L'Aisne avec DSK

12 juin 2007

Etrange histoire belge.

Bonjour à toutes et à tous.

Avez-vous reçu sur votre messagerie, comme moi, la vidéo présentant, soi-disant, Nicolas Sarkozy ivre lors d'une conférence de presse du G8, selon une chaîne de télévision belge? Que faut-il penser de cette étrange affaire? Faut-il en penser quelque chose?

D'abord, je constate que seul le Net s'est emparé, du moins en France, du supposé incident. A ma connaissance, aucun reportage, aucune enquête, aucune investigation n'ont été menés. La presse relate la vidéo mais ne se prononce pas. Hier, à l'émission de RTL "On refait le monde", à 19h15, le ton était rigolard pour évoquer cette affaire. Imaginez que Georges Bush ait été pris dans pareille mésaventure, que n'aurait-on pas dit!

Le problème du Net, c'est la fiabilité des informations, qui souvent n'en sont pas, mais de pures et simples rumeurs. Vous me direz qu'une image n'est pas une rumeur. Pour ma part, je pense que l'image en général est sujet à caution, et celle-là en particulier. Si vous ne retenez que les premières secondes de l'intervention de Nicolas Sarkozy, il en ressort effectivement une impression bizarre de quelqu'un qui n'est pas dans son état normal, tics, sourires, gestes, ton. Mais ceci est fondamentalement une impression, avec sa part de subjectivité. Rien objectivement n'autorise à affirmer que le président de la République était ivre.

Lorsqu'on regarde la totalité de la courte conférence de presse, l'impression demeure mais s'atténue considérablement. Surtout, les propos tenus sont cohérents. A aucun moment n'intervient un lapsus qui trahirait un homme ivre. Bref, je suis extrêmement dubitatif et je m'inquiète politiquement. Car si les anti Sarkozy montrent et montent une telle affaire, c'est qu'ils n'ont rien d'autres à lui opposer, alors qu'il y a tant à lui reprocher. Tout cela me fait penser au pathétique "tout sauf Sarkozy" d'avant le premier tour, où ses adversaires allaient jusqu'à remettre en cause son équilibre mental. On a vu ensuite les conséquences électorales!

Il y a plus grave. Je redoute une société dans laquelle l'image tient lieu de preuve et d'argument. Bientôt, à la façon de la presse people, les hommes politiques vont être traqués dans leur moindre mimique, clignement d'oeil, inflexion de la voix, mouvement de la main, moment de fatigue ou de nervosité. Cette impudeur, cette pornographie des médias sont totalement condamnables.

Supposons que Sarkozy ait été un peu gris après sa rencontre avec Poutine. Chacun sait que la vie politique est jalonnée de toasts quasi protocolaires. Notre nouveau président n'est pas un buveur (ce qui, au passage, rajoute à l'invraisemblance de l'histoire), l'alcool opère donc chez lui très vite et très mal. Dans cette hypothèse purement gratuite, en quoi Sarkozy serait-il condamnable, en quoi ses propos, ses pensées, sa personne en seraient-ils dévalués?

Et si l'anecdote électronique en disait plus sur ses instigateurs que sur sa victime? Ses adversaires veulent signifier, à court d'argument face à un président plébiscité par la population, que celui-ci est ivre, oui, mais ivre de pouvoir et ivre de lui-même. Encore une fois, la démocratie, ce n'est pas cela, non pas le choc des images mais la confrontation des idées. Sinon, la droite aura de longues années devant elle.

Bonne matinée.

6 Comments:

  • Effectivement on n'imagine pas les ravages du "tout sauf Sarkosy".Il faudra un jour faire le compte,non seulement des erreurs du PS,mais aussi des fautes et des manques des intellectuels et de la presse dite de gauche,type Mariane,le nouvel obs,libération et ce pauvre Laurent Jauffrin pathétique et consternant qui aura plus fait pour Sarkosy que tous les médias réunis.

    By Anonymous Anonyme, at 10:30 PM  

  • Si Sarkozy a (un peu) trop bu au G8, c'est anecdotique. Si Cécilia ne vote pas le 8 mai, c'est anecdotique. Si le livre de Cécila n'a pas été édité, c'est anecdotique. Des anecdotes de ce type, on en a trouvé à la pelle, depuis des mois, sur internet.

    Le problème est plutôt dans l'absence de traitement médiatique de ces anecdotes, quand l'actuel président est mis en cause. Par contre, on peut endurer une semaine de JT à parler de "bravitude" ou d'un cafouillage de campagne socialiste.

    Si internet a un rôle, ce n'est pas de dénicher des anecdotes... mais de révéler, par comparaison, le verrouillage des grands médias.

    Thierry D

    By Anonymous Anonyme, at 12:12 AM  

  • Juste pour signaler que le fameux extrait (montrant le début de la conférence de presse) a été diffusé cette nuit, 12 juin à 23h55, sur France3 ("Ce soir ou jamais", l'émission de Taddéi porte bien son nom !). Cinq minutes plus tard et j'en aurais déduis que l'extrait est classé X !

    Juste avant la diffusion, les bobos présents sur le plateau dénonçaient les méfaits d'internet, qui fait gonfler des bulles de savon. Après l'extrait, retour sur le plateau : ils finissent de rire, dans un joyeux brouhaha.

    Thierry

    By Anonymous Anonyme, at 12:42 AM  

  • La vraie et terrible question, pour répondre au premier message, est la suivante: y a-t-il encore en France aujourd'hui des "intellectuels de gauche"? Quand on pense que cette expression, dans les années 1960-1970, a été un pléonasme!

    Merci à Thierry pour ses réflexions et précisions, avec lesquelles je ne suis pas fondamentalement en désaccord, même si je pense que l'usage du Net doit nous inviter à une certaine prudence. Quand je vois ce qu'en font par exemple, parfois, mes élèves!

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 11:52 AM  

  • Une réflexion à propos de l'échec du "tout sauf Sarko", qu'il est de bon ton de dénoncer aujourd'hui.

    Quand, le lendemain du 21 avril 2002, le "Tout Sauf Le Pen" a abouti à la victoire de Chirac, on s'est gargarisé de la Victoire-de-la-République-et-de-la-Démocratie.

    Mais quand le "Tout sauf..." n'aboutit pas, on dénonce une méthode contre-produtive.

    Si la campagne avait été plus pédagogique, Sarkozy l'aurait surement emporté aussi. Et alors on aurait regretté une campagne pas assez "alarmiste".

    On ne sait pas, a priori, ce qui "marche" ou pas. On fait c'qu'on peut...

    Thierry

    By Anonymous Anonyme, at 1:36 PM  

  • Il est vrai, Thierry, qu'il est facile de dénoncer après coup. En politique, il est toujours difficile de savoir ce qui va se passer et les conséquences de nos choix. Ceci dit, j'avais critiqué le TSS avant la victoire de la droite. De toute façon, TSS ou pas, Ségo, Strauss ou un autre, nous aurions perdu. C'est le projet qui cloche.
    Enfin, je ne mets pas au même niveau le "Tout sauf Le Pen" auquel j'adhère par principe (républicain) et le TSS qui me semblait inopérant.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 4:29 PM  

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