Egalité ou liberté?
Bonsoir à toutes et à tous.
Les vacances commencent pour moi. Je vais consacrer ce blog, en juillet et août, à des notes de lectures et réflexions personnelles sur la refondation du socialisme, en rapport avec le manifeste social-démocrate que DSK nous a demandé d'alimenter pour la rentrée. Bien sûr, je continuerai de réagir à l'actualité, mais la France a ceci de particulier qu'elle s'enfonce dans la torpeur durant les deux mois d'été, particulièrement en ce qui concerne la politique. Pourtant, Sarkozy va continuer d'agir et de sévir, et la vie sociale ne va tout de même pas entrer en hibernation. Comme toujours, je compte sur vos remarques, compléments et critiques, pour enrichir mes réflexions, qui feront peut-être l'objet d'un ouvrage si elles sont suffisamment denses. Je prends vos commentaires comme Spinoza rédigeait ses scolies dans son Ethique, des éléments indispensables au développement de ma propre réflexion.
Allons y. Pour reconstruire le socialisme, il faut d'abord se demander ce qui l'a détruit. Sarkozy, bien sûr, mais le reflux vient de loin, la vague est profonde. Ce qui est mort dans le socialisme, c'est la valeur de l'égalité. Ce qui l'a tuée, c'est la valeur de la liberté. Je m'explique. Depuis le XIXème, le socialisme a une finalité qui constitue son originalité, l'égalité entre les hommes. Le libéralisme en revanche, comme son nom l'indique, met en avant la notion de liberté, politique et surtout économique. Le communisme à travers le monde est parvenu, au XXème siècle, à instaurer une plus grande égalité, mais au sacrifice de la liberté. C'est ce qui l'a perdu. Les peuples ont préféré la liberté à la justice sociale. Le siècle passé, tragiquement liberticide avec le nazisme et le communisme, a vu finalement triompher l'idée de liberté. Le mouvement des années 60 en Occident est une formidable aspiration à la liberté.
Du coup, le rêve égalitaire de la gauche a pris du plomb dans l'aile. Les français sont sans doute choqué qu'il existe de très pauvres mais ne se scandalisent plus qu'il y ait de très riches. Toutes leurs réactions politiques s'expliquent par le désir de liberté. Les 35 heures de Jospin? C'est bien joli mais ne nous y forcez pas. Les heures supplémentaires de Sarkozy? Très bien, chacun est libre de choisir. La suppression des droits de succession? C'est la liberté de léguer à qui l'on souhaite la totalité de ses biens. La fin de la carte scolaire? Liberté de mettre son enfant dans l'établissement de son choix. Le bouclier fiscal? Liberté de garder les fruits de son travail. Prenez l'obsession de la sécurité. Que traduit-elle d'autre que la liberté de pouvoir se promener sans être opportuné ou agressé, de vivre tranquillement sans être inquiété?
La défaite de 2007, c'est la consécration d'une défaite culturelle, celle de l'égalité, et d'une victoire, celle de la liberté. Et la doctrine qui incarne le mieux la liberté, c'est évidemment le libéralisme. Que peut faire maintenant la gauche? Deux pistes sont à explorer:
1- La droite n'a pas le monopole de la liberté. Ceette valeur est même parfois, chez elle, problématique. Car c'est bien beau de défendre la liberté en matière politique et économique, encore faut-il aller jusqu'au bout de la démarche, puisque la liberté ne se divise pas, elle est absolue ou n'existe pas. Or la droite a de sérieux problèmes avec Mai 68, l'emblématique commencement de la liberté des moeurs. Il y a là une contradiction, je dirais presque une bombe à retardement dans l'idéologie de droite que la gauche devrait avoir à coeur d'exploiter et de faire exploser.
2- La gauche doit impérativement s'interroger sur son idéal égalitaire, sa pertinence, son actualité, sa modernisation ou... son abandon. Je vais aller très loin, et ce n'est qu'une question sans laquelle il n'y a pas de réflexion: la gauche ne devrait-elle pas se transformer en gauche libérale, assumer prioritairement la valeur de la liberté, en faire son miel et l'inscrire dans son projet? Droite libérale contre gauche libérale, telle deviendrait alors l'alternative, qui n'en serait pas moins tranchée pourvu que les projets respectifs soient clairs.
Mais ce n'est qu'un début, continuons... la réflexion.
Bonne nuit.
Les vacances commencent pour moi. Je vais consacrer ce blog, en juillet et août, à des notes de lectures et réflexions personnelles sur la refondation du socialisme, en rapport avec le manifeste social-démocrate que DSK nous a demandé d'alimenter pour la rentrée. Bien sûr, je continuerai de réagir à l'actualité, mais la France a ceci de particulier qu'elle s'enfonce dans la torpeur durant les deux mois d'été, particulièrement en ce qui concerne la politique. Pourtant, Sarkozy va continuer d'agir et de sévir, et la vie sociale ne va tout de même pas entrer en hibernation. Comme toujours, je compte sur vos remarques, compléments et critiques, pour enrichir mes réflexions, qui feront peut-être l'objet d'un ouvrage si elles sont suffisamment denses. Je prends vos commentaires comme Spinoza rédigeait ses scolies dans son Ethique, des éléments indispensables au développement de ma propre réflexion.
Allons y. Pour reconstruire le socialisme, il faut d'abord se demander ce qui l'a détruit. Sarkozy, bien sûr, mais le reflux vient de loin, la vague est profonde. Ce qui est mort dans le socialisme, c'est la valeur de l'égalité. Ce qui l'a tuée, c'est la valeur de la liberté. Je m'explique. Depuis le XIXème, le socialisme a une finalité qui constitue son originalité, l'égalité entre les hommes. Le libéralisme en revanche, comme son nom l'indique, met en avant la notion de liberté, politique et surtout économique. Le communisme à travers le monde est parvenu, au XXème siècle, à instaurer une plus grande égalité, mais au sacrifice de la liberté. C'est ce qui l'a perdu. Les peuples ont préféré la liberté à la justice sociale. Le siècle passé, tragiquement liberticide avec le nazisme et le communisme, a vu finalement triompher l'idée de liberté. Le mouvement des années 60 en Occident est une formidable aspiration à la liberté.
Du coup, le rêve égalitaire de la gauche a pris du plomb dans l'aile. Les français sont sans doute choqué qu'il existe de très pauvres mais ne se scandalisent plus qu'il y ait de très riches. Toutes leurs réactions politiques s'expliquent par le désir de liberté. Les 35 heures de Jospin? C'est bien joli mais ne nous y forcez pas. Les heures supplémentaires de Sarkozy? Très bien, chacun est libre de choisir. La suppression des droits de succession? C'est la liberté de léguer à qui l'on souhaite la totalité de ses biens. La fin de la carte scolaire? Liberté de mettre son enfant dans l'établissement de son choix. Le bouclier fiscal? Liberté de garder les fruits de son travail. Prenez l'obsession de la sécurité. Que traduit-elle d'autre que la liberté de pouvoir se promener sans être opportuné ou agressé, de vivre tranquillement sans être inquiété?
La défaite de 2007, c'est la consécration d'une défaite culturelle, celle de l'égalité, et d'une victoire, celle de la liberté. Et la doctrine qui incarne le mieux la liberté, c'est évidemment le libéralisme. Que peut faire maintenant la gauche? Deux pistes sont à explorer:
1- La droite n'a pas le monopole de la liberté. Ceette valeur est même parfois, chez elle, problématique. Car c'est bien beau de défendre la liberté en matière politique et économique, encore faut-il aller jusqu'au bout de la démarche, puisque la liberté ne se divise pas, elle est absolue ou n'existe pas. Or la droite a de sérieux problèmes avec Mai 68, l'emblématique commencement de la liberté des moeurs. Il y a là une contradiction, je dirais presque une bombe à retardement dans l'idéologie de droite que la gauche devrait avoir à coeur d'exploiter et de faire exploser.
2- La gauche doit impérativement s'interroger sur son idéal égalitaire, sa pertinence, son actualité, sa modernisation ou... son abandon. Je vais aller très loin, et ce n'est qu'une question sans laquelle il n'y a pas de réflexion: la gauche ne devrait-elle pas se transformer en gauche libérale, assumer prioritairement la valeur de la liberté, en faire son miel et l'inscrire dans son projet? Droite libérale contre gauche libérale, telle deviendrait alors l'alternative, qui n'en serait pas moins tranchée pourvu que les projets respectifs soient clairs.
Mais ce n'est qu'un début, continuons... la réflexion.
Bonne nuit.
2 Comments:
Beau sujet de philo, n'est ce pas!
l'Egalité est impossible, la nature (et tu sais que je suis très (trop peut être) nature!) est ainsi faite. C'est la loi du plus fort! pas forcément la force physique comme dans le monde animal strictement mais la force de l'argent, la force de la beauté, la force de l'intelligence, la force économique, la force militaire, la force de la culture.... et sur ces points là il ne peut y avoir d'égalité! Ce que le socialisme doit essayer de faire, c'est de permettre à chacun de compenser ses lacunes, là ou contrairement à la droite, c'est l'élitisme qui prévaut. Il ne faut pas tuer l'élite (l'élite est nécessaire car c'est elle qui tire vers le haut : la réflexion, l'économie,....) mais permettre à chacun d'accéder au meilleur pour lui même.
De même la liberté n'existe pas ; tu l'as dit, elle est absolue ou n'est pas. Ce qui existe c'et l'impression de liberté, l'impression de ne dépendre que de soi, l'impression de ne suivre que sa volonté! la droite libérale n'est en fait nullement libérale car elle reprime plus qu'elle ne prévient. Là encore ce n'est qu'une impression de liberté : les pauvres sont-ils libres d'acheter leur logement ? Les étrangers sont-ils libres de s'installer sur notre sol ? Les enfants sont-ils libres de choisir leur orientation scolaire ? Les salariés sont-ils libres de travailler seulement 35 heures ? Les chômeurs sont-ils libres de choisir leur emploi? ... Seuls ceux qui ont la force ont un peu plus de choix et encore! L'économie est mondialisée et la force de l'argent est ephémère, la beauté ne dépend que de la mode du moment, l'intelligence n'est que relative de même que la culture !...
Que faire alors ? je ne sais pas. mais ce que je ressens c'est que la culture de l'effort doit revenir, qu'elle doit être enseignée et là ce n'est pas gagné! C'est par l'effort que l'on peut devenir plus riche, plus cultive, plus fort....
MD
By md, at 7:25 AM
Michel termine son commentaire par une valeur, l'effort, qu'on peut aussi appeler le travail, et qui doit évidement être au coeur de notre réflexion. Historiquement d'ailleurs, le socialisme s'est construit autour de la notion de travail, alors que la droite réactionnaire et aristocratique défendaient l'oisiveté. C'est par un curieux retournement de l'Histoire (comme il en existe tant!) que la "valeur travail" est passée du côté de la droite sarkozienne. Relisez Marx, c'est une belle et profonde réflexion sur le travail. Comment négliger de penser le travail lorsqu'on se réclame du camp des travailleurs!
Et puis, pour revenir à ma réflexion sur la liberté, le travail n'est-il pas une forme de liberté, je dirais même de libération? Travailler, c'est s'émanciper de l'ignorance, des préjugés, c'est, plus prosaïquement, avec l'argent gagné, se donner les moyens financiers de la liberté, qui ne sont tout de même pas à oublier! Travailler, c'est s'instruire, se former, s'éduquer, s'épanouir, se libérer de soi-même, de son passé de sa famille, c'est la liberté de se construire.
A la différence de Michel, j'introduirais une différence entre liberté et égalité. Pour être brutal: l'une existe, est réelle, concrète, l'autre non. C'est aussi une raison pour préférer la liberté à l'égalité. L'égalité n'existe nulle part dans la nature, Michel l'a fort bien remarqué. Elle est une pure abstraction, d'essence mathématique, passée dans le domaine juridique (l'égalité républicaine des droits).
La liberté en revanche est réelle, palpable, tangible. Quand je suis en prison, pas besoin de philosopher pour savoir alors ce qu'est la liberté. Quand je cours dans les champs, les cheveux au vent (pas les miens, il ne m'en reste plus beaucoup!)je sais que je suis libre parce que je le sens. La liberté, nous la sentons, nous la vivons, nous souffrons de sa diminution, nous prenons plaisir à son augmentation. Rien de tel pour l'égalité, qui laisse froid. Normal, ce n'est qu'un concept, une idée.
By Emmanuel Mousset, at 12:44 PM
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