Match/Europe 1 -publiée mardi prochain, en attirant 36% des intentions de vote chez l'électorat populaire. Dominique Strauss-Kahn n'en recueille que 17%, Nicolas Sarkozy, 15%. Même dans le cas d'une candidature de Martine Aubry (16%), Ségolène Royal ou François Hollande (15%), le PS ne brille guère.

    Alors expliquez vous , ce qui est faux le matin , est vrai le soir ; tout ça sur fond de sondages manipulés ????

    By Anonymous Anonyme, at 10:20 PM  

  • Encore des problèmes dans la compréhension mathématique d'une situation ! Faire 36% chez les ouvriers ne signifie pas atteindre les 40% sur la totalité de l'électorat.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:32 PM  

  • Certes mais le chiffre est impressionnant et comme on n' a pas ceux des autres segments de la population , on ne peut en tirer une autre et globale estimation ...

    Mais ça ne fait pas du tout plaisir de voir ça , la tendance qui persiste est mauvaise pour toute la suite des prochaines élections !!!

    By Anonymous Anonyme, at 10:37 PM  

  • Je partage votre déplaisir.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:32 PM  

  • Si les classes populaires divorcent d'avec le PS à qui la faute ? Sinon au PS lui-même qui s'obstine à défendre et à pratiquer une fois au pouvoir une politique de droite, néfaste aux classes populaires.

    By Anonymous Anonyme, at 12:21 AM  

  • Depuis 2000 certains politiques européen réclament une véritable police des frontiéres communes ??? Pourquoi seulement aujourd'hui , on voit cette carence ???

    Qu' en pensez vous ???

    By Anonymous Anonyme, at 10:29 AM  

  • A 12:21 :

    Je ne sais pas ce que vous appelez une "politique de droite". Ce que je sais, c'est que la politique de la gauche au gouvernement a été violemment critiquée par la droite. J'en conclus que ça ne devait sans doute pas être une politique de droite.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:50 AM  

  • A 10:29 :

    Les problèmes politiques ne se règlent pas fondamentalement par des mesures de police.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:51 AM  

  • Vous n' avez pas compris ; ce n' est pas une question de renforcer , c 'est la question générale des politiques européennes lancées par la commission , peu contrôlées par le parlement en général et qui à terme sont des choses inapplicables ou bancales , c 'est du rêve européen administratif mais pas de la gestion , ni du contrôle et là nos politiques sont responsables de ces situations devenues ingérables ....

    By Anonymous Anonyme, at 10:56 AM  

  • J'ai très bien compris, mais je ne suis pas obligé d'être de votre avis.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 10:58 AM  

  • Comme d' hab , vous allez dans le mur , quand on parle de police , de justice , vous avez des boutons , mais nous on parle gestion , quand allez vous enfin sortir de votre camisole de force achetée en 68 sous les pavés ... OUI vous n'êtes pas en forme , trés pâle hier , la bile ???

    By Anonymous Anonyme, at 11:01 AM  

  • Je vous remercie de vous inquiéter pour ma santé, mais tout va bien. Quant à Mai 68, c'est vrai, j'aime beaucoup. Est-ce un mal ?

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 12:07 PM  

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